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sur 1014 notes
D'acier traînait depuis des années sur mon étagère sans que je daigne lui accorder un regard. Pourtant c'est bien moi qui l'avais acheté à sa sortie en poche, vaicue par les critiques portant aux nues le talent de cette surdouée des lettres italiennes d'à peine 25 ans, Silvia Avallone. Et par un miracle, alors que je cherchais désespérément, telle l'assoifée, un roman à me mettre sous la dent, D'acier s'est offert à moi dans toute la splendeur d'une pépite littéraire. Car oui, chers amis, D'Acier m'a conquise, sans aucune forme de procès. J'ai dévoré cette histoire d'amitié absolue entre nos deux héroines, nymphettes lolitas de 13 ans, Anna la brune, Francesca la blonde, parées de l'aura de leur jeunesse, drapées dans l'insolence de leur beauté impudique qui fait chavirer le coeur et surtout les hormones de plethores d'hommes de 7 à 77 ans. Telles des reines inaccessibles, elles règnent sans partage sur la cours d'une cité dortoir de Piombino, ville sidérurgique du bord de mer, sinistrée par la crise, rongée par le chômage, la pauvreté, l'apathie générale, sacrifiant ses enfants sur l'autel de la Lucchini, monstre démiurge dont les hauts fourneaux noient de leur désolante hauteur la beauté du paysage : l'enfer industrielle aux portes du paradis, face aux splendeurs de l'ïle d'Elbe.
Au coeur de cet univers sinistré et sclérosé, plombé par un soleil ravageur, Anna et Francesca jouent et s'amusent, des hommes, des femmes, des conventions, cruelles chasseuses bien décidées à marquer de leur empreinte le monde autour d'elles. Fortes d'une amitié inébranlables, fusionnelles dans l'excès, l'été de leurs 13 ans va pourtant bouleverser l'équilibre précaire auquel elles s'ancrent tant bien que mal pour ne pas sombrer, comme les autres, leurs mères, leurs pères, résignés à une vie médiocre sans couleurs. de ça elles n'en veulent pas. Mais peut-on s'extraire si facilement d'un déterminisme social ? A travers cette amitié sans faille, Silvia Avallone nous livre une peinture sociale qui jamais ne sombre dans le misérabilisme. Grâce à sa plume enlevée et à l'acuité de son regard, elle donne vie à deux héroines hautes en couleurs et si attachantes et troublantes, dont on se sent instantanément proches. Roman de l'amitié et des premiers émois, roman d'apprentissage, D'acier n'en demeure pas moins une fable implacable et acerbe qui m'a laissée le sentiment d'avoir eu entre les mains une vraie pépite.
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Piombino, jolie cité de la côte toscane, avec vue sur l'île d'Elbe, chaleur de l'été, plage, baigneurs, une vision idyllique, n'est-ce pas ?

Mais dans son premier roman, Silvia Avallone nous en montre une toute autre image : celle des aciéries et des cités ouvrières, des sidérurgistes et de leurs familles, de l'adolescence sans perspectives.
Au centre du roman les deux adolescentes, Anna et Francesca, voisines d'immeuble et liées depuis l'enfance par une amitié et une complicité indéfectible. Les fleurs en boutons sont prêtes à s'épanouir, mais elles n'ont que treize ans et si elles jouent de leurs charmes naissants sur la plage avec leurs mini deux-pièces, c'est sans savoir où les emmènera la vie, ni ce qui sépare amitié et amour. En toile de fond leurs deux familles, avec des pères violents ou malhonnêtes, dont les défaillances les détruisent, des mères précocement vieillies, malgré l'engagement politique et féministe de Sandra, des copains ou des frères ouvriers de la Lucchini, l'aciérie qui telle un monstre, domine et aliène la vie des pauvres.

Quels espoirs pour tous ces jeunes, s'en sortir par les études, par l'amour ou par le rêve d'aller un jour, comme les touristes, à l'île d'Elbe si proche et si inaccessible ? Mais bien plutôt se retrouver condamnés à l'enfer de l'usine sidérurgique, à la ligne de coke du samedi soir ou du travail, au cabaret mal famé où les uns s'excitent et dissipent leurs maigres salaires, tandis que les autres s'exhibent avant l'âge et se prostituent...
Dans les HLM ouvriers en déréliction, l'avenir semble bouché... Reste la tendresse naissante entre les deux adolescentes, leur amitié amoureuse et ses dépits, fâcheries et disputes, souffrances sentimentales bien plus graves que celles nées d'amours éphémères avec des garçons irresponsables.

