Citations de Srdjan Valjarevic (28)
Comment ressentir chaque jour la joie de vivre? Ne pas se cacher, ne pas avoir trop d’assurance, être modeste, ne prendre que de petites décisions, marcher beaucoup,
rire à ses propres dépens. Je ne voyais pas d’autre solution.
p.81
On change ses habitudes en en créant des nouvelles, j’ai lu ça quelque part.
p.92
Les couleurs s’étalaient, se déplaçaient, descendaient des montagnes, arrivaient par-delà les forêts obscures jusqu’au lac et s’y immergeaient, grâce au soleil qui animait leur trajet.
p.33
Ce n’est pas si mal d’être riche, me suis-je dit, d’avoir un yacht, une maison sur le lac, de s’acheter tous ces manteaux, chemises, vestes, chaussures et pulls pour plusieurs centaines ou milliers d’euros. Mais ce n’est pas si mal non plus de ne pas être riche et n’avoir rien de tout ça, parce que tout ça n’a rien avoir avec la vraie vie.
p.25
Je suis resté un bon moment assis à cet endroit, j'étirais mes jambes et tournais mes chevilles. Mes articulations craquaient.
C'était comme si jamais je n'avais été nulle part auparavant. Ça valait largement la peine de monter. C'était comme si je n'avais jamais rien fait auparavant, ni de bon ni de mauvais. j'ai ressenti, tout le temps que j'ai passé là-haut, une fatigue et une sérénité pures. Rien d'autre, sur ce sommet. Ça valait vraiment largement la peine d'escalader le San Primo.
Etre idiot et immature, c'était une position idéale pour moi, on n'embête pas les gens qui sont ainsi faits.
La forêt faisait partie de ce luxe, certes, mais ce n'était quand même qu'une forêt avec ses sentiers, j'ai marché sur la terre dure, pour changer. Des changements de ce genre font du bien. Il y en a aussi qui font du mal. L'homme n'est pas enclin aux changements. C'est précisément pourquoi il faut toujours que quelque chose change. Le mot joie n'existe que dans les changements.
Puis tout d'un coup, il y a eu comme une explosion de silence!
Plus un seul bruit !
Sans mentir! ça s'est vraiment passé comme ça ! Soudain, comme un coup de silence très fort dans les oreilles ! En l'espace d'un instant, tous les oiseaux se sont tus, comme débranchés. Il n'y avait plus aucun bruit. Ça m'a arrêté net. Ce silence soudain, cette absence totale de son m'a déconcerté. On n'entendait plus rien, plus rien ne se passait.
C'est étrange, un petit transistor, on le met sur sa poitrine ou près de son oreille, et on a l'impression que quelqu'un nous murmure quelque chose à l'oreille, quelle que soit la langue, et ça nous endort.
Les habitudes sont vraiment une sale affaire. On n'arrive pas à se libérer de certaines, et il y en a d'autres que l'on ne peut traîner partout avec soi. Trop coûteuses. Les habitudes de travail mises à part, bien sûr. On peut travailler n'importe où, si on est obligé, ou si on le veut. Moi, je n'ai pas ce problème-là. Je peux ne rien faire du tout. Peu importe où je suis. Si j'ai un problème avec certaines mauvaises habitudes, celle-ci ne concernent sûrement pas le travail. C'est dans ma nature, je pouvais me sentir chez moi à Bellagio parce que, de toute façon, je me sens chez moi absolument partout.
... j'ai pris un des livres que j'avais apporté de Belgrade, de courtes nouvelles de Robert Walser. Le livre se trouvait sur ma table de chevet, dans mon appartement de Belgrade, lorsque, à la hâte, j'avais fait mes bagages. Je l'ai ajouté aux autres affaires sans réfléchir. J'ai ouvert grande la fenêtre de ma chambre et la longue branche d'un châtaigner est presque entrée, disposée à me tenir compagnie. Je ne saurais dire combien de fois j'avais déjà lu ces nouvelles. Je ne me lasse pas de les relire, en fait. Je me suis contenté de survoler les phrases de Walser, de m'y promener un peu puis, je ne sais exactement à quel moment, je me suis endormi.
Comment ressentir chaque jour la joie de vivre ?
Ne pas se cacher, ne pas avoir trop d'assurance, être modeste, ne prendre que de petites décisions, marcher beaucoup, rire à ses propres dépens. Je ne voyais pas d'autre solution.
- Et le jazz et la biologie, ça fait bon ménage ?
- Un mariage parfait. Les deux sont de la pure improvisation.
Mme Milita m'a envoyé un regard plein de méfiance.(...) elle observait sans cesse comment les autres étaient habillés, comment ils mangeaient ou comment ils se comportaient.
--- Et quels sont les auteurs qui t'intéressent ?
--- Robert Walser, Thomas Bernhard, Walter Benjamin, Robert Musil, Mlos Crnjanski... j'ai cité les noms en faisant très attention de choisir des écrivains que j'aimais vraiment, mais dont elle n'avait, à mon avis, jamais entendu parler.
Elle m'a regardé déconcertée. J'avais réussi mon coup. Elle croyait sans aucun doute que je venais d'inventer tous ces noms. J'étais certain que nous n'allions plus jamais nous parler.
Je suis revenu dans ma chambre. J'ai consulté le dictionnaire Robin. C'est comme ça que l'on dit rouge-gorge en anglais. J'en ai pris note. Pour apprendre. Ce n'était finalement pas vrai que je ne faisais rien. J'avais noté toute une liste de noms d'oiseaux en anglais.
J'avais de la chance avec le temps, l'air était limpide, il faisait clair et ensoleillé. Je me régalais de ce que je mangeais. Je regardais les Alpes, mais de tout près, à présent. Des lieux pas encore dégradés, qui n'ont aucune utilité et qu'on ne sait pas par conséquent comment corrompre. Devant un tel spectacle, j'étais moi aussi incapable de mesquineries.
.... C'était comme si jamais je n'avais été nulle part auparavant. Ça valait largement la peine de monter. C'était comme si je n'avais jamais rien fait auparavant, ni de bon ni de mauvais. J'ai ressenti, tout le temps que j'ai passé là-haut, une fatigue et une sérénité pures. Rien d'autre, sur ce sommet.
J'ai passé tout l'après-midi seul dans mon bureau.
Je n'avais aucun projet.
Je n'avais aucun désir.
Je me sentais bien.
Je regardais par la fenêtre.
Je lisais.
Ce n'est pas si mal d'être riche,me suis-je-dit,d'avoir un yacht,une maison sur ce lac,de s'acheter tous ces manteaux,chemises,vestes,chaussures et pulls pour plusieurs centaines de milliers d'euros.Mais ce n'est pas mal non plus de ne pas être riche et de n'avoir rien de tout ça,parce que tout ça n'a absolument rien à voir avec la vraie vie.
A 18h05 précises, je m'aperçois d'une chose et j'en tire une conclusion : je suis dehors depuis deux bonnes heures et je n'ai pas encore vu les moineaux. Ils ne sont nulle part, j'en suis presque persuadé, ils se sont mis à l'abri du froid. Ils sont si petits et quand ils ne sont pas là, leur absence est si grande...
Ferme les yeux et entre dans ta douleur ! N'attends pas que la douleur passe, passe toi-même à travers elle ! Les nerfs ont besoin d'un Otis Redding ! Fais-leur écouter de la soul ! Je me lève et je mets cette musique et je me rallonge sur le tapis. Et je referme les yeux. La douleur s'étire. Je résonne et je lévite, j'arrive à voyager à travers tout ça, de plus en plus calme sur le tapis...