Citations sur Éthique à Nicomaque (62)
Par contre, les vilaines gens sont incapables de concorde, / [10] sinon dans une faible mesure, exactement comme ils sont incapables d'amitié, parce qu'ils cherchent à obtenir plus que leur dû quand il s'agit d'avantages, alors que s'il s'agit d'assumer les charges et les services publics, ils sont toujours en reste. D'autre part, chaque individu dont c'est là le souhait n'a en vue que son intérêt personnel et donc épie le voisin et lui fait obstruction. Car, faute qu'on s'y applique, l'intérêt commun disparaît. Le résultat est donc qu'entre eux l'on assiste à des soulèvements, chacun / [15] cherchant à contraindre l'autre, mais n'acceptant pas de faire lui-même ce qui est juste.
De plus, chacun des deux est bon à la fois tout simplement et pour son ami, car les hommes de bien sont à la fois bons tout simplement et avantageux l'un pour l'autre?. Du reste, ils sont aussi agréables dans le même double sens. / [15] Les hommes de bien sont en effet agréables à la fois tout simplement et l'un à l'autre, car chacun trouve plaisir à ses propres actions et à celles qui leur ressemblent; or celles des hommes de bien sont identiques ou se ressemblent.
Et le devoir est de se tirer en sens contraire, car en nous éloignant beaucoup de la faute, nous arriverons au milieu, comme font ceux qui redressent des pièces de bois tordues.
L'Homme, en effet, est un être politique et fait naturellement pour la vie en société.
En revanche, des personnes pour qui les plaisirs manquent d'attraits et auxquelles les agréments n'inspirent pas la joie qui convient, de telles personnes ne se rencontrent pas vraiment, car la nature humaine répugne à pareille insensibilité. Le reste des animaux font une distinction entre les aliments, ils aiment les uns mais pas les autres. Si donc, il se trouve un être qui n'a de plaisir à rien et trouve indifférente une chose ou l'autre, il doit être bien loin de la nature humaine. D'ailleurs s'il se fait qu'un tel être n'a pas reçu de nom, c'est parce qu'il ne se rencontre pas vraiment. (IV, 1119a5-11)
L'amitié parfaite est celle des bons et de ceux qui se ressemblent par la vertu. C'est dans le même sens qu'ils se veulent mutuellement du bien, puisque c'est en tant qu'ils sont bons eux-mêmes ; or leur bonté leur est essentielle. Mais vouloir de ses amis pour leur propre personne, c 'est atteindre le sommet de l'amitié ; de tels sentiments traduisent le fond de l'être et non un état accidentel.
Ainsi ceux qui se témoignent mutuellement de l'amitié, en se fondant sur l'utilité qu'ils peuvent retirer, ne s'aiment pas pour eux-mêmes, mais dans l'espoir d'obtenir de l'un de l'autre quelque avantage
Pour cette raison, tout le monde estime que la vie heureuse est agréable, attendu qu'on unit la notion de plaisir à celle de bonheur, et l'on a parfaitement raison. Aucune activité, en effet, n'est complète quand elle est contrariée, et le bonheur présente le caractère d'être complet.
[...] Prétendre que l'homme soumis au supplice de la roue, ou accablé de grandes infortunes, est heureux à condition d'être vertueux, c'est parler en l'air, volontairement en ou involontairement.
Ainsi ce qui est l'objet de la science existe de toute nécessité et a, par suite, un caractère éternel. Car tout ce qui existe nécessairement et absolument est éternel, et tout ce qui est éternel ne connaît ni la naissance ni la destruction.
Si le propre de l'homme est l'activité de l'âme, en accord complet ou partiel avec la raison ; si nous affirmons que cette fonction est propre à l'homme vertueux, comme lorsqu'on parle du bon citharède et du citharède accompli et qu'il en est ainsi en un mot en toutes circonstances, en tenant compte de la supériorité qui, d'après le mérite, vient courroner l'acte, le citharède jouant de la cithare, le citharède accompli en jouant bien ; s'il en est ainsi, nous supposons que le propre de l'homme est un certain genre de vie, que ce genre de vie est l'activité de l'âme, accompagnée d'actions raisonnables, et que chez l'homme accompli tout se fait selon le Bien et le Beau, chacun de ses actes s'exécutant à la perfection selon la vertu qui lui est propre. A ces conditions, le bien propre à l'homme est l'activité de l'âme en conformité avec la vertu ; et, si les vertus sont nombreuses, selon celle qui est la meilleure et la plus accomplie.