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Citations de Thierry Clermont (33)


"Le monde comme il va n’a absolument aucun sens du rythme. Voilà.

Un jour ou l’autre, il faudra bien se rapprocher des siècles voisins.

Fuir vers les ailleurs et les autrefois.

(...)
Faire d’un songe une pantomime ou une certitude.

Toute promesse n’est qu’une vengeance du temps contre lui-même.

Trop d’images, et pas suffisamment de visages.

Je suis la moitié de ma féerie.

(...)
14 heures, quai du Louvre, près du Pont-Neuf : sous un soleil timide, envolées de pollen depuis les platanes, en flocons tourbillonneux. La jeune fille rousse qui tente de les saisir.

Je suis vraiment désolé. Même d’autrui.
Mon écriture est respiratoire. Tout est à dire pour prendre haleine.

Tout se passe comme si la prise de risque abolissait le hasard."
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C'etait plus fort que lui : Chateaubriand ne pouvait séjourner dans une ville ou un village sans en visiter Ie cimetière. Les Mémoires d'outre-tombe en temoignent, avec prés de quatre-vingts occurrences.

Durant son exil anglais, il passe par celui de Harrow et s'assoit au pied de l'orme que lord Byron chérissait. A Londres, il logeait dans un galetas dont la lucame donnait sur un cimetière (« Chaque nuit la crécelle du watchman m’annonçait que l'on venait de voler des cadavres »). On Ie retrouve ensuite parmi les tombes à Constantinople, Tunis, Bologne, Luceme, Waldmunchen.. .

Est-ce la disparition prématurée de Lucile, un jour de brumaire, qui l'a conduit vers cette passion morbide ? « Ma soeur fut enterrée parmi les pauvres : dans quel cimetiere fut-elle déposée ? dans quel flot immobile d'un océan de morts fut-elle engloutie ? dans quelle maison expira-t-elle au sortir de la communauté des Dames de Saint-MicheI ? »
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Louis Aragon a bien failli mourir à Venise, quelques semaines avant la rencontre décisive avec Elsa Triolet.

Au cours de l'été 1928, le dandy communiste et surréaliste s'installe dans un hôtel de la Riva dei Schiavoni aux côtés de sa maîtresse Nancy Cunard. Le couple est mal assorti, mais romanesque en diable.

Fantasque, inconséquente, capricieuse, Nancy est la richissime héritière de la compagnie maritime Cunard. La belle Anglaise a alors 32 ans ; Louis va sur sa trente et unième année. Nancy collectionne de gros bracelets d'ivoire, dont elle couvre ses avant-bras, s'affiche avec ses amants ou amis prestigieux (Ezra Pound, Tristan Tzara, Cummings...), affectionne les peaux de léopard, écrit des poèmes. Le photographe Man Ray a immortalisé cette jeune muse aux cheveux courts et aux longs yeux turquoise.
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Je songe à la confession de Chateaubriand, écrite lors de son deuxième et avant-demier séjour à Venise, à la fin de l'été 1833 ; il est alors âgé de 65 ans : « J'ai visité un beau cimetière : je n'oublie jamais les morts ; c'est notre famille. »

L'auteur de la Vie de Rancé avait un temps envisagé d'achever ses Mémoires d'outre-tombe au monastère de San Michèle, dans une cellule, loin du monde...
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Un livre m'attendait aussi, récemment traduit en français : le Journal d'exil du Hongrois Sândor Mârai. Dans les années 1950, il s'était installé à New York et avait fait quelques séjours dans les Hamptons et à Montauk, en compagnie de sa femme Lola et de son fils Jânos. Sans doute est-il l'écrivain étranger qui a le mieux parlé de ce bout du monde, de cette porte insulaire de l'Amérique ; c'était durant l'été 1955 : « La mer est écumante, impatiente, dure. Impossible de se baigner ou de nager, mais, en restant assis dans l'eau sur le bord, on se rafraîchit. Un petit bois proche du rivage, avec les senteurs particulières, douces-amères, du maquis, les parfums acres des pommes de pin et des plantes de bord de mer, un lac parsemé de lotus."
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Va au diable avec ta culture et tes citations à tout bout de champ.

Tu n’es qu’un lécheur de virgules.
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Nelson Algren s'était installé à Sag Habor quelques mois auparavant, dans une petite maison en bardeaux blancs, dans Glover Street, une artère calme, à quelques centaines de mètres de la librairie et de la Whaler's Church. Son salon était tapissé de lettres de Simone, de coupures de presse, de photos de Proust, Abraham Lincoln, Dickens, de dessins d'enfants, de jaquettes jaunies de ses livres, de pochettes de disques, de portraits de lui en uniforme de l’US Army, flâneur dans les rues de Chicago. Et, disposées ici et là, depuis l’entrée, des statuettes précolombiennes, des couvertures guatémaltèques et des tissus mexicains.

