Yu Li

Avoir trois dixièmes de balourdise, et un brin de stupidité; être un peu dur d'oreille, et muet par moments, tout cela, c'est le fonds d'une longue vie: telle est la formule magique de l'harmonie de l'âme.

Le riz est comme une barque dont le potage serait l'eau : la barque sur le rivage, sans eau ne peut voguer, le riz dans le gosier, sans bouillon ne peut passer

Le lecteur doit savoir que le commerce des sexes obéit aux mêmes lois que la conduite des armées : il est essentiel de connaître son adversaire pour pouvoir s'adapter à lui.

- regarder ou écouter tomber la pluie
- lire "un poème d'hiver pour avoir frais l'été"
- inspecter ses arbres fruitiers ou soigner ses rosiers
- jouer avec le chat ou faire jouer celui du voisin
- humer une glycine à en avoir le tournis
- partir à bicyclette au hasard de petites routes inconnues
- attendre avec une douce impatience un rendez-vous avec sa bien-aimée
- puis partager avec elle une coupe de capiteux vin d'Espagne
- suivre de la rive les prises de bec intestines entre canards et poules d'eau
- ajuster à la perfection tenons et mortaises pour un petit banc de bois
- préparer le thé avec une méticulosité maniaque et ironique
- lire distraitement et en désordre plusieurs livres à la fois
- rêver les détails d'un voyage dont on sait fort bien qu'on ne le fera pas
- savourer en plein été l'odeur humide de la cave
- se coller en plein hiver au poêle et regarder longuement dans le vide
- faire une partie de go avec un ami
- aller voir où en sont les prunes sauvages cette année
- installer une vasque pour la bain des moineaux
- photographier une toiles d'araignée, ce chef d'oeuvre
- se gaver de raisins jusqu'au mal de ventre
- classer indolemment sa bibliothèque et entr'ouvrir d'anciens volumes qu'on refeme précipitamment...

Au comble de la prospérité vint inévitablement le déclin, c'est le principe constant de la plénitude et du vide ; toutes richesses, dignités, gloires et splendeurs, d'un coup de pied seront réduites à néant, tel est le sort de l'éclat vernal du magnolia et des fleurs automnales du cannelier

Pour freiner la licence des moeurs ,s'appuyer sur la leçon des faits;
Pour discourir sur le sexe ,partir du désir sexuel.

Le poème, en vers irréguliers,dit : 《 Cheveu noir ne peut se conserver;les roses ont tôt fait de se fâner ,destinée d'homme n'égale pas le pin toujours vert.Le renom est voué à s'éteindre,l'intérêt est sans lendemain.Le vent a regret des fleurs tombées; celui qui tue un jeune homme n 'en éprouve point de joie. La vieillesse nous chasse du jardin des plaisirs ,tandis que le jeune seigneur,ivre de chants, goûte au poison délicieux du premier amour.( Deuxième strophe)Précaires sont les joies de ce monde; rester chez soi ne vaut pas chercher occasion de gloire.Au plaisir succède le chagrin ; sachons goûter ,aurore après aurore ,les délices du sommeil après le festin nocturne. Craignons d'être éveillés en sursaut par la cloche matinale! Ouvrons plutôt les yeux sur une peinture exaltant la puissance d'Eros: là se trouve la demeure de l'éternel printemps. 》(Page 25).

si les hommes sont capables de se détacher des graisses animales pour se nourrir de légumes et de fougères en les trouvant délectables, le jardin de leur estomac ne sera plus piétiné par le mouton

L'union des sexes, répliqua Yuxiang, n'est pas chose si morale que tu dis. Sinon, pourquoi les anciens qui ont fondé et établi toutes choses, n'ont-ils pas ordonné de la faire au grand jour, au vu et au su de tous ? Pourquoi ont-ils prescrit de la faire quand l'obscurité de la nuit qui enveloppe tout, aveugle tout le monde, et pour ainsi dire à la façon des voleurs ?

On peut voir par là qu'il n'est pas un homme qui ne puisse accéder à l'éveil.Mais parce qu'ils sont ligotés par les désirs profanes ,avant tout les richesse et le sexe,les hommes ne sont pas capables de se tirer du fleuve de l'égarement pour aborder à l'autre rive .C'est la raison pour laquelle ,dans le paradis,l'espace est vaste et les hommes rares,tandis qu'en enfer ,les hommes sont entassés et l'espace étroit. Le seigneur du ciel est éternellement désoeuvré,tandis que l'empereur d'en-bas ne sait où donner de la tête. Les grands ancêtres qui ont créé le monde en ont un peu trop fait; Ils n'auraient pas dû inventer les femmes ,ni donner à l'argent le statut qu'il a parmi les hommes,car ce sont ces deux choses ,qui les asservissent.Deux sentences ,tirées des quatre livres,les ont depuis longtemps décrétés coupables:
《 Celui qui le premier a fait des idoles
En vérité, n'est-il autre que le saint à l'origine!》.(Page 273).

Au surplus, les vierges, comme femmes, sont dénuées d'intérêt ; elles ne connaissent rien à rien et n'ont aucune expérience. On ne peut trouver aucun plaisir à avoir commerce avec elles. Pour les choses sérieuses, le mieux est de s'adresser à des femmes ayant entre vingt et trente ans. Il en va de même pour les plaisirs des sens que pour l'écriture et la composition littéraires : une riche nature ne dispense pas de la pratique, et un débutant inexpérimenté ne produit rien qui vaille.

Elle alla à pas de loup dans la cuisine,fit du feu,versa quelques gourdes d'eau dans la marmite, et alluma une poignée de brindilles sèches pour faire chauffer l'eau..Ensuite ,prenant une bougie ,elle entra dans la chambre,ecarta les rideaux,et rabattit la couette,en disant d'une voix forte et sévère : 《 Quel est ce débauché qui en pleine nuit s'introduit au foyer d'un autre pour coucher avec des femmes ! Comment pouvez-vous vous justifier?Levez -vous bien vite,er expliquez-vous!》
Ainsi éveillé en sursaut de ses rêves, Weiyangsheng pensa aussitôt que le mari s'était caché dans la maison et qu'il avait attendu que sa femme dorme dans les bras du séducteur pour mieux faire chanter ce dernier.Claquant des dents de frayeur,il leva la tête : c'était la femme même qu'il avait vue dans la journée, et avec qui il venait de coucher ! N'en croyant pas ses yeux,il baissa la tête et regarda celle qui se trouvait dans le lit.Alors seulement il s'aperçut de son épouvantable laideur: un visage noir comme suie et marqué de la variole ; des cheveux courts et jaunâtre ; un teint comparable à un jambon encore revêtu de sa couenne. Surpris et décontenancé ,il dit : "《 Mais,qui es-tu?》(Page 136/ 137).