Une écriture nerveuse et suggestive, l'évocation sans concession d'une génération perdue, et émergeant de cette désespérance, la tendresse incertaine et ambiguë de l'adolescence et de ses rêves.
Coup d'essai, coup de maître !
Lu en V.O.
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D'acier, comme le métal en fusion qui coule du haut fourneau. D'acier, comme le lien qui unit Anna et Francesca. D'acier, comme le coup de poing dans le bide que ce roman m'a filé.

Peut-on vraiment qualifier de coup de coeur un roman si fort, si douloureux ? Je ne sais pas, pour le moment je suis trop occupée à digérer mes émotions ! En tout cas une chose est sûre, Silvia Avallone n'est pas là pour faire de la figuration, et croyez-moi, on entendra parler d'elle ! Pour son premier roman, elle a choisi de placer l'action à Piombino, petite ville de la côte Toscane qui l'a vue grandir, et qui à première vue a tout pour faire rêver : la mer, le soleil, la plage de sable fin... Oui mais voilà, "Sea, Sex & Sun" ça ne suffit pas à effacer la misère. L'eldorado c'est en face, chez les riches : l'Elbe qui fait rêver, à quelques centaines de mètres et pourtant inaccessible.

Dans leur cité industrielle salement résignée, où l'apparence est reine, la drogue omniprésente, la sexualité glauque, où les habitants sont usés avant d'atteindre 30 ans, on découvre des jeunes qui ont encore des rêves, des rêves d'amour, de fuite en avant. Des rêves qui les aident à tenir, jour après jour dans cet enfer. Avec son écriture inimitable, percutante, romantique et vulgaire, joyeuse et mélancolique, Silvia Avallone a su capter toutes les contradictions de l'adolescence. Elle montre les failles qui se cachent derrière la désinvolture de ces ados qui cherchent surtout à exister. Ceux-là même que j'ai tant haï dans mon jeune temps. Finalement derrière la frime, la mode et la popularité peuvent se cacher bien des souffrances.

D'acier est un roman social qui peint une fresque tristement réaliste de l'Italie berlusconienne – mais est-ce différent ailleurs ? – ployant sous la pression du capitalisme mondial. Brutal, comme son aciérie. Touchant, comme sa jeunesse paumée. Brûlant comme son implacable été. Magistral, comme le talent de son auteur.
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Piombino, Toscane, sur la côte italienne. Mais pas l'Italie du tourisme et des belles plages qui promettent évasion et dépaysement.
C'est plutôt une immersion au coeur d'une ville industrielle et de son milieu ouvrier.

Deux adolescentes, Francesca et Anna, grandissent tant bien que mal dans ce décor qui ne fait pas rêver.
Quatre immeubles de béton qui se font face et dont une des façades offre la vue sur la mer quand c'est le vis-à-vis avec les voisins pour les autres.

Une amitié de jeunes femmes avec ses hauts et ses bas, ses moments de fusion ou de désaccords allant jusqu'au conflit.
Une bande de jeunes qui s'amuse à la plage lors de la pré-adolescence puis dans les bars, le long de la digue, une fois plus âgés.

Les premières amours se vivent dans les recoins de l'usine, le long de la plage, au milieu des métaux rouillés et laissés à l'abandon.

Les familles ouvrières, avec les femmes au foyer ou d'autres qui travaillent pour arrondir les fins de mois.
De la violence psychologique, physique ou sexuelle au sein des familles.

Des jeunes qui ne sont jamais sortis de leur tanière et qui rêvent d'évasion, avec une vue sur la touristique île d'Elbe.
Grandir et se construire dans ce milieu ouvrier pourtant menacé de fermeture suite au rachat par les russes.

Subir les vagues de licenciements et les conséquences économiques que cela engendre.
Trafiquer, avoir des activités illégales pour tenter de mener une meilleure vie, ne plus se poser la question du loyer à payer.

