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Critiques de Stéphane Durand-Souffland (90)
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Jours de crimes

À travers des affaires nombreuses, célèbres ou pas, évoquées en quelques lignes ou plus longuement, avocats, greffiers, huissiers, jurés, accusés, témoins, juges sont passés au crible ; les deux chroniqueurs judiciaires (au Monde et au Figaro) Pascale Robert Diard et Stéphane Durand Souffland rapportant avec verve et souvent avec humour, les mensonges et les vérités, l'habileté et les maladresses, les travers, les vantardises, les peurs, le silence et l'éloquence des uns et des autres. 



« Pendant plusieurs jours, parfois plusieurs semaines, rien d'autre ne compte. L'univers tout entier se condense entre les quatre murs d'une cour d'assise. Dedans on se saoule de mots et de visages. Des hommes, des femmes dont nous ignorions tout nous deviennent familiers. On apprend où ils sont nés, comment ils ont grandi, qui ils ont aimé, comment ils ont été aimés ou mal aimés. On voit leur mère, leur père, leurs frères et soeurs, leurs voisins, leur employeur, leur instituteur, leur meilleur ami, leur pire ennemi. Rien d'eux ne nous est épargné, surtout ce qu'ils voudraient cacher. Leurs mensonges, leurs aveux, leurs silences, leurs épreuves, leurs corps, ses blessures et ses plaisirs sont disséqués devant nous ... ripailleurs d'humanité. »



Des ripailleurs qui nous offrent une plongée édifiante dans l'univers des cours d'assises et de leurs coulisses — où il faut bien le dire, souvent l'essentiel se mélange à l'accessoire.



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Mission divine

Chroniqueur judiciaire, Stéphane Durand-Souffland a suivi l'affaire Moitoiret, l'histoire de deux marginaux itinérants en mission divine sur les routes de France, achevée par le meurtre du petit Valentin en 2008.



Vingt ans de périple à travers la France en auto-stop pour Sylvia Sa Majesté et Etienne le roi d'Australie, on se dit avec un frisson rétrospectif qu'on a peut-être croisé les vrais protagonistes. Pris en stop peut-être aussi, à l'instar de Justine en vacances dans l'Aveyron, qui s'est arrêtée pour l'émotion suscitée par la vue au loin du minuscule chien qu'ils tenaient en laisse. Sauf que c'était un chat. Et ça n'est pas forcément le plus inédit, pour ce couple en mission divine, que de bourlinguer avec un minet en laisse, en se faisant passer pour d'éminents représentants de la royauté australienne. Il y a tout le reste. Belbar, Balthazar et Anacimsabre en tête, « inquiétants Rois mages des Évangiles selon Sylvia », puis toute une « cosmologie complexe dont, seule, elle maîtrisait les lois », et dont elle abreuvait Etienne, amoureux éperdu enclin à la croire, et surtout la suivre. Jusqu'à l'inéluctable « retour en arrière », enclenché par Etienne.

Il y a bien eu des gens qui les ont croisés, adultes pour la plupart, qui ont éludé. Il y a eu des enfants aussi, la plupart chanceux qui ont pu s'exprimer, qui parfois « leur lançaient des quolibets, « Les fous, les fous » ! », comme si la vérité sortait décidément de leur bouche. L'arsenal judiciaire quant à lui aura plus du mal à l'estimer, la folie. Si le livre nous plonge dans la vie itinérante, l'enfance et la psyché tortueuse des deux personnages principaux, il s'évertue aussi à décrire par le menu le processus judiciaire mis en branle par l'arrestation du couple. le sujet principal est d'ailleurs là, porté par l'article 122-1 du Code pénal : « N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ». Fous ou pas, telle est la question qui surnage de la bataille d'experts, parfois perdus dans l'instrumentalisation de la justice. le lecteur quant à lui pourra vérifier si la juridiction peut être parasitée par le monde politique, ou l'opinion publique.



Ceci n'est pas un récit, c'est une fiction : « Je voulais, par le biais du roman – certains événements et personnages de ce livre sont imaginaires –, aborder différemment la problématique de la justice confrontée à la folie », précise l'auteur en post-scriptum. On pourrait regretter qu'il n'ait pas fait son Truman Capote, mais le choix de la fiction au détriment du récit souvent choisie pour les adaptations de faits divers tient peut-être à cela, l'accent porté sur l'indépendance supposée de la justice. L'illusion de réel est néanmoins présente tout le long du périple, et en cela le roman est une franche réussite, notamment dans la construction et la tension qu'il dégage, le lecteur en totale immersion du début à la fin.



