En toute chose, la panique est bien la pire des conseillères.
Pour un premier roman, c'est bien vu. J'ai failli, je l'avoue avoir eu envie de décrocher au milieu du roman car beaucoup de longueurs, mais finalement je ne regrette pas d'avoir tenu bon et de fermer la dernière page. C'est un roman historique mais fantastique.
Ce n'est pas la faim qui le transforma, lui, mais la lâcheté. La lâcheté... Elle se cachait en lui depuis sa naissance peut-être. Et pourtant, elle était restée tapie dans l'ombre, attendant que vînt son heure. Les jeunes gens sont ainsi: ils se pensent héros indomptables et, bien souvent, ils ne sont que des pleutres qui s'ignorent. Certains ont au moins la chance de ne pas avoir à mettre leur courage à l'épreuve et bénéficient de l'infinie bénédiction d'ignorer à vie leur couardise.
Hans se contorsionnait comme un serpent décapité. Il rampait, douloureusement, avançant pouce par pouce le long du noyer dont le tronc paraissait immense. Il souffrait et il désespérait tandis que l'objectif, à la fois si près et si loin, se rapprochait si lentement. Son bras finit enfin par passer la frontière invisible, plongea dans la neige et atteignit la terre gelée. Il tira ensuite de toutes les maigres forces qui lui restaient, tandis que la conscience le quittait. Il répéta l'opération, comme autant d'efforts homériques. Lorsqu'il expira pour la dernière fois, tout son corps se trouvait au-delà de la ligne des noyers : il avait quitté le royaume du mal. Non loin de lui, le journal de Ludwig s'était ouvert sur une page qu'il avait annotée quelques jours plus tôt à Vilna :
"L'homme croit que son ombre lui appartient. Il pense aussi à tort qu'il est celui qui, au travers de ses gestes, la dirige. S'il savait à quel point il se trompe ! C'est notre ombre qui nous mène en influençant nos humeurs et nos émotions. C'est elle aussi qui nous pousse au péché et qui, comme le dit si bien le Pater Noster, nous soumet à la tentation. Celui qui observe assez longtemps son ombre ne pourra que se rendre compte qu'elle agit selon ses propres nécessités. Car les ombres sont des enfants qui ne peuvent se cacher trop longtemps sans éprouver le besoin de s'amuser. Elles finissent toujours par dévoiler à l'observateur attentif l'horreur de leur véritable nature".