Kate Daniels, tome 4.5 : Magic Dreams

Les papillons étaient petits, fins et très sensibles à la magie. Pour une quelconque raison, je les faisais se sentir en sécurité et ils gravitaient autour de moi comme des pellicules de fer avec un aimant. Ils ruinaient mon image de dure à cuir, mais il fallait être un monstre pour frapper des papillons.

Curran médita sur sa bière.
- Je n'aurai jamais pensé à utiliser ce mot pour décrire le problème du gamin.
- Et comment le décrirais-tu?
- Jeune, con, et les couilles pleines.
- Tu as raté ta vocation, tu aurais dû faire poète.

— As-tu déjà remarqué que lorsque Kate devient stressée, les téléphones cessent de fonctionner ?
— On ne peut pas compter sur les téléphones, c’est la règle, dit Jim.
Je secouai la tête.
— Non, c’est Kate. Elle génère tant de magie qu’elle court-circuite la technologie si elle ne fait pas attention. Je fais la même chose, sauf que je me contrôle mieux. Elle ne peut pas tirer avec un flingue, d’ailleurs. Je l’ai regardé s’entraîner et soit ça part en vrille, soit ça ne part pas du tout. Et elle ne s’en rend pas compte. Observe là de tempe en temps, elle arrive en piétinant, agrippe le téléphone, pousse un grognement et s’en va. Dix minutes plus tard, tu peux commander de la bouffe sur ce même téléphone. C’est la chose la plus drôle qui soit.

- Est-ce que je dormais ?
- Oui.
- Putain.
Il se releva tout à coup, ses yeux sombres en colère.
- Tu étais partie. Dali Harimau, où étais-tu ?
Je me redressai et croisai les bras sur ma poitrine. Il n’y en avait pas tant que ça alors croiser les bras par-dessus était facile.
- J’étais sortie. Tu n’es pas mon père, Jim. Je n’ai pas besoin de voir avec toi à chaque que je quitte ma maison.
Une lueur verte traversa ses yeux.
- Dali, où étais-tu ?
Il venait de faire le coup de l’alpha. On n’argumentait pas quand ses yeux étincelaient.
- Je faisais la course sur Buzzard. Voilà. Content, là ?
- Bien, fit-il en expirant.
Bien ? Depuis quand faire la course était bien ?
- Tu n’es pas très clair.
- Tu n’as pas vérifié tes messages ?
- Non, je viens juste de rentrer.

Très bien. Je suivis l’odeur, avançant sur la pointe des pieds. Salon, couloir, sale de bain, chambre. L’odeur s’intensifia ici. Il était dans ma chambre.
Oh mon dieu. Et si je rentrais et qu’il était nu sur le lit ?
Je péterai un câble. Je péterai un câble de suite et ne m’en remettrai jamais.
Reprends-toi, reprends-toi, reprends-toi. Je me dirigeai droit vers la chambre.
Jim était affalé au sol contre le mur. Ses yeux étaient fermés. Il portait un jean noir et un col roulé noir, quelques nuances plus sombres que sa peau. Ses cheveux noirs étaient coupés courts. Sa veste en cuir reposait en boule sur le sol. Endormi.
Je pénétrai délicatement à l’intérieur de la pièce et m’agenouillai à côté de lui.
Il avait l’air si paisible. En temps normal, Jim faisait les gros yeux, juste pour rappeler aux gens qu’il était Sérieux et Important et qu’il vous Botterait Le Cul si Nécessaire. Mais sur l’instant, avec sa tête penchée en arrière et son visage détendu, il était magnifique. Je voulais m’assoir au sol à ses côtés et me pelotonner sous son bras. Ça avait l’air du parfait endroit pour moi. Au lieu de ça, je soupirai et touchai son front avec mon doigt.
- Hey, toi. Réveille-toi.
Il ne bougea pas.
Etrange. Jim se réveillait si une épingle à nourrice tombait par terre dans un rayon d’un kilomètre. La plupart des métamorphes le faisait, mais Jim plus particulièrement. Il supervisait la sécurité de la Meute et faisait preuve de tendances paranoïaques. La seule fois où il s’évanouirait ainsi serait lorsqu’il est blessé ou exténué d’avoir muter trop de fois, et que le Lyc-V aurait mis ses fonctions cérébrales en veille pour qu’il conserve ses ressources et régénère.
Je ne sentais pas d’odeur de sang et ses vêtements étaient toujours sur lui. S’il s’était évanoui après avoir muté, il serait sur mon sol…nu. Je fermai les yeux et me secouai mentalement.
Quelque chose n’allait pas.
J’attrapai son épaule et le secouai.
- Jim ! Réveille-toi. Réveille-toi.