« Le « retour en arrière », sorte de martingale universelle, ne devait être mis en oeuvre qu'en cas de nécessité absolue. Qui d'autre qu'Étienne aurait pu croire Sylvia capable de faire, pour de vrai, remonter le temps à l'univers ? »
Lien : https://www.benzinemag.net/2..
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Bête noire

J'étais assez fascinée par le franc parler et l'éloquence de Maître Dupont-Moretti, mais j'avais beaucoup de difficultés à comprendre comment un homme pouvait vouloir aussi fortement défendre des criminels reconnus. Et c'est là que l'on voit que cet avocat est doué, car après la lecture de son livre, je comprends parfaitement que c'est avant tout un devoir de justice. J'ai appris beaucoup avec ce livre, sur la justice, sur l'Homme, sur la misère, les émotions... Les auteurs ont su soulever de nombreuses incohérences dans notre système judiciaire français, mais ils ont également su vulgariser pour le tout venant la complexité de ce milieu. J'ai trouvé dans ce récit une volonté de défendre des droits fondamentaux, l'égalité pour tous et surtout le droit à la justice. Un livre que je recommande fortement.
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Directs du droit

J'ai quand même eu du mal à entrer dans ce livre avec l'avant-propos et le premier chapitre "Les nouveaux juges", soit un total de 80 pages plutôt techniques où Maître Dupond-Moretti plaide contre les magistrats. Je n'ai pas particulièrement apprécié cette guerre déclarée avocats contre magistrats. Il me semble qu'il y a de bons fonctionnaires de Justice, comme il peut y en avoir de mauvais, et la même proportion de bons ou mauvais avocats. Cela se retrouve d'ailleurs dans toutes les corporations. Les chapitres suivants sont des études de cas d'affaires connues de Maître Dupond-Moretti. Là naturellement, en sa qualité de membre du barreau affirmé il prend fait et cause pour ses clients confrontés aux rouages de la Justice... c'est normal, c'est sa profession... mais je me demande quand même en découvrant ces prévenus, qu'elle aurait été mon intime conviction si j'avais été juré d'assises...

Je n'ai pas été convaincue par ce livre.
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Frissons d'assises. L'instant où le procès ba..

Quatorze procès relatés par Stéphane Durand-Souffland, témoin privilégié de par sa mission : chroniqueur judiciaire au Figaro. Il a choisi un angle particulier, "l'instant où le procès bascule" Il précise qu'un étrangleur reste un étrangleur quelque soit le lieu, mais ce n'est pas la même chose s'il est jugé en plein été, dans une salle où l'on suffoque, ou en février, dans une salle qui éternue. Il ajoute que son sujet est bien le procès , son déroulement, les protagoniste et non pas le fait divers.
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Bête noire

Entre autobiographie et essai, l'avocat pénaliste Eric Dupond-Moretti (et Stéphane Durand-Souffland) nous relate les turpitudes d'un défenseur de toutes les causes, à travers une liste sans ordre ni chronologie, de certaines de ses affaires, qui nous éclairent sur son état d'esprit et sa vision de la Justice et du rôle de l'avocat.



"Cette interminable attente de la sentence n'est pas un temps comme les autres : c'est un moment suspendu, une parenthèse de mystère durant laquelle se joue le destin d'un être."



Au travers de son regard critique et sans concession, c'est l'organisation d'une cours d'assise qui nous sera expliquée, tout comme les dérives de cette organisation, notamment sur le choix des présidents de cours et des avocats généraux.

Celui qu'on surnommera "acquittator" nous dévoilera ainsi les dessous du corporatisme, sa vision de l'affaire Outreau, des experts psychologiques et aussi des jurés, avec un franc parlé qui a fait sa réputation de Bête Noire de la justice.



J'aime le personnage d'Eric Dupond-Moretti ; sa prestance, son assurance, sa logique et sa force de persuasion.

C'est un homme de tempérament qui est passionné par son métier, dont il ressent la difficulté comme la nécessité et l'importance.



"Les vrais avocats pénalistes ne reconnaissent ni Dieu, ni maître, ils ne rendent de comptes à personne".



Dans ce cadre, il est imprégné de justice et d'égalité, entier en toute circonstance et n'a pas peur de dire ce qu'il pense.

