– Ouais ! fit Riton Godot après un long silence. Je me demande si...?
Il laissa sa phrase en suspens. Un vrai truc de gros-bras, histoire de sentir ses hommes bien en main. D'ordinaire il y avait toujours quelqu'un dans le personnel qui faisait un effort et essayait de formuler la pensée du patron.
Mais ni Fred, ni Jo n'avaient l'air disposés au coup de brosse à reluire. Etaient-ils salariés, ou faisaient-ils de la prestation de services ? C'était difficile à déterminer.
Ce qu'il y avait de certain, c'est qu'ils savouraient béatement l'anisette glacée et s'écartaient doucement le col de la chemisette pour laisser douillettement pénétrer l'air frais du ventilateur dans leur pilosité pectorale.
Juillet à Paris, un jour de canicule.
Riton Godot soupira. Il suait. Son bureau était pourtant climatisé, mais il y suait toujours, été comme hiver. C'était une petite misère à laquelle il n'attachait plus aucune espèce d'importance : quand il cesserait de suer, il cesserait de vivre.
– Qu'est-ce que vous en pensez, les gars ? interrogea-t-il. Vous croyez à la possibilité d'un arbitrage ?
Cette fois, la question était directe, il fallait bien répondre. Fred, le petit recuit de soleil à moustache effilée, avala une gorgée de boisson bien louchie.
– Vous savez, dit-il, nous, on n'est pas tellement des spécialistes de l'arbitrage !
– Ça, c'est vrai ! fit Jo en secouant sa petite face rougie de blondin rentrant de vacances.