« Histoire d'Ô » traînait dans ma PAL depuis des lustres, l'envie de le lire n'était pas vraiment là alors il prenait la poussière. Finalement je me suis décidée à le lire, plutôt pour m'en débarrasser que par réelle envie.
Je ne le fais jamais habituellement mais cette fois-ci j'ai lu quelques avis au sujet de ce roman avant d'écrire mon avis. Comme je m'y attendais, les avis sont partagés mais j'ai été interpellée par les critiques négatives. La plupart du temps, l'opinion négative des lecteurs vis-à-vis du roman tenait au sujet même du récit, à l'aspect sado-masochiste. Beaucoup de lecteurs parlent d'horreur, d'abjection, il y a de l'incompréhension, certains sont choqués, heurtés par le fait même qu'on puisse vouloir raconter ou lire ces choses-là. Un lecteur reproche à l'auteure de faire du viol un fantasme, arguant du fait qu'un tel fantasme n'existe pas. Si je n'ai pas aimé « Histoire d'Ô », ce n'est pas pour ces raisons-là. Il y a beaucoup de choses à reprocher au roman de
Pauline Réage mais il me semble que ce n'est pas juste de lui reprocher sa nature. Quant aux fantasmes de viol et de soumission, et bien si ça existe, c'est même assez répandu. Un fantasme, par définition, n'appartient pas au réel, il est une expression de désirs enfouis dans l'inconscient, des désirs souvent inavouables et tordus. Par nature, un fantasme n'est pas fait pour être réalisé puisqu'il n'appartient pas au réel. Tout comme on peut prendre plaisir à lire un roman de guerre sans avoir envie de la vivre réellement, tout comme on peut se régaler à visionner un slasher gore sans avoir envie d'occire des adolescentes dans des gerbes de sang, on peut fantasmer la soumission extrême sans avoir envie d'être violée et fouettée dans la vraie vie. La représentation fantasmatique de ce genre d'actes peut donc tout à fait être émoustillante.
Cette mise au point me paraissait importante pour que je puisse poser un jugement sur ce roman. Lire un roman érotique n'est pas lire n'importe quel roman. On a une certaine attente sensorielle. Sur ce point, « Histoire d'Ô » n'atteint que partiellement le but. le roman produit son petit effet, certaines scènes sont émoustillantes. Mais d'autres passages, en revanche, sont insipides et assommants. Pire, d'autres séquences sont carrément ridicules.
Si mes attentes d'émois sensuels n'ont pas été totalement comblées mes attentes littéraires l'ont été encore moins. Car oui, j'avais aussi des attentes littéraires vis-à-vis d'« Histoire d'Ô ». Après tout, le roman, s'il a été éreinté par certains en raison de son sujet, a globalement plutôt une bonne réputation et il a même reçu un prix l'année suivant sa sortie (le prix des Deux-Magots). Je n'ai pas du tout été séduite par le roman en tant que tel. le roman n'est jamais vulgaire, c'est là la seule qualité littéraire que je lui trouve. En dehors de ça, c'est à peine un roman, le pire étant la caractérisation des personnages. Mais quelle caractérisation ? Et d'ailleurs, quels personnages ? Ils sont tout simplement inexistants. J'ai trouvé l'histoire assez mal racontée, alternant quelques scènes de sexe et de jeux de domination/soumission plus ou moins réussies avec des passages pour meubler le récit qui sont d'une platitude sans nom et qui procurent un ennui abyssal. J'ai également été très agacée par ces logorrhées aux cours desquelles Ô se demande sans cesse pourquoi elle se sent anoblie lorsqu'elle est humiliée. Non seulement poser une même question dix mille fois, même en la formulant de façon différente à chaque fois, est assommant mais en plus le fond même de la question me dérange comme si l'auteure ressentait le besoin d'apporter une justification aux actes qu'elle décrit, comme si elle n'assumait pas totalement. Quant à la fin, il n'y en a pas. Manifestement, l'auteure ne savait pas comment finir son roman. Ca se termine donc en eau de boudin, de façon totalement bâclée.
« Histoire d'Ô » c'est le genre de livre qu'on lit tout en le détestant, dont on parvient au bout parce que le cerveau reptilien est ce qu'il est et que c'est un bouquin facile. Une fois parvenu à la fin, c'est le genre de livre qu'on a un peu honte d'avoir lu, non pas à cause de son caractère licencieux mais parce que c'est tout de même un peu nul.