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Citations de Sylvie Brunet (19)


J’écris…
(d’Anna de Noailles)

J’écris pour que le jour où je ne serai plus
On sache comme l’air et le plaisir m’ont plu,
Et que mon livre porte à la foule future
Comme j’aimais la vie et l’heureuse Nature.
Attentive aux travaux des champs et des maisons,
J’ai marqué chaque jour la forme des saisons,
Parce que l’eau, la terre et la montante flamme
En nul endroit ne sont si belles qu’en mon âme !
J’ai dit ce que j’ai vu et ce que j’ai senti,
D’un cœur pour qui le vrai ne fut point trop hardi,
Et j’ai eu cette ardeur, par l’amour intimée,
Pour être, après la mort, parfois encore aimée,
Et qu’un jeune homme, alors, lisant ce que j’écris,
Sentant par moi son cœur ému, troublé, surpris,
Ayant tout oublié des épouses réelles,
M’accueille dans son âme et me préfère à elles…

(L’Ombre des jours, 1902)
p. 124
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Passionnément
Louise de Vilmorin

Je l’aime un peu, beaucoup, passionnément,
Un peu c’est rare et beaucoup tout le temps.
Passionnément est dans tout mouvement :
Il est caché sous cet : un peu, bien sage
Et dans : beaucoup il bat sous mon corsage.
Passionnément ne dort pas davantage
Que mon amour aux pieds de mon amant
Et que ma lèvre en baisant son visage.

(L'Alphabet des aveux, 1954)
p. 137
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Antoinette Deshoulières

LES MOUTONS -IDYLLE

Hélas ! petits moutons, que vous êtes heureux !
Vous paissez dans nos champs sans soucis, sans alarmes :
Aussitôt aimés qu’amoureux,
On ne vous force point à répandre des larmes ;
Vous ne formez jamais d’inutiles désirs.
Dans vos tranquilles cœurs l’amour suit la nature :
Sans ressentir ses maux, vous avez ses plaisirs.
L’ambition, l’honneur, l’intérêt, l’imposture,
Qui font tant de maux parmi nous,
Ne se rencontrent point chez vous.
Cependant nous avons la raison pour partage,
Et vous en ignorez l’usage.

(extrait, 1674)
p. 60
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Poème de Valérie Rouzeau
(p. 152)

Mon père mon père mon père en terre
au vent d'été au vent d'hiver.
Oh mon père terra terraqué je te
répète perroquet mon père mon père.
Au vent d'hiver au vent d'été en terre
entier au vent chanté.
Enfant dans les grands sapins verts
c'était toi qui sifflais soufflais enfant
dans les grands sapins blancs.
Mon père je te répète en l'air c'est une
fleur lancée assez haut.
Les deux pieds dans tes graviers clairs.
Les deux mains pour la fleur ou l'oiseau.

(Pas revoir, extrait, 1999)
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En danger de mots
(d’Andrée Chedid)

À quoi servent les mots
Face à celui qui meurt !
Ils apprivoisent l'abîme
Désamorcent les peurs
Ramifient la tendresse jusqu'au seuil de l'obscur
À quoi servent les mots
Face à celui qui vit !
Ils brisent ou bien apaisent
Incendient ou délivrent
Ils modèlent nos visages
Saccagent ou donnent ferment.

(Poèmes pour un texte, 1970-1991)
p. 140
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collier de jours identiques
matins d'espoir soirs de fatigue
jours gris comme perles de pluie
fil après fil
le temps de la guerre tresse sa corde

entre une ville et une autre ville
entre hier et demain
entre pouvoir et devoir
notre amour
vaillant
funambule au-dessus de l'abîme

Ella Yevtuchenko, femme poète ukrainienne, contemporaine.
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*****

AUX HOMMES

Fier d’une fausse liberté
Sexe, qui vous croyez le maître,
Soyez au moins, digne de l’être.
Justifiez votre fierté ;
Et puis, ce sera notre affaire,
Quand vous l’aurez bien mérité,
De vous surpasser pour vous plaire.
Pardonnez-moi cette candeur,
Qui peut vous paroître un outrage,
Mais qui convient à mon humeur.
Vive, indépendante & volage,
Ma plume obéit à mon cœur.
Disserter est votre partage :
Il est très noble assurément ;
Le nôtre, c’est l’amusement,
Qui, prouvant moins, vaut davantage.
A votre plus grave argument,
Nous répondons en nous jouant,
Avec un mot de persiflage.

EXTRAIT POEME FANNY DE BAUHARNAIS - 1776
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L’Offrande à la nature
Anna de Noailles

Nature au cœur profond sur qui les cieux reposent,
Nul n’aura comme moi si chaudement aimé
La lumière des jours et la douceur des choses,
L’eau luisante et la terre où la vie a germé.

La forêt, les étangs et les plaines fécondes
Ont plus touché mes yeux que les regards humains,
Je me suis appuyée à la beauté du monde
Et j’ai tenu l’odeur des saisons dans mes mains.

J’ai porté vos soleils ainsi qu’une couronne
Sur mon front plein d’orgueil et de simplicité,
Mes jeux ont égalé les travaux de l’automne
Et j’ai pleuré d’amour aux bras de vos étés.

Je suis venue à vous sans peur et sans prudence
Vous donnant ma raison pour le bien et le mal,
Ayant pour toute joie et toute connaissance
Votre âme impétueuse aux ruses d’animal.

Comme une fleur ouverte où logent des abeilles
Ma vie a répandu des parfums et des chants,
Et mon cœur matineux est comme une corbeille
Qui vous offre du lierre et des rameaux penchants.

