Sylvie Tellor

J’aime la mer, son bruit, son odeur. Si je pouvais, j’aimerais emmagasiner chaque sensation ressentie sur ces îles pour qu’elles m’apportent du réconfort lorsque bientôt, je serai de nouveau coincée dans le métro parisien.

Bien sûr, il ne faut jamais dire « Fontaine je ne boirai pas de ton eau » mais a priori, le mariage n’est pas fait pour moi. Ce n’est pas tant la vie à deux qui me pose problème, mais plutôt cette institution qui de mon point de vue n’est qu’une prison dorée. Sous prétexte qu’on aime quelqu’un, je ne vois pas pourquoi on aurait besoin de s’enchaîner à lui contractuellement. En fait, j’ai l’impression que les gens se marient uniquement par peur d’être seuls, comme s’ils se rassuraient en souscrivant à la garantie d’un avenir à deux.

Qu’on passe notre temps à fuir les stéréotypes, à se croire unique, alors qu’au final notre vie ne ressemble qu’à un énorme cliché !

Le temps des vacances est le temps de la déconnexion.

Grâce à la vie que j’ai menée avec mes parents, où il fallait sans cesse que je m’adapte à des cultures différentes d’un pays à un autre, j’ai acquis la conviction que ce sont les voyages qui forment la jeunesse plus que toute autre expérience. C’est une histoire de goût bien sûr, mais aussi de débrouillardise, d’ouverture et de rencontres. En voyage, libéré de toute question de paraître, on se sent plus libre d’être soi-même. Il se crée alors une sorte de proximité rapide entre les gens, un partage d’expériences où à force de discussions, on en apprend souvent autant sur soi que sur les autres.

On ne peut pas gagner à tous les coups. Mais comme je ne suis pas un saint pour autant, je vais te laisser. C’est un peu trop dur de contempler celle qu’on a perdu.

-       Ce genre de décision ne doit pas être facile à prendre.
-       C’est vrai. Mais le plus dur c’est de se décider, parce qu’une fois que la décision est prise, on se demande pourquoi on a attendu autant avant de franchir le pas.

On n’était plus sur la même longueur d’ondes tous les deux. J’ai fait abstraction un certain temps. Et puis, il est devenu évident que nos chemins devaient se séparer.

On se dit souvent qu’en Asie on ne va manger que du riz, du poulet et des crevettes. Ce qui n’est pas le cas. Et puis, « goûter » ce n’est pas que la nourriture. C’est aussi « goûter » au bien-être : les massages, les spas, la méditation… C’est très tendance là-bas.

Depuis quelques années déjà, je soupçonne l’anneau qui orne ma main gauche de freiner les ardeurs de bon nombre de dragueurs lourds, subtils, ou même charmants. Sans fausse modestie, j’ai toujours bénéficié d’un certain succès auprès de la gente masculine. J’irais même jusqu’à dire que mes traits fins et bien dessinés me place en toute objectivité dans la catégorie des jolies filles. De taille moyenne, ni trop enveloppée, ni trop mince, je peux me targuer d’avoir ce qu’il faut, là où il faut. Et ce, privilège absolu, sans prêter beaucoup d’attention aux calories que j’avale. Un peu de sport me suffit à entretenir mes courbes avantageuses. Aussi, je me surprends parfois à être déçue de ne plus voir mon charme aussi bien opérer que lorsque j’avais vingt ans et que je me dandinais dans mon 501 taille vingt-huit.

Les histoires de destin brisé, comme celle-là, par un réflexe que l'on a tous je crois, me rappellent combien la vie est précieuse. Il faut en profiter le mieux possible, la vivre à fond et ne gâcher aucun moment.

Tout le monde traverse des épreuves, affronte chaque jour des difficultés, qu’il surmonte plus ou moins valeureusement.

Je lui ai enfin exprimé – simplement – qu’il me manquait. Mais il ne m’a pas répondu, et c’est là la plus grande déception qu’il m’ait infligée à ce jour. Cet odieux silence radio dure depuis plus d’un mois. Chaque jour je lui en veux un peu plus, prenant sur moi de ne pas lui envoyer une flopée d’injures par messagerie interposée. Finalement avec le rendez-vous de ce soir, j’ai l’impression que je me fais quelque part à l’idée de ne plus vraiment attendre son retour.

J’aime bien Kate. C’est une fille gentille et nous avons de bons souvenirs ensemble. Elle n’a pas toujours eu la vie facile et je trouve qu’elle s’en sort bien aujourd’hui, mais je ne sais pas pourquoi, l’idée de la revoir à Paris me dérange. C’est irrationnel, comme si l’avoir retrouvée dans ce cimetière était un mauvais présage. Cela demande réflexion car à froid, je crains que la laisser s’immiscer dans ma vie ne sème plus de trouble qu’il y en a déjà.

Après une bouteille et demie de vin rouge, j’ai peut-être perdu de ma lucidité mais j’ai du mal à croire que l’on puisse préférer le confort d’une vie d’architecte à celui de simple décoratrice. Kate est fragile, sous traitement médicamenteux comme elle me l’a confié, les responsabilités l’effrayent probablement. Nous étions très différentes toutes les deux, il n’est pas étonnant que nous ne soyons pas restées proches après l’adolescence. Elle était rêveuse, provoquante, transgressive, quand j’étais studieuse, raisonnable et avide de confort. Avec dix, voire quinze ans de maturité supplémentaire, sommes-nous toujours aussi dissemblables ?

Je sais bien que ce n’est pas une maladie mais à trente-et-un ans, lorsque l’on est marié depuis quatre ans et qu’aucun enfant n’est venu « agrandir la famille », les questions se font de plus en plus pressantes et cela devient parfois dur à porter.

C’est douloureux de mettre fin (même sans heurts) à sept ans de relation. Échec cuisant, nous ne franchirons pas le fameux cap des sept ans ! Mais autre chose me blesse, quelque chose de plus difficile à identifier, de plus volatile…

Quand un couple ne fonctionne plus, les deux partenaires portent toujours leur part de responsabilité, mais dans notre cas je suis clairement plus responsable que Thomas. C’est moi qui ai cessé de l’aimer en premier.

On ne sait pas toujours. C’est souvent un mystère. La grossesse n’était pas viable. Vous savez, environ une grossesse sur quatre se termine par une fausse-couche.
Oui, mais en général cela arrive avant trois mois si j’avais bien suivi ce que l’on m’avait expliqué en début de grossesse.

Thomas avait du mal à comprendre. La seule chose qu’il voyait lui, c’est que notre enfant ne naîtrait pas cinq mois plus tard comme prévu.
Quant au « Pourquoi ? », je n’ai eu aucune réponse claire. « Cela arrive parfois, sans que l’on sache exactement pourquoi. Il faudra faire analyser le fœtus », m’avait répondu la gynéco. « Cela arrive parfois… » Cela me faisait une belle jambe ! Avec tous les progrès de la science, je m’indigne qu’au vingt-et-unième siècle les médecins soient incapables de fournir une explication lorsqu’une grossesse s’arrête. Cela ne semble pas beaucoup leur importer. Leur credo c’est de nous ressasser que si ça s’est arrêté c’est pour une bonne raison, parce qu’il y avait une anomalie quelque part.