On pourrait néanmoins lui reprocher ce complexe de persécution qui n'est rien moins que le retour de bâton de son franc parlé. Ben oui... quand tu causes comme ça, faut pas t'attendre à c'que ça plaise à tout le monde...



On ressent son amour du métier, celui d'avocat pénaliste, qui l'amène parfois à défendre l'indéfendable, et qui s'oppose à toute forme d'injustice.



Mais au-delà du personnage, ce récit manque un peu de structure. Il s'agit sans doute plus d'une série de mémos griffonnés sur un coin de nappe que d'un texte construit au fil du temps.

On y apprend néanmoins beaucoup sur les aberrations de notre système judiciaire au travers de son regard féroce mais quelque peu narcissique tout de même.



Si on aime le personnage, ce livre se lira sans difficulté et très rapidement... sur un coin de table aussi peut-être...



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Jours de crimes

Ces chroniques proposent un éclairage différent de celui des journaux sur des faits divers connus ou moins connus. Elles restituent leur part d'humanité aux criminels et à leurs victimes et abordent ce à quoi on pense rarement, sauf si l'on a été magistrat ou juré : l'accusé reste un être humain et le procès d'assise est une des pires épreuves par lesquelles on puisse passer, que l'on soit innocent, coupable ou coupable avec des circonstances atténuantes. Le procès est souvent une sordide et épouvantable mise à nu devant tous, amis, ennemis, parents, employeurs, collectivité entière.

Que dire, aussi, de la tragédie de cette mère méritante et exténuée de quatre enfants, dont un gravement handicapé et qui, venant d'être licenciée, a oublié son enfant dans sa voiture au soleil à la suite d'un black out total de quelques heures dû au surmenage et au chagrin.... ou du meurtre de cette femme sur la personne d'un mari ayant battu et violé épouse et enfants durant des années ?

Dommage que certaines affaires soient traitées si brièvement : le message des auteurs passe, mais l'intérêt a tendance à s'émousser au fil de la lecture, faute de développements suffisants pour se plonger dans les affaires qui sont surtout, il ne faut pas l'oublier, de terribles drames humains.
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Bête noire

Eric Dupond-Moretti est un avocat pénaliste français de plus en plus connu. Il détonne un peu dans le monde des avocats, même des pénalistes, par son franc-parler.

Chaque époque a ses pénalistes célèbres. Depuis la fin de la peine de mort en France, ils font moins l'actualité mais Me Dupond-Moretti est avec Me Metzner et quelques autres une vedette du droit pénal en France,



Avec le chroniqueur judiciaire du Figaro, Stéphane Durand-Soufflant, il nous donne aujourd'hui un livre d'entretien en 13 petits chapitres, de 249 pages. Le livre est imprimé en gros caractères et on le lit très facilement, d'une traite ou deux.



Dupond-Moretti ne se prend pas au sérieux. C'est une de ses forces. Le livre lui-même fait preuve d'autodérision, déjà à travers son titre, Bête noire, avec en arrière-plan sur la couverture la photo en robe noire d'un avocat décidé. Bête noire de certains magistrats, il l'est assurément. L'un d'entre eux a même voulu le faire poursuivre pour une affaire d'usage de stupéfiants qui s'est révélée totalement infondée. L'avocat a beaucoup d'acquittements à son actif, au point d'avoir récolté le surnom d'"acquittador", et donc beaucoup de mécontents dans l'appareil judiciaire. Le sous-titre "Condamné à plaider" est dans le même registre d'autodérision.



Avocat depuis 30 ans, Me Dupond-Moretti est partisan non pas d'une défense de rupture à la Vergès, mais d'une défense musclée à l'intérieur du système. Il ne craint pas d'affronter les magistrats si nécessaire.



Il évoque son travail, les rapports avec les clients, bien qu'il n'aime pas ce qualificatif, prévenus ou accusés, le plus souvent, victimes parfois, ainsi que quelques tactiques et stratégies procédurales.



On y apprend beaucoup sur la façon dont se prennent les décisions, sur le rôle primordial du Président de la cour d'assises, à même d'influencer le verdict dans la quasi-totalité des cas et sur quelques grands procès, dont Outreau, un des plus grands scandales judiciaires de notre pays, dont on n'a toujours pas tiré les conséquences.



