Là même d'où il était parti, là même l'homme retombait, dégringolant et roulant.
Son épaule gauche rendit le même craquement qu'une paire de bâtonnets de bois blanc qu'on achève de séparer. Pourtant, il n'en ressentait nulle douleur. La blessure que le sable venait de lui infliger pour le punir de s'être accroché à lui, le sable même, on eût dit, la voulait panser et calmer : doucement, du pan de la falaise, du sable très fin se mit à couler, à murmure monotone... à couler, un moment... petite, toute petite blessure, au reste, sans importance en vérité.
Son visage s’était raidi, comme enduit d’empois ; son souffle, on eût dit, était un vent de vingt mètres à la seconde ; sa salive avait pris le goût du sucre brûlé. Impitoyablement, ses forces s’en allaient. Il venait de perdre encore en sueur l’équivalent d’un grand verre d’eau.
La femme n’était pas moins touchée. Gardant le visage baissé, elle se redressa, très lentement, et sa tête, imprégnée de sable, arrivait juste à la hauteur de ses yeux à lui. Nerveusement, elle se moucha avec les doigts, puis, faute de papier, prit une poignée de sable pour se frotter les mains ; dans le mouvement qui la penchait en avant, son pantalon lui glissa des reins.
L’air gêné, l’homme avait d’abord détourné les yeux. Au vrai, cependant, n’était-ce chez lui que de la gêne ? A la pointe de la langue, il sentait s’attarder, bien différente de celle que lui donnait la soif, une étrange excitation.
Car, du travail qu'il fait de ses mains, vient à l'homme comme un appui, un secours dans sa lutte contre la fuite du temps: cette fuite qui, privée de tout sens et de toute fin, pèse insupportablement sur qui refuse l'action...
L'homme était comme cire dans la flamme : la sueur lui suintait, il fondait. Par tous les pores de la peau, la sueur lui perlait.
Le temps qui passe passe passe passe ......
le temps qui s'insinue en vous........
un livre superbe _ un film a voir
si vous avez le temps
"Maison déjà à demi-morte, se dit-il ; maison saisie par les tentacules du sable qui sans fin continue de couler ; maison aux viscères à demi-déchirés par la morsure du sable... Du sable, de ce rien qui n'a, pour l'ordinaire, qu'un huitième de millimètre, et qui , hors son grain élémentaire, ne possède même pas de forme propre... De ce rien qui s'appelle sable, de ce sans-corps et dont pourtant le pouvoir destructeur est tel que rien n'est capable de lui faire front, rien au monde... A moins que... quisait ?... de ne pas avoir de forme ne soit précisément ici le privilège, l'expression la plus haute de la Force en soi !..."