N'en croyez pas les fous
N'en croyez ni les autres, ni moi; n'écoutez que votre avantage.
Quand le roi Marsile vous fait savoir
Qu'il est prêt à devenir, mains jointes, votre vassal,
A tenir toute l'Espagne de votre main
Et à recevoir notre foi.
Celui qui vous conseille de rejeter de telles offres
Ne se soucie guère de quelle mort nous mourrons.
Conseil d'orgueil ne doit pas l'emporter plus longtemps.
Laissons les fous et tenons-nous aux sages.
Oui, la France a eu un moment de merveilleuse poésie. Il commença avec le premier jour du XIe siècle. L'aurore qui se leva sur la funèbre nuit qui avait clos l'an 1000 jeta moins de clarté dans l'espace que d'allégresse dans les âmes. On avait cru que le soir du monde était venu et que l'obscurité se fermait pour jamais. . Et voici qu'après les noires heures passées avec crainte et tremblement , la barre d'or apparaissait là-bas et que la lueur inespérée montait dans le ciel. Quelle aube fut jamais saluée comme celle-là ? Ce fut une explosion de joie et de reconnaissance. Un soupir de délivrance passa sur la terre comme un vent puissant et les hosanna éclatèrent comme une tempête.
C'étaient des poètes, ces gens qui, agenouillés dans le crépuscule des nefs et sous la forêt des piliers, rêvaient les yeux levés vers les rosaces éblouissantes, inondées d'un riche et mystique éclat, comme vers des fenêtres ouvertes sur le paradis. C'étaient des poètes, ces gens qui, épris d'un invincible amour pour les lieux où avait souffert leur Sauveur, s'en allaient au hasard par les monts, les fleuves, les plaines traversées de cavaliers étranges et faisaient jusqu'à Jérusalem une grand'route d'ossements. La Croisade est avec la Révolution le plus grand mouvement idéaliste du monde moderne, et toutes deux sont françaises.