Lecture intéressante sur un univers trop méconnu .
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Directs du droit

C'est étrange, je viens de terminer la lecture de ce témoignage de E.D.M. et l'affaire Balkany vient d'aboutir pour ce premier chapitre sur son incarcération à 4 ans ferme pour lui et 3 ans ferme pour son épouse. Voilà, en ce vendredi 13 septembre 2019, début d'après-midi, le Maire de Levallois-Perret se retrouve à la Santé (celle-ci ayant été complètement remise aux normes). Mr Balkany se retrouve donc dans un 9m² mais dans l'aile des ''cols blancs'', bien entendu. Sinon, pas de mesures particulières pour lui hormis une surveillance un peu plus accrue dans les premiers jours au cas où ses nerfs craqueraient suite au choc de ce mandat de dépôt.



J'en reviens au livre mais comprenez que je ne pouvais pas passer sur cette actualité dont la sentence ne s'est jamais vue en France pour ce type d'affaire concernant un couple d'élus.



E.D.M. relate quelques affaires dont il s'est occupées. Il y a des histoires ahurissantes mais elles sont véridiques ! le but de ce livre est pour lui de parler de l'intégrité, de la dépendance, de la neutralité des magistrats, juges d'instruction, présidents des cours d'assises. Bien entendu, il y a des juges qui sont de grands juges et qui écoutent attentivement la défense et n'oublient surtout pas que l'on reste présumé innocent.

D'autres juges, et c'est ce que dénonce Eric Dupond-Moretti, se font déjà leurs idées sans avoir vu qui que ce soit, ils sont liés d'office à la cause des victimes, s'ils n'aiment pas l'avocat de la défense, si les médias ont trop parlé en faveur des parties civiles, si l'opinion publique a condamné le mis en examen (sans d'ailleurs ne connaître d'aucune manière ce qui se trouve dans le dossier), le juge rend son acte à charge.

E.D.M. veut que la morale n'entre pas dans les jugements, les arrêts, les juges et autres doivent rester neutres, impartiaux, justes, se référer au droit et seulement au droit.



C'est l'affaire Christian Ranucci ''Le pull-over rouge'' qui a déclenchée chez Maître Dupond-Moretti qui à 15 ans écoutait la radio, et on annonçait la peine capitale pour Ranucci et c'est par détestation de la peine de mort qu'il a décidé qu'il exercerait la profession d'avocat.



Lu en septembre 2019 / Michel LAFON - 17,95 €.
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Mission divine

Un roman qui nous narre un terrible fait divers d'un meurtre d'un enfant, nous suivons dans une alternance de passé et présent le "parcours" de son assassin et de sa compagne.



Couple plus que marginal qui erre de villes en villes en faisant l’aumône pour se nourrir et dormir, errant sans but précis, elle se définissant comme "Sa majesté" et lui se voyant comme le roi d'Australie. Beaucoup d'automobilistes se rappellent avoir croisé ce couple atypique avec un chat en laisse.



Tout a basculer lorsque le roi d'Australie va commettre l'irréparable est tué un enfant faisant du vélo, voyant un signe dans cette situation.



Le couple est rapidement arrêté et nous suivons le procès ainsi que la façon dont l'affaire est traité par les journaux et par la politique de l'époque, les hommes politiques se rendant sur place en hélicoptère afin que cette affaire soit résolu le plus rapidement possible.



Le style est efficace et concis, l'auteur nous décrit de façon simple et précise cette affaire dont il a changé le nom des protagonistes mais dont on reconnait aisément l'affaire.
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Bête noire

J'ai toujours apprécié ce personnage médiatique officiant dans nos tribunaux. Ce Dupont Moretti de part sa prestance, son assurance, ses interventions dans des procès souvent à la une des journaux, bref pour résumer son charisme peut bien être qualifié de personnage à part entière.

La lecture de ce livre ne m'a pas décu, pas tellement par l'aspect des coulisses de certaines histoires judiciaire mais surtout pour les passages où il parle des coulises de sa vie d'avocat.

Sa comparaison avec une vie d'artiste est bien vu et me semble assez juste, une vie sans temps morts, une vie faite d'attente, une vie où le résultat final de votre travail, à savoir l'acquittement ou la condamnation de ses clients,ne dépend pas de vous mais des décisions d'autrui.

Quelle vie incroyable, il offre une vision de la justice singulière basé sur l'accusé et non sur les victimes. Un discours sans concession parfois dérangeant tellement il peut sembler anti moral. Mais comme il le repète souvent je fais du droit pas de la morale.

Le seul point négatif est qu'il s'appuie sur de trop nombreux exemples pour illustrer ses propos, un tri plus important de ses anecdotes n'aurait pas nui à la force du discours.

