Il est clair, par exemple, que le Qoran ne règle pas seulement les questions spirituelles ; il s'immisce dans l'organisation de la vie matérielle quotidienne, jusque dans ses moindres détails. Ce qui a fait dire que le Livre est un tout qui se suffit et qui répond à toutes les interrogations des fidèles et de la communauté : l'économie, la justice, la guerre, la paix, et naturellement la vie spirituelle. Tout y est défini, parfois avec une minutie extraordinaire. Cet aspect du Qoran, interprété dans une perspective très étroite et restrictive, fut sans doute à l'origine de la stagnation de la société arabe commencée dès le Moyen Age. Mais ce fut par méconnaissance des possibilités d'adaptation à l'évolution des temps qu'ouvrait aussi le Livre.
Ancien affranchi du gouverneur, celui-ci se nommait Tarik Ibn Ziyad. Certains auteurs le disent Berbère, d'autres lui assignent une ascendance persane. Le fait est qu'il occupait les fonctions de gouverneur de Tanger depuis un certain temps déjà ; à ce titre il fut le premier à traiter avec le comte Julien. Ceci explique sans doute qu'il ait exigé du comte la preuve de sa loyauté : l'accompagner personnellement dans l'expédition.
Le 24 avril 711, Tarik embarqua, avec un premier corps expéditionnaire peu nombreux. Il aborda à l'extrémité d'un petit golfe, au pied d'un rocher escarpé que la postérité nommera, en souvenir du conquérant, Gibraltar (corruption de Djebel Tarik, « la montagne de Tarik »).
Une fois de plus, le devenir berbère n'est pour eux qu'une parenthèse à peine soulignée dans la grande convulsion qui marque la renaissance de la ... nation arabe. Une fois de plus, le peuple berbère est frustré de son passé, de sa personnalité, de son originalité. On en est même venu à enseigner dans les écoles primaires maghrébines que l'histoire du pays commence au VIIIe siècle, c'est-à-dire avec la conquête arabe. Après « nos ancêtres les Gaulois », voici « nos ancêtres les Mecquois »… Plus de deux millénaires et demi d'une riche histoire sont purement et simplement « gommés » pour satisfaire à des impératifs politiques à courte vue.
Le chi'isme tire son nom de chi'a qui veut dire « emblème », par allusion à la bannière d'Ali sous laquelle s'étaient rassemblés ses partisans. « Les chi'ites, écrit Gardet, furent les « légitimistes » résolument fidèles à Ali et aux « gens de la Maison » (du Prophète). Pour eux, l'imâm doit être un alide, et il est par nature doué de l'impeccabilité qui le garantit contre toute faute ». Dès l'origine. cette tendance est donc porteuse d'une sorte de mysticisme : « On se représente le chef (imâm) de la communauté comme un guide, désigné et inspiré par un décret d'origine divine expressément rendu en faveur de la descendance d'Ali. L'obéissance à la loi se confond ici avec la fidélité à un homme, source et non plus seulement exécutant de cette loi, imprégné de la grâce de l'Esprit, voire hypostase de la nature divine.
Le sunnisme porte un nom dérivé de sunna qui signifie « coutume » ou « voie » du Prophète. Constituent la sunna les innombrables dits, faits et gestes attribués à Mohammad et que la tradition a pieusement recueillis et rassemblés. Cette sunna est le recours ultime des jurisconsultes et des théologiens en cas de litige sur l'interprétation d'un passage du Qoran. Le sunnisme fait donc figure d'orthodoxie, par opposition à toutes les autres tendances qui refusent cette référence à la tradition.