J’ai appris que c’est ta maladie émotionnelle et non une puissance externe qui t’opprime à toute heure de la journée, même si aucune pression extérieure ne s’exerce contre toi. Tu te serais depuis longtemps débarrassé des tyrans si tu étais toi-même animé d’une vie interne en bonne santé. Tes oppresseurs se recrutent dans tes propres rangs, alors qu’ils provenaient naguère des couches supérieures de la société. Ils sont même plus petits que toi, petit homme. Car il faut une bonne dose de bassesse pour connaître d’expérience ta misère et pour s’en servir ensuite pour mieux t’exploiter et mieux t’opprimer.
"Eloignons-nous de l'animal, éloignons-nous de la sexualité !" Voilà la devise de toutes les formations d'idéologies humaines. Peu importe le travesti choisi par telle ou telle idéologie : ainsi le fasciste parlera du "surhomme authentique", le communiste de l'"honneur de la classe prolétarienne", le chrétien de la "nature spirituelle et morale de l'homme", le libéral des "valeurs humaines supérieures". Au fond de tout cela, on entend toujours la même chanson monotone : "Je ne suis pas un animal".
Tu tiens tout entre tes mains, ta vie, celle de tes enfants, ton marteau et ton stéthoscope. Tu hausses les épaules et tu me prends pour un utopiste, peut-être pour un « rouge ». Tu me demandes quand ta vie sera agréable et sûre, petit homme. Voici ma réponse : Ta vie sera agréable et sûre lorsque la vie comptera plus à tes yuex que la sécurité, l'amour plus que l'argent, ta liberté plus que la « ligne du parti » ou l'opinion publique ; lorsque l'atmosphère de Beethoven ou de Bach sera l'atmosphère de ta vie...
J’ai découvert que ton esprit est une fonction de ton énergie vitale, en d’autres termes qu’il y a unité entre le corps et l’âme. Je me suis rué dans cette brèche, et j’ai pu montrer que tu projettes ton énergie vitale quand tu te sens bien et quand tu aimes, que tu la rétractes vers le centre de ton corps quand tu as peur.
Si, petit homme, tu as de la profondeur en toi, mais tu l’ignores. Tu as une peur mortelle de ta profondeur, c’est pourquoi tu ne la sens ni ne la vois. C’est pourquoi tu es pris de vertige et tu chancelles comme au bord d’un abîme, quand tu aperçois ta propre profondeur. Tu as peur de tomber et de perdre ainsi ton « individualité » si jamais tu obéis aux pulsions de la nature. Quand, avec la meilleure bonne foi, tu tentes de parvenir à toi-même, tu ne trouves jamais que le petit homme cruel, envieux, goulu, voleur. Si tu n’étais pas profond dans ta profondeur, je n’aurais pas rédigé ce texte. Je connais ta profondeur, je l’ai découverte quand tu venais me voir pour confier au médecin tes misères. C’est cette profondeur en toi qui est ton avenir.
La 'démocratie sociale' de Lénine devait substituer à la dictature étatique du prolétariat l'autogouvernement effectif et pratique des masses laborieuses. (...) En réalité, nous avons affaire à la dictature de la bureaucratie du Parti sur les masses sous les apparences d'une démocratie parlementaire.
Il ne faut jamais perdre de vue qu'Hitler a toujours fait appel - et avec succès - au ressentiment des masses contre la pseudo-démocratie et le système parlementaire. L'"alliance entre le marxisme et le libéralisme bourgeois-parlementaire" utilisée comme slogan efficace par le fascisme n'a certainement pas manqué d'impressionner les foules après les manoeuvres des communistes russes !
Vers 1935, les espoirs que les foules mondiales avaient mis dans l'Union Soviétique s'évanouissaient peu à peu.
L'idéologie mondiale de l'âme et de la pureté est l'idéologie mondiale de l'asexualité, de la pureté sexuelle, ou, pour appeler les choses par leur nom, une forme de refoulement sexuel et d'angoisse sexuelle, émanations d'une société patriarcale autoritaire.
La psychanalyse d'individus de tous les âges, de tous les pays et de toutes les couches sociales montre que la conjoncture des structures socio-économiques et sexuelle de la société ainsi que sa reproduction structurelle s'opèrent au cours des quatre ou cinq premières années de la vie par les soins de la famille autoritaire. L'Eglise ne fait ensuite que perpétuer cette fonction. Ainsi l'Etat autoritaire trouve un intérêt majeur dans la famille autoritaire : elle est la fabrique où s'élaborent sa structure et son idéologie.
La structuration autoritaire de l'homme se produit - ce qu'il s'agit de ne jamais perdre de vue - en premier lieu par l'ancrage d'inhibitions et d'angoisses sexuelles dans la matière vivante des pulsions sexuelles.
Le travail révolutionnaire de masse en Allemagne s'est limité presque exclusivement à la propagande "contre la faim". Argument sans doute important, qui ne fournissait pourtant pas une base suffisante, comme la suite des évènements allait le montrer. La vie des individus nivelés dans la foule se déroule sous la surface visible des choses, dans mille petit riens. Ainsi le jeune travailleur est harassé, dès qu'il a calmé tant soit peu sa faim, par mille soucis d'ordre sexuel et culturel. La lutte contre la faim est certainement une lutte primordiale, mais il faut aussi placer brutalement et totalement dans les feux de la rampe les petits évènements de la comédie humaine, dans laquelle nous sommes tous à la fois spectateurs et acteurs.
C'est la structure autoritaire, anti-libérale et anxieuse des hommes qui a permis à sa propagande d'accrocher les masses. C'est la raison pour laquelle l'importance sociologique d'Hitler ne réside pas dans sa personnalité mais dans ce que les masses ont fait de lui. Cet aspect du problème est d'autant plus piquant qu'Hitler méprisait du fond de l'âme les masses à l'aide desquelles il comptait imposer son impérialisme. Un seul aveu particulièrement franc en vaut d'autres : "la mentalité du peuple n'a jamais été que l'expression de ce qu'on fait avaler à l'opinion publique..." (op. cit..p140).