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Bête noire

Chacun connaît ce redoutable avocat pénaliste, l’un de ceux qui a fait exploser l’accusation au procès d’Outreau ou dans l’affaire Viguié (ce professeur de droit toulousain accusé d’avoir fait disparaître sa femme, et définitivement acquitté aujourd’hui). Pour caractériser une reprise d’audience dans ce dernier procès, un journaliste écrivait : « Et Me Dupond-Moretti allume sa concasseuse… ». Il s’agissait bien sûr de sa machine à broyer les arguments faiblards de l’accusation.



Pour défendre ses clients, Me Dupond-Moretti se livre à une analyse critique de chaque pièce du dossier, afin d’introduire le doute ; le « joyeux » désordre régnant apparemment dans la gestion administrative de la Justice et de la Police lui permet souvent de démolir ce qui devait servir de preuve (par exemple en démontrant une confusion d’échantillons d’ADN).



Au-delà de cette intelligente méthode de défense, Me Dupond-Moretti met en cause la « violence » et l’inégalité des Assises, où tout est fait, comme au XIXème siècle, pour condamner. Il dénonce les nombreux moyens qu’a le Président pour favoriser l’accusation contre la défense, et en appelle à une procédure pénale plus égalitaire, et surtout à la rupture du lien étroit entre les Juges et les Procureurs, membres d’un même Corps où l’on peut faire carrière alternativement au Siège et au Parquet.



Il montre ainsi que l’affaire d’Outreau n’a pas été un accident, mais le fidèle reflet des dysfonctionnements qui affectent notre Justice : jamais la Chambre d’accusation, saisie par les accusés en appel du juge d’instruction et du juge de la détention, n’a remis en cause leurs raisonnements.



Que faire ? Bien sûr, il faudrait se rapprocher du modèle anglo-américain, dans lequel le Parquet est sur le même pied que la Défense, et qui laisse le Jury populaire seul dans sa délibération. Mais l’auteur est moins prolixe en propositions qu’en critiques : peut être ressent-il combien il est difficile d’aller contre le puissant corporatisme des magistrats et de leurs tout puissants syndicats.



Un petit bémol toutefois : la publication in extenso d’un échange de lettres entre l’auteur et un magistrat a sans doute soulagé (entendu au sens des Tontons Flingueurs) Me Dupond-Moretti, mais n’ajoute pas grand-chose à l’intérêt de son témoignage.

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Bête noire

C’était une lecture passionnante à bien des égards. Eric Dupond-Moretti nous ouvre les portes de sa profession et particulièrement celle des avocats pénalistes.







Il critique de façon assez comique parfois certains abus de la justice, notamment aux assises concernant le rôle prépondérant du Président de Cour d’assises dans le déroulement du procès, celui encore plus fort du parquet, la frontière très diffuse entre la magistrature debout et assise avec toutes les connivences qu’il nous expose, exemples concrets et vécus à l’appui et enfin le poids mineur des jurés dans la sentence finale.







J’ai trouvé ses propos virulents à outrance, mais il est passionnant, n’est pas un brillant avocat qui veut… Quand à sa profession et le fait qu’il est parfois critiqué sur le fait qu’il défend plus les accusés que les victimes, il a une phrase admirable que je trouve résumer parfaitement sa philosophie : « Je peux défendre un négationniste, mais en aucun cas le négationnisme ».







Décortiquer toute la procédure pour retrouver d’éventuels vices de fond ou de forme, dénoncer les procès instruits uniquement à charge, revendiquer l’humanité de celui qui a commis l’irréparable, tenter de convaincre de l’innocence de son client lorsque celle-ci est plausible ou simplement obtenir une peine proportionnelle et juste aux faits reprochés, voilà le quotidien d’un pénaliste qui se déchausse de son jugement moral pour défendre uniquement sur le terrain du droit un client qui demande de le défendre.











L’opinion publique a facilement plus d’attachement pour la victime c’est un fait.



Le procès est parfois l’occasion pour la victime de faire son deuil, la condamnation à la peine maximale exigée par les parties civiles peut se comprendre d’un point de vue moral mais le procès ne doit pas servir comme forme de consolation pour la victime.



Le procès doit être entendu comme le moyen pour la société dans son ensemble de condamner le cas échéant à une peine juste, toujours en ayant à l’esprit le respect scrupuleux des droits de la personne mise en cause.