- C’est ton deuxième accident en trois semaines.
- Haha.
- Est-ce que Jim ne t’as pas interdit de faire la course ?
Jim était mon alpha. La Meute des métamorphes était séparée en sept clans, par famille d’animal, et Jim dirigeait les félins d’une grosse patte de Jaguar cachant des griffes impressionnantes. Il était intelligent, fort, et extrêmement sexy – et les seules fois où Jim remarquait mon existence, étaient quand je jouais les chieuses ou lorsqu’il avait besoin d’un expert dans l’ancien Far Est. Sinon, je pouvais tout autant être invisible.
Je relevai la tête pour montrer à Kasen que j’étais sérieuse.
- Jim n’est pas mon boss.
- En fait, si, il l’est.
C’était une bonne chose que je ne sois pas une porc-épic-garou, ou sa bouche serait pleine de piquants.

Le couché de soleil se retourna et reprit sa place légitime avec un tremblement. Les pneus de Rambo touchèrent le pavé et rebondirent une fois. Le verre gauche de mes lunettes sortit de sa monture et retomba sur mes cuisses.
Je le balayai hors de mon jean, serrai les paupières, et descendis hors de la voiture.
- Je me suis retournée !
- Tu t’es retournée.
Putain de merde ! L’avant de Rambo avait l’air d’une canette de coca écrasée. De l’eau trempait l’asphalte, s’échappant du capot – le réservoir d’eau enchantée qui permettait à la voiture de rouler durant les vagues magiques s’était rompu. J’avais du prendre le tournant trop vite.
Un vent chaud souffla contre moi. Techniquement, on était au milieu du mois de Janvier, mais après deux mois et demi de froid intense et de chute de neige, le temps devenait confus. Durant les précédentes semaines, les températures tournaient autour des vingt-sept degrés, toute la neige avait fondue et j’avais échangé mes épais blousons d’hiver pour un jean et un T-shirt. On aurait pu se croire en mai.
La magie rendait le climat étrange. Aujourd’hui, il faisait chaud et demain nous pouvions nous réveiller avec un mètre de neige au sol.
Kasen me jeta un coup d’œil.
- Pourquoi tes yeux sont-ils fermés ? T’es-tu blessée ?
- Non, ils sont fermés parce que mes lunettes sont brisées, et que regarder à travers un seul verre me donne mal au crâne.

Un visage familier apparut à travers le pare-brise : peau claire, yeux sombres, le long tatouage de dragon enroulé autour de son cou, plongeant sous un marcel bleu. Kasen. Un mec assez correct pour un rat-garou. Il conduisait une dépanneuse et adorait traîner et regarder les courses de l’Autoroute Buzzard. Elles étaient bonnes pour son business.
Les lèvres de Kasen bougèrent, mais aucun son n’en sortit. Il avait l’air plutôt marrant là, sur le côté, battant des lèvres en silence. Que veux-tu, idiot ?
Kasen était de travers. Le couché de soleil derrière lui était sur le côté aussi, l’autoroute s’étendant sur la gauche de l’horizon.
Oh merde.
Merde, merde, merde.

Jim esquissa un sourire vers la lumière. La seule fois où un jaguar vous montrait les dents, c’était lorsqu’il s’apprêtait à les planter dans votre chair.

- Ce que je voulais dire, c’est que je ne te blesserai jamais toi ou ta famille.
Je levai le menton.
- Si t’essayais de blesser ma mère, je te botterai le cul.
- Haha.
- Oui. Tu finirais sur le sol, pleurant “assez, assez” ; et je serai entrain de te frapper dans l’estomac, Bam, Bam, Bam !
Il ricana doucement. Il était si terriblement séduisant. Nous étions assis à deux pas l’un de l’autre, et nous aurions tout aussi bien pu être chacun d’un côté de l’océan Pacifique.