Maria Grazia et Raffaella sont des jeunes filles de classe populaire qui ont à coeur de passer un été agréable, entre petit boulot, épisodes familiaux et sorties entre copines. Chacune a ses rêves, ses doutes, ses désirs. Mais toutes deux vont tomber sur la route d'une bande de quatre garçons. Pas n'importe lesquels : des garçons de bonne famille, des beaux quartiers, charmants, aisés. Elles, qui ne pensaient pas pouvoir être remarquées parmi le flot des jolies filles, se retrouvent propulsées au sein de ce groupe avenant, à dîner avec eux, à boire, à s'amuser, le temps de quelques soirées enchantées.
Jusqu'au soir où tout dérape. Enfin, est-ce un dérapage si tout a été planifié ?
J'ai eu un sentiment d'impuissance à cette lecture. Ce qui est un peu idiot, on ne peut jamais changer le cours d'une histoire qui ne nous appartient pas, et pourtant. J'anticipais de tourner la prochaine page, d'y découvrir le résultat final de cette rencontre.
Pierre Adrian fait progressivement monter une tension, si ténue d'abord qu'elle nous serait imperceptible si on ne connaissait pas l'issue de ce fait divers. On s'attache à ces filles, elles nous parlent, nous sont touchantes, mais on sent derrière les paroles des garçons des failles. Des failles qui se révèlent grâce à l'alternance des points de vue, et là, ça devient plus terrible encore : on y découvre leur semblant de plan, la banalité de leur quotidien doré, leurs pensées vis-à-vis de ces filles rencontrées au début de l'été, et surtout, leur absence complète de remords, de doutes. Ils veulent, ils prennent. Quelle importance si on parle de personnes ? Ces filles ne sont rien à leurs yeux.
Pourtant, l'auteur ne tombe jamais dans le piège de les décrire comme des monstres, ce sont bien des garçons, des bons garçons dirait leur entourage, et cette horreur subtile est terrifiante, car c'est celle qu'on peut retrouver à tout coin de rue et même chez nous. C'est celle dont on ne se méfie que trop tard.
Pour conclure, c'est un livre que je conseille vivement. Ce fait « divers », connu sous le nom de Massacre de Circeo – l'endroit où la sorcière Circé aurait supposément transformé des hommes en cochons – a soulevé d'importants débats à l'époque. Les gens n'imaginaient pas que des garçons d'une classe sociale aussi aisée puissent être capable de commettre des crimes dont on attribuait souvent les méfaits aux classes populaires. Et l'atmosphère de l'Italie de cette époque est très justement retranscrite, la plume est directe, fluide, les propos, subtils. Bref, pour ma part, petit coup de coeur à déclarer.