Je trouve cependant qu’il nous livre à travers son livre un certain nombre de préjugés qu’il a lui-même sur le procès, ou du moins qu‘il veut nous faire acquérir. Dans l’avant-propos il nous interpelle : « Observez le président quand il pose ses questions, devinez qui l’agace le plus : l’accusé, l’avocat qui le défend ou l’avocat général qui l’accuse? Prêtez attention aux arguments de ce dernier, chargé de prouver la culpabilité de l’homme du box:  Est-il convaincant? Fait-il des efforts pour l‘être ?…».



Pour moi il part du postulat que le Président ne fait pas son travail de façon neutre, que l’avocat de la défense agace forcément, et que l’avocat général n’a pas de grands efforts à fournir pour convaincre de la culpabilité…







Personnellement je trouve un peu malsain cette façon de nous exposer son point de vue, bien des sous-entendus en découlent. De mon point de vue lever des soupçons sur toute la profession de magistrat pour orienter dès le départ la vision du lecteur me paraît regrettable, c’est précisément ce qu’il critique avec tant de véhémence quant à la manipulation des jurés qu’il reproduit ici.







Pour le reste je suis parfaitement d’accord avec lui, des abus sont commis et doivent être relevés et dénoncés comme il le fait concrètement à travers divers exemples par la suite, mais à la lecture de ce paragraphe il en fait une telle généralité, surtout dans un avant-propos, cela donne bien évidemment un certain impact…







Son égocentrisme assumé m’a fait bien rire d’autant plus qu’il évoque les effets de manche qu’il ne produit pas évidemment…parce que ça n’impressionne plus les jurés… Pourtant dans la presse régionale on évoquait récemment l’affaire Clélia, les mots durs échangés entre l’avocat général Luc Frémiot et lui en 2011 et à nouveau en 2012. Pour ma part, c’est un spectacle absolument scandaleux, d'un côté comme de l'autre. Oui pour se faire entendre il faut parfois « crier » plus fort mais on n’est pas à la foire, ce ne sont pas des poissonniers à ce que je sache et la justice doit se faire dans un climat serein! La victime et même l'accusé méritent mieux tout de même.







Et puis j’ai particulièrement apprécié cette note finale d’un article de La Voix du Nord en date du 24/05/2012 relatant les paroles de Maître Dupond-Moretti à l’égard des jurés.



[Alors, sa colère retombe. Sa voix se fait solennelle. Chaude. Grave. « Si vous avez la certitude, la main à couper et la tête sur le billot que c’est lui, alors allez-y. Mais si vous avez un doute… » Il dit encore que « ce n’est pas déshonorant de dire que vous ne savez pas », se retourne vers le gamin de vingt-quatre ans qui est maintenant ratatiné dans le box et supplie… « Ne vous trompez pas. Surtout, ne vous trompez pas… »]







C’est son métier, c’est son gagne-pain après tout, un mélange habile d’intelligence, d’insolence, et de savante manipulation des mots et des acteurs du procès malgré ce qu’il peut en dire… La ruse verbale est édifiante.







«Acquittator» c’est bien une expression stupide comme il l’évoque, il n’en demeure pas moins qu’elle a le mérite de le mettre en valeur, peu peuvent se targuer d’avoir de si bons résultats, d’être autant adulés que détestés par ses confrères, par le monde judiciaire dans son ensemble, les médias et l’opinion publique. Un tel talent méritait bien un surnom hors du commun…



 



 



 

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Directs du droit

Directs du droit est un ouvrage concis, clair et à charge. Dupond- Moretti dénonce avec force illustrations l’affaiblissement continue des droits de La Défense.

La médiocrité s’installe chez les juges et les magistrats, une confusion entre le droit et les considérations morales s’est installée.

J’ai trouvé l’ensemble crédible et bien documenté.

Si La réforme de la justice semble de plus en plus nécessaire, le climat général autoritariste et liberticide ne paraît guère propice. En tout cas les solutions vers plus d’efficacité ne sont pas abordées, l’auteur ne fait pas mieux, il se contente des constats, brillamment certes mais qu’est qu’on fait ? . A de nombreuses reprises Dupond-Moretti insiste sur la place du hasard, de la faute à pas de chance, sur des lacunes essentielles au stade des enquêtes, qui peuvent tout à fait conduire à des erreurs judiciaires majeures qui même reconnues, ce qui est proprement scandaleux, ne donnent pas lieu à une juste indemnisation.