À soixante-douze ans, pensait-il encore à Beauvoir, qui fut sa plus belle histoire d'amour - sans issue ? Pensait-il à leur rencontre dans son fief de Chicago en 1947, puis leur simulacre de lune de miel dans son cottage en bordure du lac Michigan, trois ans avant le succès international de L’Homme au bras d'or ? Aux séjours du couple improbable et condamné, ensuite au Mexique et au Gwtemala, à Paris, en Italie du Sud, à Djerba, à Fez, à Marrakech, alors que Sartre s'était follement épris d’une New-Yorkaise d'origine italo-éthiopienne, Dolorès Vanetti, rencontrée à Manhattan en 1945 et qui le suivra à Cuba et au Mexique.

(…)

Dans Les Mandarins, récompensé par le prix Concourt en 1954, et dédié à Nelson Algren, Beauvoir avait librement romancé les premiers feux de cette liaison, dont elle n'avait rien caché à Sartre, qui y apparaît sous les traits de Robert Dubreuilh, alors que le personnage de Lewis Brogan est largement inspiré de Nelson Algren, sa « subversive bête de mon cœur », comme elle le dira plus tard, qu'elle a décrit ainsi, dans une lettre à Sartre : « C'est l'Américain typique, au visage de bois, au corps sans expression. » II l'avait demandée en mariage : elle a refusé net. Algren ignorait l'accord conclu entre les deux écrivains français : pas de vie commune, pas d'enfants, et pas de mariage.
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Kathryn Szokâ me l'a appris : à vingt ans à peine, Herman Melville avait tenté, en compagnie de son frère aîné Gansevoort, de s'engager à bord d'un baleinier ayant jeté l'ancre près de Sag Harbor, sans succès, avant de se rabattre quelques semaines plus tard sur un navire marchand, le St. Lawrence, sur lequel il embarque comme novice, cap sur Liverpool.

Elle saisit un exemplaire de Moby Dick, débordant de marque-pages colorés, le feuillette et me conseille : « Relisez le chapitre XIII, il y évoque cette première tentative d'expérience maritime à Sag Harbor, à travers le personnage du harponneur venu des mers du Sud, Queequeg, le grand ami d'Ismaël, et ce, de façon à peine détournée. »
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- Pourquoi les gens ont-ils ri lors de mon discours ? Ça n'avait rien de comique... Déjà les effets de l'alcool ? Pour une fois que je m'étais appliqué, préparé...

Ils ne se sont pas moqués de toi, directement en tout cas. De toute façon, presque personne n’a compris ton anglais. Et puis les invités attendaient les toasts avec impatience. Ils ont plutôt réagi à ma traduction de ton texte en russe.

C'est-à-dire ? Je ne comprends pas.

- Disons que j'ai pris quelques libertés avec la traduction...

- À savoir ?

- Il y avait une de tes phrases qui sonnait un peu ridicule, emphatique, tout à la fin. Je l'ai donc changée, sans ta permission, et à tes dépens.

- Continue...

- Je cite de mémoire, ça a donné, en russe : « Je vous aime bien, moi le Frenchy, tous ici présents, surtout la petite blonde fofolle qui est à mes côtés... Mais je commence vraiment à m emmerder ici. J'ai l'impresslon d'être à Moscou. Quand est-ce qu on boit un coup ? »
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« Savez-vous, jeune homme, qu'à chaque moment du jour, à chaque situation, correspond un passage de la Bible ? Immanquablement. Je la connais par cœur. »

Je lui ai demandé quel extrait correspondrait à notre dialogue imprévu, sur la côte nord de Long Island, à bientôt 5 heures du matin.

Sans hésiter, il m'a répondu : « Veilleur, où en est la nuit ? C'est dans le livre prophétique d'Ésaïe, chapitre 21. »
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Cela revient à ma mémoire : il n'avait lu en tout et pour tout qu'un seul livre, probablement vers l'âge de vingt ans, ce dont il se vantait : Cellule 2455. Couloir de la mort, de Caryl Chessman. Pas même Jules Verne, Alexandre Dumas ou un San-Antonio.
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Il y a cinq ou six ans de cela, en fouillant dans les boîtes d'un bouquiniste des quais de Seine, je m’étais promis d'acheter, les yeux fermés, le dixième et le vingtième livre que je toucherais. C'étaient respectivement un guide débroché des arbres de France, et Mort aux femmes nues ! d'une certaine Gypsy Rose Lee, dont je n'avaîs Jamais entendu parler. Le titre apparaissait en lettres noires sur fond jaune, rehaussé par le dessin d'un masque de carnaval traversé par une plume, dans la collection « Les reines du crime », recherchée par les amateurs de romans de gare, terme ayant aujourd'hui disparu, tout comme leurs lecteurs, dissous par le TGV et les écrans de téléphone. La mention du copyright indiquait The G-String Murders, © Simon & Schuster, 1941.

