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Ayant voulu tenter ce livre à la réputation sulfureuse, j'ai choisi cette édition au hasard, et j'ai bien mieux apprécié la préface de Jean Paulhan au roman lui-même. La préface est une sorte d'essai de Paulhan qui m'a interpellé par sa construction. Il ouvre son exposé sur une revendication d'anciens esclaves fraichement libérés, qui se révoltent pour que leur ancien maitre les reprenne en esclavage. Etre esclave demande de s'abandonner totalement à son maitre, sans avoir à réfléchir ni à prendre de décision. Paulhan compare le danger de leur cahier de doléances, aux dangers d'autres genres de livres…les érotiques. Et cette fois, il entre dans le vif du sujet, dans la critique d'Histoire d'O. Il y donne surtout une certaine vison de la femme…sa vision. « Sans doute l'Histoire d'o est la plus farouche lettre d'amour qu'un homme ait jamais reçu ». C'est une manière de voir les choses. Mais est-ce faire preuve d'amour que de fouetter une femme au sang, la marquer au fer rouge comme un animal de troupeau, et la percer et la ferrer ainsi, pour mieux l'abandonner ensuite ? Pour O, sa soumission complète montre son amour inconditionnel pour l'homme qui l'a choisie, quitte à préférer la mort que son départ. L'héroïne attire, on comprend très vite que sa soumission sera de plus en plus complète, de plus en plus absolue, mais on espère toujours qu'elle aura un sursaut de révolte . En vain. + Lire la suite |
Une institutrice ? Une femme de pasteur ? Une jeune divorcée ? Une femme de ménage ? Une écrivaine de génie. Une inconnue. La vie d'Hélène Bessette (1918-2000), autrice de treize romans et d'une pièce de théâtre, tous parus chez Gallimard en seulement vingt ans, de 1953 à 1973 (et tous épuisés), semble avoir été faite de rendez-vous manqués et d'incompréhensions. Son premier roman, Lili pleure, obtient le prix Cazes en 1954. Plus tard, ses romans seront régulièrement inscrits sur les listes du prix Goncourt et l'admiration de nombreuses personnalités (Michel Leiris, Simone de Beauvoir, Dominique Aury, Jean Dubuffet, Claude Mauriac, Alain Bosquet, André Malraux) laisse présager une reconnaissance à la hauteur de son talent et d'un style entièrement nouveau qui ne ressemble à aucun autre. Par ces trois lettres aussi : GRP, ou Gang du Roman Poétique, l'occasion pour Bessette d'exprimer une théorie nouvelle et exigeante du roman.
Par Laure Limongi, autrice et éditrice, enseignante en création littéraire à l'École nationale supérieure d'arts de Paris Cergy.
Lecture par Anaïs de Courson, comédienne.
En savoir plus sur le cycle Autrices oubliées : https://www.bnf.fr/fr/agenda/autrices-oubliees-de-lhistoire-litteraire