La dernière page lue, il m’apparaît que l’obsolescence de notre justice et notamment sa lenteur, son anachronisme, sa fiabilité très relative, que j’ai pu constater dans les domaines administratifs, ou celui des affaires familiales frapperait aussi le pénal et le civil.

Et de conclure comme Dupond-Moretti : j’ai peur. Pas mieux pour le moment... Effrayant...





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Directs du droit

Je ne vais pas être objective du tout : j’ai adoré cette lecture !

En même temps, comme on y parle (forcément) d’avocats, de magistrats, de procès,… je ne vois pas comment j’aurais pu ne pas apprécier.

Mais bien plus qu’un roman « pour juristes », Dupond-Moretti nous offre ici une réflexion sur la justice et sur les métiers judiciaires, en particulier sur l’interaction entre deux professions essentielles au système judiciaire : les avocats et les magistrats.

Tensions, rivalités, incompréhensions. C’est un peu ce qui caractérise les relations entre avocats et magistrats, en particulier lors d’un procès médiatisé. Pourtant, ces professionnels ont fait les mêmes études et ont sans doute, à un moment de celles-ci, partagé les mêmes idéaux. Mais, d’après l’auteur, les magistrats ont trop souvent tendance à voir les avocats (et en particulier les pénalistes) comme des fauteurs de trouble qui, en réclamant certains actes d’instruction ou autres, ne font que troubler une audience et retarder un verdict. Pourtant, comme le dit Dupond-Moretti, son rôle est bien de défendre, du mieux qu’il peut (= en utilisant la totalité des manœuvres qui lui sont offertes par le Code de procédure pénale) ses clients…

En lisant cet ouvrage, je me suis rendue compte d’une chose : même si la justice belge est « malade » (engorgement pathologique des tribunaux et retards conséquents dans le traitement des affaires, manque de personnel et de moyens financiers, palais de justice qui tombent en ruine – à Mons, un « filet » a été ajouté au-dessus de la salle des pas perdus, afin que les justiciables et avocats qui y déambulent ne se prennent pas des morceaux de la décoration du premier étage sur la tête), son mal-être n’est pas aussi grave que celui de la justice française. Les professionnels du droit, qu’ils soient magistrats, avocats, notaires ou huissiers, sont, pour l’immense majorité d’entre eux, courtois les uns avec les autres (c’est d’ailleurs une obligation déontologique entre avocats). Il n’y a pas autant de rivalité entre magistrats et avocats et, surtout, pas de connivence entre le parquet et le siège : chacun fait son boulot de façon indépendante, en respectant ses confrères/consœurs. La situation belge n’est donc pas si désespérée !

Dupond-Moretti fustige l’ENM (Ecole nationale de la magistrature) : d’après lui, si avocats et magistrats étaient formés ensemble et si les magistrats passaient par le barreau avant de devenir juges, ils comprendraient mieux le boulot d’avocat et verraient d’un meilleur œil ceux qui se présentent dans leur salle d’audience. J’ai tendance à lui donner raison car (même si je ne connais rien de l’ENM) en Belgique, de nombreux magistrats passent d’abord par le barreau avant de devenir magistrats (il faut d’ailleurs accumuler plusieurs années d’expérience professionnelle juridique et/ou de stage avant de pouvoir devenir magistrat) et mettent donc « la main à la pâte ».

Et même lorsqu’un magistrat ne passe pas par le barreau (on peut très bien, de nos jours, devenir magistrat après avoir été juriste d’entreprise, par exemple), il reste d’abord et avant tout juriste, comme l’avocat : les études de droit sont communes et nous n’avons pas, comme en France, d’ENM ou d’écoles d’avocats. Les deux professions requièrent la réussite de certains examens qui, eux, ne sont bien entendu pas communs, mais il n’en reste pas moins que la base est commune et que l’entente entre ces deux catégories de professions juridiques est bien plus cordiale que ce que dépeint Dupond-Moretti.

