Poésie - La poésie à quoi ça sert ? - Jean-Pierre Siméon - La nuit respire
La différence.
Pour chacun une bouche deux yeux
deux mains et deux jambes
Rien ne ressemble plus à un homme
qu’un autre homme
Alors
entre la bouche qui blesse
et la bouche qui console
entre les yeux qui condamnent
et les yeux qui éclairent
entre les mains qui donnent
et les mains qui dépouillent
entre les pas sans trace
et les pas qui nous guident
où est la différence
la mystérieuse différence ?
A l'aube du buisson
On peut voir se lever
La flamme d'un oiseau
La lumière se poser
Dans la main des feuilles
La pluie enchanter
Ses abeilles limpides
Le silence à genoux
Et les heures offertes
Comme des fruits sucrés
On peut voir bien des choses
A l'aube du buisson.
J'ai vu tant de fous
souffler sur la bougie
et s'étonner de l'ombre dans leur vie.
J'en ai vu défaire le jour de leurs épaules
comme d'un manteau la neige et
revenir de la beauté les mains vides.
Je cherche un mot
Vaste et chaud comme une chambre
Sonore comme une chambre
Sonore comme une harpe
Dansant comme une robe
Clair comme un avril
Un mot que rien n'efface
Comme une empreinte dans l'écorce
Un mot que le mensonge ne séduit pas
Un mot pour tout dire
La mort la vie
La peur le silence et la plainte
L'invisible et le doux
Et les miracles de l'été
Depuis si longtemps je cherche
Mais j'ai confiance en vous :
Il va naître de vos lèvres...
Si tu pouvais voir l'éclat de ton visage dans la nuit
Si tu pouvais entendre quand tu dors le bruit de source à tes lèvres
Si tu pouvais sentir sur ta joue le souple frisson de tes doigts
Si tu pouvais sous tes pas être la terre étonnée de tant de joie de tant de force
Si tu pouvais courir sur l'invisible chemin qui mène à ton cœur
Tu serais crois-moi ....
Tu serais le meilleur ami de toi-même
La Différence ...
Pour chacun une bouche deux yeux
deux mains deux jambes
Rien ne ressemble plus à un homme
qu’un autre homme
Alors
entre la bouche qui blesse
et la bouche qui console
entre les yeux qui condamnent
et les yeux qui éclairent
entre les mains qui donnent
et les mains qui dépouillent
entre le pas sans trace
et les pas qui nous guident
où est la différence
la mystérieuse différence ?
Il suffit d'un mot
Pour prendre le monde
Au piège de nos rêves
Il suffit d'un geste
Pour relever la branche
Pour apaiser le vent
Il suffit d'un sourire
Pour endormir la nuit
Délivrer nos visages
De leur masque d'ombre
Mais cent milliards de poèmes
Ne suffirait pas
Pour dire
Comme il est bon d'aimer
Marche,
Ne t'arrête pas de marcher
D'ouvrir des portes
De soulever des pierres
De chercher dans les tiroirs de l'ombre
De creuser des puits dans la lumière
Cherche,
N'arrête pas de chercher
Les traces de l'oiseau dans l'air
L'écho dans le ravin
L'incendie dans les neiges de l'amandier
Tout l'ignoré
Le caché
L'inconnu
Le perdu
Cherche
Tu trouveras
Le mot et la couleur de ton poème
SANS FRONTIÈRES FIXES
Voilà ce qu’ils disent :
l’anémone est plus intelligente que la rose
le sable est plus beau que le chat
et la pierre a toujours été
supérieure au potiron
Ils reprochent au noir
d’être plus noir que le blanc
comme si on reprochait au feu
d’être plus chaud que la neige
et au miel d’être plus sucré que la vague
Et s’ils ont peur de leur ombre
c’est qu’ils se doutent un peu
que haïr l’étranger
c’est avoir peur de soi.
La poésie possède une force de percussion et de vibration, qui fait ressentir, et, dès le plus jeune âge, son caractère profond. Qu'on la lise ou qu'on l'écoute, elle reste partageable par tous.