Par le plus curieux des hasards, Gypsy venait ainsi de rejoindre ma coterie de personnages oubliés, après avoir été flamboyants jusqu'au dernier souffle. On pouvait donc rebattre les cartes et remonter le cours du temps, en sautant par-dessus les siècles.
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Quand Federico García Lorca débarque de l’Olympic armé par la White Star Line Ie 26 juin 1929 à New York, pour un sejour de six mois, iI est déjà un poète reconnu, et attendu sur place par la communauté artistique espagnole, venue saluer l'auteur du Romancero gitano, où íl chante avec ardeur les amours charnelles, la lune et la nuit tremblante, les roses et les jacinthes, le couteau des Gitans, et l'ermitage de San Miguel á Grenade.

(…)

Federico Garcia Lorca écrit, fébrile, tendu et inspiré par la ville électrique et sans sommeil, cette monstrueuse merveille aux beautés imprévisibles, celle qui excite le « cheval bleu de sa folie », selon son expression. Il compose, plutôt, jouant sur les tonalltés, du majeur au mineur, avec pour basse continue la rumeur, celle qui s'échappe de Wall Street, des usines de Brooklyn, des quais du métro aérien, du blues des rues, de la mêlée humaine, des rondes d'enfants dans Central Park, des faubourgs populeux du Queens, celle qui traverse les troncs d'arbres, les cages d'ascenseur et la « terrible multitude » ou encore des théâtres de la 42e Rue et des bars clandestins. Et pour finir, le chambard qui a suivi le premier krach boursier de l'Histoire, le 24 octobre 1929, dit le Jeudi noir.

Du cri à la lamentation, de l'épique à la confession, c'est une trentaine de poèmes que Lorca a réunis dans son recueil Poeta en Nueva York. complété par une ode musicale aux Noirs de Cuba, où il se rendra quelques mois plus tard. Des vers qui filent en méandres et en arabesques, de Battery Park au pont de Brooklyn, célébré dans un Nocturne, en passant par Chinatown, le sommet du Chrysler Building et la fête perpétuelle de Coney Island, qu'il visite au début de l'été, avec, dit-il, « ce regard qui tremble nu dans l'alcool », alors qu'il surprend une femme obèse vomissant sur le sable.
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- Arrête un peu, avec tes citations, tes références... Faut toujours que tu parles en empruntant les mots des autres. Tu joues à cache-cache avec toi-même ? Avec ta tronche de party pooper.

- C'est-à-dire party pooper ?

- Pisse-froid, casse-joie, si tu préfères. C'est le mec qui gâche la fête à lui tout seul.

- Je suis comme ça, et je ne changerai pas. En quel honneur ? Pour te faire plaisir ? Je suis aussi ce que je lis, ce que j'ai lu, dans les grandes voix d'hier, celles des revenants qui m'accompagnent et me soutiennent.
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J'aimerais aussi qu'on parle du discours de mariage. Tu y as pensé ? On dit une « épitralâme », n'est-ce pas ?

- Un épithalame... C'est à la fois un honneur pour moi et aussi une contrainte. Que veux-tu que je raconte ? Que je célèbre l'union de deux êtres ? Que je fasse ton éloge ? Que l'on parle de nous deux aussi ?

- Un peu de tout ça. Je te fais confiance. N'hésite pas à faire mon portrait avec plein d'éloges. Et gloire à l'amour !
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Arrête un peu, avec tes citations, tes références. Faut toujours que tu parles en empruntant les mots des autres. Tu joues à cache-cache avec toi même ? (p59)
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"Bretagne. Le temps y est plus présent qu'ailleurs, grâce à la pierre, à l'eau, au ciel. Temps plus magique qu'historique. On peut donc lui résister." Georges Perros.
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-Nous sommes frères, il y a des choses qu’on peut se dire, ça restera entre toi et moi.
-Demi-frères…
-C’est du pareil au même. Les demi-destins, ça n’existe pas.
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C’est la sobre beauté des rivages de celle qu’on appelle la Gold Coast. Tout y était endormi, rythmé par les cliquetis inharmoniques des drisses de quelques voiliers amarrée. Que le vent soit doux, que l’onde soit tranquille, et que chaque élément réponde à nos désirs. Comme un air d’opéra.
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C’est l’envers de New York City, c’est même l’anti-Manhattan. Ici, pas d’extravagance éphémère, de démesure, de foule pressée ou de représentants de l’avant-garde, d’incessante frénésie des hommes, des machines et des modes. Les paysages naturels ont peu changé, même la mémoire des lieux est restée intacte, et rien ne vient gratter le ciel ou prétendre le concurrencer.
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