Soumise ainsi que l’onde où l’arbre se reflète,
J’ai connu les désirs qui brûlent dans vos soirs
Et qui font naître au cœur des hommes et des bêtes
La belle impatience et le divin vouloir.

Je vous tiens toute vive entre mes bras, Nature.
Ah ! faut-il que mes yeux s’emplissent d’ombre un jour,
Et que j’aille au pays sans vent et sans verdure
Que ne visitent pas la lumière et l’amour…

(Le Cœur innombrable, 1901)
pp. 122-123
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Tant que mes yeux pourront larmes épandre
(de Louise Labé)

Tant que mes yeux pourront larmes épandre
A l'heur passé avec toi regretter,
Et qu'aux sanglots et soupirs résister
Pourra ma voix, et un peu faire entendre ;

Tant que ma main pourra les cordes tendre
Du mignard luth, pour tes grâces chanter ;
Tant que l'esprit se voudra contenter
De ne vouloir rien fors que toi comprendre,

Je ne souhaite encore point mourir.
Mais, quand mes yeux je sentirai tarir,
Ma voix cassée, et ma main impuissante,

Et mon esprit en ce mortel séjour
Ne pouvant plus montrer signe d'amante,
Prierai la mort noircir mon plus clair jour.

(Sonnets, XIV)
p. 38
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Au hasard des pages petite définition coquine :

- À la croisée du latin et du Marquis de Sade, on pourra aussi mentionner le godemiché, attesté depuis de XVIe siècle, d'abord sous la forme « godmicy » puis « godemichi », toutes deux à rattacher au latin « gaude mihi », forme d'impératif qui signifie « réjouis-moi ! ».
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N'a rien à voir, en revanche, avec l'idée d'un être fourbe, celui qui est fourbu. Car ce dernier a tout simplement trop bu, excès qui l'a épuisé ! L'adjectif serait, en effet, venu au XVIe siècle d'un verbe de l'ancien français, forboire, qui signifiait « boire excessivement, se fatiguer à trop boire », et se serait appliqué tout particulièrement, explique Littré, à « un cheval qu'on a fait boire trop tôt après avoir eu chaud », ce qui lui aurait provoqué une « fourbure », inflammation des tissus du pied.

« Mais si nous voulons y arriver, donnons quelque relâche à nos chevaux ; ils sont presque fourbus » (Dumas, Vingt ans après, 1845)
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Quand enfin votre esprit...
(d’Anna de Noailles)

Quand enfin votre esprit devient distrait et vague,
Après l'immense amour dont vous m'entreteniez,
Mon ardeur se défait et sur vous vient régner
Comme l'écume sur la vague.
Le jour d'été s'éteint dans l'espace endormi ;
Vous parlez d'une voix que j'entends à demi ;
Étant heureux et doux, vous me croyez contente.
Vous ne pouvez savoir quel infini me tente,
Ni quels divins secrets j'échange avec le soir.
Ma fraternelle main sur votre front s'allonge,
Vous contemplez mes yeux comme un calme miroir,
Et nous sommes baignés d'un vaporeux mensonge,
Vous étant confiant et moi celle qui songe...

(les Forces éternelles, 1920)
p. 125
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Windigophobie
Déf. Peur de devenir cannibale.
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Mes longs cheveux noirs
Mille de mes longs cheveux
Se sont emmêlés
Emmêlées sont mes pensées,
Tout emmêlées mes pensées

(Femme de vingt ans, Akiko Yosano)
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Je suis juive avec eux
Leurs souffrances
s'inscrivent dans mon sang
et coagulent
Sur le bord de ma fenêtre
leurs cendres se posent
aujourd'hui encore
Chaque nuit j'étouffe sous les tonnes
de leurs cheveux rasés
-
Je suis palestinienne avec eux
Leur douleur
s'est plantée dans ma poitrine
Dans mes artères
s'accumulent leurs pierres
autre mur
de lamentation

(Béni soit le serpent, Anise Koltz)
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Trois mots étranges

Quand je prononce le mot Avenir,
sa première syllabe appartient déjà au passé.
Quand je prononce le mot Silence,
je le détruis.
Quand je prononce le mot Rien,
Je crée une chose qui ne tiendrait dans aucun néant.

(Wislawa Szymborska)
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La cage
  
  
  
  
Dehors, du soleil.
Ce n’est qu’un soleil
mais les hommes le regardent
et ensuite ils chantent.

Je ne sais rien du soleil.
Je sais la mélodie de l’ange
et le sermon brûlant
du dernier vent.
Je sais crier jusqu’à l’aube
quand la mort se pose nue
sur mon ombre.

Je pleure sous mon nom.
J’agite des mouchoirs dans la nuit
et des bateaux assoiffés de réalité
dansent avec moi.
Je cache des clous
pour maltraiter mes rêves malades.

Dehors, du soleil.
Je m’habille de cendres.
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Non, la langue française n'est pas condamnée, elle va bien ,merci,et n'a nul besoin qu'on se lamente à son chevet , elle a beau essuyer des déferlements d'anglais , elle fait face grâce à des mécanismes vitaux sans cesse renouvelés qui lui permettent de s'accroître là où personne ne l'attend.
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Chanson - Antoinette Deshoulières (1638-1694)

Soyons toujours inexorable :
Un amant bien traité se rend insupportable ;
Il néglige l’objet dont son cœur est charmé ;
De tous les petits soins il devient incapable :
Un amant sûr d’être aimé
Cesse toujours d’être aimable.
Si l’amour est inévitable,
S’il faut pour un berger brûler d’un feu semblable
À celui dont son cœur nous paraît consumé,
Par de feintes rigueurs rendons-le misérable :
Un amant sûr d’être aimé
Cesse toujours d’être aimable.

(Poésie, 1688)
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