Citations sur Enfant, je me souviens... (41)
Je fus cerné par l'odeur de renfermé, de la poussière, et de celles de ces milliers de livres, parfums de colle, de couverture moisie, de toiles imprégnées de pollens anciens, de fumées oubliées, tachées de doigts sales, fouettées par un million de respirations aux haleines multiples, les arômes si reconnaissables de cette pièce.
Ravalant ma gêne, je pris une inspiration aussi profonde que possible et m'avançai timidement sur l'épais tapis. Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi je me sentais si mal chaque fois que je venais entre ces murs, sinon que le poids de toute cette connaissance m'impressionnait énormément. Chaque page était un peu du savoir d'un être, un peu de ses sentiments, de sa création. De sa vie. Beaucoup étaient morts, mais leurs mots survivaient ici, tel le prolongement de leur âme éternelle. C'était comme de marcher sous mille regards plus brillants que je ne l'étais, j'avais presque peur qu'ils se penchent tous sur moi et finissent par tomber et m'ensevelir sous des tonnes de livres poussiéreux.
Mon grand-père était de ces amoureux du livre qui veulent partager leur passion. Il en offrait à tout le monde, tout le temps ; c'était un vieux monsieur pensif, que d'aucuns qualifieraient même d'"éteint", mais lorsqu'il vous parlait d'un roman, ce n'était pas une lumière qui s'allumait brusquement dans son regard mais tout un lustre, et il soliloquait jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne dans la pièce pour l'écouter, alors il retournait à ses précieuses pages.
Mon grand-père était donc une sorte de fantôme, n'apparaissant que pour transmettre ses messages, s'étiolant ensuite pour redevenir cette présence éthérée propre aux lecteurs absorbés.
Mon grand-père était un homme étrange. Un être aux mille vies, au moins. Mais la principale, celle qu'il menait dans leur vaste manoir perdu au bout d'une route isolée, celle dans laquelle il était l'époux de la mère de mon père, celle où il avait une enveloppe charnelle sustenter et quelques vagues devoirs à accomplir régulièrement, celle-là, bien qu'essentielle, semblait être celle qu'il l'intéressait le moins. Mon grand-père préférait de loin toutes les existences fantasmées qu'il endossait par le prisme des livres qu'il engloutissait aussi souvent que possible. Certaines personnes vivent pour donner un sens à ce qu'ils sont, à leur éphémère trajectoire, lui, ne respirait que pour être quelqu'un d'autre.
C'était un lecteur, pas même un critique, il ne pouvait froisser personne sinon quelques pages par jour. (Maxime Chattam)
Car mon grand-père était de ces amoureux du livre qui veulent partager leur passion. Il en offrait à tout le monde, tout le temps ; c'était un vieux monsieur pensif, que d'aucuns qualifieraient même d' "éteint", mais lorsqu'il vous parlait d'un roman, ce n'était pas une lumière qui s'allumait brusquement dans son regard mais tout un lustre, et il soliloquait jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne dans la pièce pour l'écouter, alors il retournait à ses précieuses pages. (Maxime Chattam)
Mon grand-père préférait de loin toutes les existences fantasmées qu'il endossait par le prisme des livres qu'il engloutissait aussi souvent que possible. ( Maxime Chattam)
"Les souvenirs sont indispensables parce qu'ils sont constitutifs de notre identité" - Françoise Dolto
"Les livres sont des îlots de douceur, de connaissance et d'émotions dans lesquels elle peut abreuver sa soif d'un ailleurs meilleur" - Agnès Abecassis
Quelques heures plus tard, je me lève enfin et vais déposer un bisou sur le front de mes filles bien trop grandes pour être qualifiées de bébés, mais bien trop aimées pour cesser de l'être.
Dans la famille, mes oncles et tantes le surnommaient « Bartleby » et j’avoue que pendant des années je n’ai pas bien compris pourquoi, sinon qu’il s’agissait d’un clin d’oeil à un livre qu’ils avaient tous lu sur ses conseils. Car mon grand-père était de ces amoureux du livre qui veulent partager leur passion. Il en offrait à tout le monde, tout le temps ; c’était un vieux monsieur pensif, que d’aucuns qualifieraient même d' »éteint », mais lorsqu’il vous parlait d’un roman, ce n’était pas une lumière qui s’allumait brusquement dans son regard mais tout un lustre, et il soliloquait jusqu’à ce qu’il n’y ait plus personne dans la pièce pour l’écouter, alors il retournait à ses précieuses pages.