- Bordel !!! Mais c’est une vraie Calamité !
Je lui lance un regard ulcéré. D’accord ! Comme première rencontre, on a vu mieux. Mais un peu de compassion, est-ce trop demander ? ! Heureusement, je me sens déjà mieux, et du coup, Monsieur commence à me porter sérieusement sur les nerfs… et pas qu’un peu !
- - La poupée Barbie vous conseille d’aller changer de costume ! Et pourquoi pas d’endosser celui de Ken à la place de celui de CONNARD ARROGANT DE PREMIERE !
Tu as manqué de la chose la plus importante au monde. Elle t'a privée de l'amour que toute mère devrait porter à son enfant. Le silence d'une mère peut faire aussi mal que des coups. Tout autant que son rejet et son indifférence. Il n'y a pas toujours besoin de frapper pour faire souffrir...
Je craque complètement pour elle. Elle a le don de faire fleurir quelque chose au plus profond de cet abîme de cendres qu'est mon cœur, au plus profond de mois... quelque chose de beau... de précieux...
Elle est un cadeau. Elle a le pouvoir de m'apaiser, de chasser mes démons.
Soudain, les paroles de Lancaster se mettent à tourbillonner dans ma tête :
Tu as toujours eu le choix ! Si tu n'es pas capable de l'assumer, n'en rejette pas la faute sur les autres, et encore moins sur moi.

-S'il te plait, Angeline, dis quelque chose! Tu commences à me faire peur, là...
-Mmmm... Marquise, cinquante ou ovni? Balbutié-je, les yeux toujours clos.
(...)
-MARQUISE, CINQUANTE OU OVNI?!
L'un des deux hommes demande à quoi l'on joue... sa voix... ai-je déjà entendu cette voix? L'avocat me somme sur un ton néanmoins assez doux, d'ouvrir les yeux. Ordre auquel je refuse obstinément de me plier. Une idée saugrenue traverse mon esprit. La panique que je ressens est induites par ce que je vais découvrir. SI j'étais aveugle, ce serait plus facile... Je délire complètement, mais peut-être qu'avec des lunettes aux verres très, très, très foncés...
-Cinquante! lance soudain Justine.
-Cinquante?
Si elle dit "cinquante", je n'ai peut-être plus besoin de lunettes, alors? Plus du tout, même!
-Marquise aussi... Continue-t-elle
-MARQUISE?! Comment ça marquise?! Dans quel sens le "MARQUISE"?!
Mon estomac vient de faire un double salto. Je tente d'imaginer un "cinquante" avec une marquise, et franchement, je n'y arrive pas. Pas du tout!
-NOM D'UN CHIEN! Jure subitement une voix grave et sèche qui me donne la chair de poule. Vous vous foutez de moi ou quoi?!
-CROSSFIRE!! hurlons-nous simultanément devant ce ton autoritaire en songeant à monsieur Noir Danger et avant d'exploser de rire.

Ici, il y a une règle tacite : celle du meilleur ! Si vous y êtes nés, si vous y vivez, c'est que vous êtes l'élite ! Et l'élite ne désire que le meilleur. En tout ! Écoles, boutiques, restaurants, boîtes, stations de ski, bijoux, voitures, appartements, résidences secondaires... animal de compagnie... physique... amies...
Insidieusement, au fil des jours, des années, on ne remarque plus... les autres, ceux qui n'ont pas la chance de faire partie de l'élite. On les croise, on peut même leur parler parfois, par nécessité, mais on ne les voit pas...
Parce que nous sommes les meilleurs ! N'est-ce pas ?
Aujourd'hui, je les vois, tous les autres... comme tous ceux du Bar des Potes, Eric, Céline, Tony, Karine, Sandrine, qui m'ont aidée, chacun à leur façon, en m'offrant un travail, une écoute, un sourire sincère, leur amitié... et eux aussi, ils m'ont vue.
Ce sont eux les meilleurs ! Ceux qui n'ont pas besoin que je porte le dernier sac à la mode pour me saluer, ceux qui n'ont pas besoin que j'habite dans le XVIe pour me parler, ceux qui n'ont pas besoin que mon compte en banque soit bien garni pour m'apprécier...
Je me souviens d'une réponse qu'il m'avait donnée, il y a quelques années, quand je lui avais demandé pourquoi il n'avait jamais refait sa vie :
— L'amour exige des sacrifices, mon ange. Toujours...
Je ne m'étais pas rendu compte de la véracité de ses paroles à ce moment-là. Aujourd'hui, je comprends. Oui, l'amour exige des sacrifices. Toujours.
Et quand ses lèvres se posent sur les miennes, j'oublie tout.
L'univers entier disparaît... la réalité, l'irréel...
La vengeance est un plat qui se mange froid…
Lancaster ne semble pas d’accord avec ce vieil adage tandis qu’il me porte dans ses bras jusqu’au bureau. Mes jambes m’ayant soudainement lâchée. Malheureusement, je suis toujours consciente, dans l’incapacité de formuler une phrase correcte, mon estomac brassant son contenu à une vitesse d’un mixer en folie, mon coeur battant à cent à l’heure… mais toujours consciente.
- Barbie, est-ce que ça va ?
Incapable de démêler les multiples pensées qui tourbillonnent dans ma tête et forment un chaos indescriptible ! J’ai un poids énorme qui m’écrase la poitrine au ton… affectueux de sa voix. Je lève les yeux vers lui. Ses yeux bleus et la beauté sombre de son visage font bondir mon coeur.
— Ne vous inquiétez pas, Christian, dis-je en tentant de positionner PussyCat sur mon épaule et de tenir la pancarte. Je vais m'en sortir...
— Je n'ai pas de doute à ce sujet, lance-t-il en m'aidant malgré tout, et me désignant la pancarte. Simplement, je ne voudrais pas que vous soyez importunée.
Je relis le message inscrit en lettres roses sur fond blanc :
BARBIE & PUSSYCAT
RECHERCHENT DÉSESPÉRÉMENT UN
CONNARD ARROGANT DE PREMIÈRE !
— Oui, vous avez peut-être raison, Christian, acquiescé-je avec un grand sourire. Qui sait combien de connards arrogants de première on peut trouver ici ?!