Le troisième roman de
Jean-Baptiste Andréa et le premier que je lis. C'est une belle découverte : un ouvrage touchant écrit avec sensibilité sur fond de musique classique.
Qui joue aussi divinement les sonates de Beethoven sur un piano public dans les gares ou les aéroports ? C'est Joseph, un vieux pianiste, dont les doigts courent sur le clavier avec agilité et sensibilité. Il séduit les oreilles de nombreux mélomanes de passage, refuse les propositions de contrat et ne demande aucun argent. Il joue pour le plaisir mais ne serait-ce pas un appel ? N'attendrait-il pas quelqu'un ?
Il faut remonter cinquante ans en arrière pour en apprendre un peu plus sur Joseph. C'est son histoire que
Jean-Baptiste Andrea nous conte dans ce roman émouvant. La vie heureuse et confortable du jeune homme s'arrête en mai 1969 lorsque ses parents et sa petite soeur périssent, devant ses yeux, dans un accident d'avion consécutif à un atterrissage raté à l'aéroport du Bourget.
« La mort de mes parents m'apprit une chose : je n'avais personne d'autre au monde. Ma mère était fille unique. Et si mon père était à moitié juif, sa famille l'avait été largement assez pour les braves fonctionnaires de Vichy»
Triste conséquence, Joseph est envoyé dans un orphelinat situé aux confins des Pyrénées, pas loin de la frontière espagnole…
« Je partis pour un lieu dont vous n'avez jamais entendu parler, puisqu'il n'est pas sur Terre. Je partis pour un lieu dont vous n'entendrez jamais parler. Il est fermé depuis longtemps.
L'orphelinat Les Confins. Je dis fermé, mais chez certains, il saigne encore. »
Cet établissement était géré par des religieux qui menaient la vie dure aux orphelins avec des méthodes archaïques et autoritaires. Discipline, punitions disproportionnées, humiliations, brimades, corvées, maltraitances, nourriture et enseignement insuffisants… tel était le sinistre quotidien des enfants recueillis aux Confins. Heureusement dans cet univers cruel un petit groupe va réussir à se ménager un certain espace de liberté par la création d'une sorte de société secrète « la Vigie » qui se réunit régulièrement dans un lieu tenu secret. On y discute, on joue aux cartes, on écoute une radio bricolée, on rêve et on échafaude des projets insensés… Un semblant d'amitié, de fraternité et d'espérance pour ces jeunes à l'enfance abimée.
C'est avec plaisir que j'ai lu ce roman et découvert le talent de conteur de
Jean-Baptiste Andréa, dont l'écriture est alerte, claire et sensible. Il sait émouvoir le lecteur, le faire sourire aussi tout en le tenant en haleine par les péripéties de ses jeunes héros. Je me suis laissée bercer par la sublime musique de Beethoven et réveiller par celle des Rolling Stones. "Sympathy for the Devil"... un sacrilège dans un orphelinat religieux !