Bref, cet ouvrage me laisse très optimiste. Même si la justice belge n’est pas toujours idéale, elle fonctionne, dans l’ensemble, bien mieux que ce que le ténor du barreau français nous décrit ici. Et certains de nos magistrats, qui n’ont pas peur de se mouiller et de critiquer l’exécutif (comme Vincent Macq, Manuela Cadelli ou encore Luc Hénart) feront sûrement encore évoluer les choses…
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Directs du droit

Pour Eric Dupond-Moretti, avocat cogneur surnommé « acquittator » dans les prétoires, la justice va mal, et plus particulièrement la magistrature, à quelques exceptions près. Selon lui, les citoyens ne voient pas le danger qu'il y a à abandonner une once des libertés conquises de haute lutte au fil des siècles. A ce titre, l'avocat – qui se doit de défendre même l'indéfendable – agace. Et EDM refuse de devenir un être transparent. Il donne ici, dans ce bref ouvrage à l'écriture ciselée au scalpel, comme ses plaidoiries et les analyses précises des pièces des dossiers qui lui ont permis de gagner bien des procès sur des détails ignorés ou négligés, quelques exemples où la justice est mise à mal par ceux-là même qui devraient la servir.

Un réquisitoire, donc, et surtout une réflexion nécessaire sur l'évolution dangereuse de la procédure pénale, la place des victimes et leur réparation légitime – y compris celle des acquittés après une longue incarcération préventive – sur la médiatisation des procédures et le tout relatif secret de l'instruction.

Comment le citoyen, justiciable en puissance, peut-il comprendre des jugements totalement contradictoires en première instance puis en appel (cf: le procès intenté au maire de la Faute sur mer après le désastre de la tempête Xintia) ? Comment ne pas s'étonner devant la description détaillée des pratiques sexuelles licites – même si elles sont moralement regrettables – des protagonistes de l' « affaire » DSK au Carlton de Lille alors qu'au final, une relaxe a été prononcée ?

Les dommages collatéraux des personnes incriminées avant toute décision judiciaire sont dévastateurs. Malheur à celui qui se trouve confronté à la nécessité de témoigner : il sera mis à nu, examiné sous toutes les coutures par le seul fait d'avoir eu la malchance de croiser l'accusé.

Eric Dupont-Moretti souligne les faiblesses de la justice : les erreurs de procédure commises par certains juges, leur mode de sélection et d'avancement (un exemple : le troisième procès intenté à l'un des acquittés de l'affaire d'Outreau), le rôle de groupuscules d'activistes s'érigeant sur les réseaux sociaux en défenseurs de la morale bourgeoise, celui de pseudo psychologues ou de journalistes sonnant l'hallali sans connaître les dossiers, celui de lanceurs d'alertes autoproclamés (qu'on appelait autrefois « corbeaux »), la presse à sensation, la confusion entre ce que prescrit strictement la loi pénale et le sentiment partial de certains magistrats … sans parler du cas de ce chien auditionné par la justice ...

Un fameux coup de gueule, bien nécessaire ces jours-ci, justement !
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Bête noire

Peut-être un peu exagéré de parler de la "Bible pour jeune avocat", mais en tout cas, un condensé d'informations, d'anecdotes, et de points de vus personnels qui peuvent n'être qu'instructifs.

Me Dupont-Moretti a réussi, je pense, à s'adresser avec simplicité à n'importe qui, et à exposer sa réalité de la Justice, mais également à s'adresser aux "gens du métier" avec sincérité, vérité, et humilité.
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Bête noire

On a l'impression que ce livre est une transcription d'une longue interview de Dupond-Moretti.

Il y raconte essentiellement des événements, des anecdotes tirés de sa longue expérience. On y trouve de quoi confirmer, de son point de vue, que la justice pénale est un grand spectacle ou chaque acteur tente d'imposer son jeu et que le sort de l'accusé en dépend autant que le carrière des présidents, avocats généraux et avocats tout court.

Quelques moments émouvants au milieu de beaucoup de coups de gueule, c'est un peu brouillon et écrit dans un style parlé, mais comme ça se lit en 2h maximum, c'est distrayant comme une émission de télévision, même si on peut rester sur ça faim...
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Bête noire

Rapide à lire. Efficace. Ce livre nous plonge dans le monde judiciaire et policier à travers le regard d'un avocat d'expérience dont le point de vue est intéressant de connaître.
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Bête noire

Je me suis plongée dans cet ouvrage sceptique mais clairement "l'habit ne fait pas le moine". Dès les premières lignes, j'ai été happée par l'expérience d'Eric Dupond-Moretti.



Il m'a ouvert les yeux sur une réalité un peu trop discrète et avec Stephane Durand-Souffland ont su mettre des mots sur cette passion dévorante et souvent incomprise.



Je ne peux que le conseiller, non seulement, à tout étudiant en droit souhaitant exercer le métier d'avocat pénaliste mais également à tout ceux qui souhaitent en savoir plus sur ce milieu.
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