Nathan est une maison d`édition française créée en 1881 par Fernand Cahen à la fin du XIXe siècle. Elle est spécialisée dans l`enseignement primaire et la production de matériels éducatifs pour les jeunes enfants. Sur de nombreux supports, papier et numérique, Nathan propose chaque année plus de 1200 nouveautés. Au total, 25 millions d’ouvrages et de jeux Nathan sont diffusés en France et à l’étranger chaque année.
Georges Orwell, de son vrai nom Éric Arthur Blair, est né en 1903 en Inde, alors colonie britannique, et rejoint tôt l’Angleterre pour y continuer ses études. Il a été essayiste, romancier et journaliste, et s’est montré très engagé dans plusieurs combats durant toute sa vie.
Il s’oppose très jeune à l’impérialisme, notamment après sa propre expérience en Birmanie, du côté des oppresseurs. Il s’est aussi fermement opposé aux dictatures totalitaristes, en URSS et en Allemagne nazie, et ce même à une époque où les Anglais étaient encore alliés des Russes et ne critiquaient donc pas le stalinisme.
C’est en 1945 qu’est publiée La Ferme des Animaux, une dystopie sous forme de fable. Ce roman, divisé en 10 chapitres, raconte la prise de contrôle de leur ferme par les animaux qui y vivent, et qui décident de vivre en autarcie. Au fur et à mesure de l’histoire, le pacifisme tout d’abord prôné par les animaux se transforme en un régime de plus en plus dur, où les idées de paix disparaissent les unes après les autres. Les cochons prennent de plus en plus le pouvoir, et les 7 Commandements qui dictaient la conduite initiale de la ferme se transforment finalement en un seul ‘’Tous les animaux sont égaux mais certains animaux sont plus égaux que d’autres. ‘’
Ce livre est ouvertement une critique du régime de l’URSS, et surtout de l’époque stalinienne, mais également de toutes les dictatures. Avec une plume très cynique, Orwell décrit la fatalité des révolutions qui se soulèvent contre un oppresseur, avant d’en placer un autre au pouvoir. Il met en lumière les dangers de la censure, de l’idéologie unique, et de l’endoctrinement du peuple, ainsi que de l’aveuglement dont sont capables les masses populaires.
Cette fable politique qui met en scène des animaux peut rappeler les nombreuses fables de La Fontaine, qui dénonçaient elles aussi les failles et injustices de la société de son époque, bien que La Ferme des animaux soit plus sombre, et vise de manière bien plus claire en régime en particulier.
En effet, c’est tout d’abord au régime communiste de l’URSS que Orwell s’attaque. Les humains représentent le régime des tsars et des aristocrates, et les animaux le prolétariat exploité. Un vieux cochon faisant part de ses pensées révolutionnaires et de son idéal de justice social aux autres animaux représente Marx, un des fondateurs de la pensée communiste. Les deux autres principaux cochons sont Boule-De-Neige, qui représente Trotski, et Napoléon, reflet animal de Staline.
Les autres animaux incarnent de divers rôles, comme le cheval Hercule, soldat déterminé et qui croit aveuglément en son chef, sans jamais remettre en compte ses convictions. La fin funeste qu’il connaît est représentative du sort de bien des soviétiques sous le régime stalinien. En effet, il est vendu à un équarisseur, blessé après avoir travaillé sans relâche. Les moutons illustrent avec cynisme les masses populaires, incapables de penser par elles-mêmes et répétant uniquement les slogans du régime, sans chercher d’autres réponses.
Le nom même de la ferme peut être comparé avec celui de l’URSS : les deux prônent un objectif social et égalitaire, sonnant la fin de l’oppression, mais finalement, les faits restent les mêmes : l’URSS/Ferme des Animaux est tout aussi élitiste et autoritaire que le Tsarat de Russie/Ferme du Manoir.
Néanmoins, cantonner cette fable à une caricature de l’URSS serait passer à côté de l’aspect beaucoup plus universel du roman. En effet, la justice sociale prônée après la Révolution Russe n’a pas existé, et en 1945, les idéalistes ont vite déchantés, et c’est une critique plus globale des dérives totalitaristes que Orwell nous offre.
Tout d’abord, il dénonce la censure, et les restrictions du vocabulaire qui avortent tout soulèvement dans l’œuf. Ce thème, qu’il traite aussi dans 1984 de manière plus ciblée et précise, est omniprésent. Avec les 7 Commandements changés selon la volonté du Chef, ou les chants révolutionnaires détournés de leur idée originelle, Orwell dénonce le danger de se plier à un vocabulaire bien précis. Sans savoir exprimer ses idées, comment penser par soi-même ? La vieille jument le montre bien : elle devient sceptique des tournures que prennent le pouvoir des cochons, mais incapable de formuler ses pensées, elle se plie aux ordres des tyrans.
Ce contrôle du langage leur permet de s’éloigner des idéaux humanistes de la Révolution, mais c’est la terreur qui assure aussi la continuité du régime. A l’image des Jeunesses Hitlériennes, ou des Komsomols, son équivalent soviétique, le cochon-dictateur s’entoure de gardes, dressés depuis leur enfance dans l’idéologie totalitariste, et n’ayant pas pour autre fonction que la servitude au chef. Ces chiens obéissants et terrifiants représentent l’embrigadement des jeunes gens, voir des enfants, plus facilement malléables que les adultes. Ils sont pour Napoléon les garants de sa puissance, et éliminent sans aucun état-d ’âme ses ennemis politiques, ou tous ceux qui peuvent potentiellement s’opposer à lui.
Le cochon Napoléon est aussi une figure constante des régimes totalitaires. Son nom révèle déjà le caractère de chef charismatique, autoritaire et tout-puissant, sujet d’un culte de la personnalité. En effet, ses louanges sont chantées, de plus en plus fantasques et éloignées de la réalité. Le chef qui possède tous les pouvoirs, qui concentrent tous les privilèges est décrit comme désintéressé et altruiste, prêt à s’oublier pour le bien-être de la population. Sa nombreuse progéniture est protégée, isolée du reste de la ferme, et tout ce beau monde finit par former une dynastie.
Tout au long du roman, les dérives du pouvoir s’enchaînent, jusqu’à la chute : à l’apogée de la tyrannie, les cochons finissent par se métamorphoser en leurs ennemis absolus : les humains. Mais ces oppresseurs n’étaient pas seulement leurs soi-disant ennemis, ils servaient aussi à justifier la pauvreté des animaux, qui n’avaient jamais vu leurs doses de nourriture et de temps libre augmenter.
Orwell se montre dans ce roman très pessimiste par rapport aux capacités des hommes à construire un régime juste, avec cette fable politique qui finit sur l’esclavagisme des animaux de la ferme, aux profits des pourceaux qui possèdent tous les vices humains, vices d’abord prohibés par les 7 Commandements. C’est ainsi que finit ce roman, triste caricature d’une réalité politique encore présente autour du globe, qui à partir d’une utopie se transforme en dystopie. Par sa finesse et son aspect simple et frappant, ce petit guide du despotisme progressif trouvera un public très important, notamment dans des pays avec des régimes élitistes et indifférents au sort du peuple, qui se succèdent sans jamais régler les problèmes.
Malgré son caractère pessimiste et un petit peu sinistre, l’écho qu’il offre aux sociétés actuelles en quête de sens peut donner de l’espoir quant à la construction de modèles sociétaux plus démocratiques, qui sauront ne pas reproduire des erreurs passées.
Commenter  J’apprécie         00
J'ai dû lire cet ouvrage pour mes cours de français. On ne peut pas dire que ce soit le livre qui m'est procuré le plus de coups de cœur mais il apporte beaucoup à la culture générale. De plus les pièces de Molière sont des grands classiques à ne pas manquer.
Commenter  J’apprécie         00