Silvia Avallone nous offre une photographie du monde ouvrier italien au tournant du XXIème siècle.
Un livre qui décrit la noirceur d'une toscane ouvrière à laquelle le touriste lambda n'est pas habitué.
Une réalité sombre et saisissante avec une écriture fluide et qui reflète le langage de ce monde ouvrier (lu en VO).
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Dès les premières pages j'ai eu le sentiment de déjà lu….. Ne suis-je pas en train de relire l'Amie prodigieuse d'Elena Ferrante ? Deux fillettes, une cité ouvrière, deux familles semblables et différentes à la fois, Milan…. Ah non nous sommes à Piambino, en Tocasne, face à l'île d'Elbe….. L'un des deux adolescentes est douée à l'école, l'autre en échec, l'une veut être écrivain etc…..Ce livre paru en 2010 (Italie) a beaucoup de similitudes avec la saga en 4 tomes de l'Amie Prodigieuse dont le premier tome est paru en 2011 (Italie)….. Coïncidence peut-être…..

2001 – Italie, Piambino, une ville coincée entre deux mondes, celui de l'aciérie Lucchini où tout bruit, noirceur et crasse et où travaille une partie de la population de la cité ouvrière où vivent Anne et Francesca, 13 ans, de l'autre l'Ile d'Elbe, le miroir aux alouettes, où tout semble doux et doré. L'usine transforme les métaux en acier, la vie va transformer ces deux jeunes adolescentes qui rêvent d'ailleurs et oscillent entre jeux et rêves et qui vont grandir vite, très vite, trop vite.

Les filles de leur âge, les boudins que leur propre vision dans le miroir plongeait dans la crise totale, les détestaient. Anna et Francesca, leur beauté, elles te l'envoyaient dans la gueule. Chaque putain de minute, il fallait qu'elles te prouvent qu'elles étaient mieux que toi, qu'elles avaient gagné, à priori et pour toujours. (p103)

C'est l'histoire d'une amitié qui va être confrontée à des drames : il y a des coups qui pleuvent sur l'une mais elle se tait et ne pleure plus, elle serre les poings et les lèvres, il y a l'argent qui manque, les dettes qui s'accumulent dans la famille de l'autre, mais toutes les deux regardent par la fenêtre et narguent les hommes qui les regardent, elles rient, elles ont tous les culots car elles sont à l'âge où on découvre le pouvoir du corps et le monde des adultes. Elles se pensent invincibles car elles sont deux et leur force vient de là. Mais sont-elles si fortes que cela….. A vouloir se comporter en femme on oublie que l'on est encore qu'une enfant.

Comme à la maternelle quand on te montre du doigt et qu'on te dit sèchement : « Toi non, tu joues pas ». Une expérience qu'elle n'avait jamais connue Qu'elle n'imaginait même pas. Parce qu'elle n'était pas un mais deux. N'était pas tu mais vous. Vous ne jouez pas. Annafrancesca ne joue pas. Mais elles s'en fichaient bien, toutes les deux : elles avaient leurs plages secrètes, des cabanes en bois, des caves, des bancs, la côte de Salivoli tout entière pour elles seules. (p351)

L'aciérie Lucchini donne le tempo dans la vie de la cité et de ses familles : les métaux se transforment en acier, les adolescentes veulent se transformer en femmes, ailleurs, sur les plages de l'ïle d'Elbe, sous le soleil qui dore la peau, où la mer est bleue et sans détritus. L'acier résiste mais leur amitié va-t-elle résister, vont-elles résister à ce de partir, d'un ailleurs où les rêves, croient-elles, deviennent réalité, où c'est forcément plus beau, où l'avenir passe par autre chose qu'une vie comme leurs mères, par la cité et par l'aciérie.

L'âge où on croit que le monde est une mine d'or, qu'il suffira de grandir, de quitter ses parents (p159)

Mais la vie ne fait pas de détails, parce que la vie lamine, sape, détruit dans ces cités où les corps et les esprits souffrent, s'usent, les soucis et les peines prennent le dessus,, comme pour Alissio, le frère d'Anna, le Don Juan de la cité, qui passe des week-ends sans sommeil après le travail à la coulée, de l'acier au sexe et à la drogue pour tenir, pour oublier.

C'est l'histoire d'une année de la vie de ces deux fleurs à peine écloses, rieuses, effrontées, sûres d'elles (en apparence) mais finalement si fragiles qui vont passer du rire aux larmes, de l'espérance au désespoir.

Elle était en train d'éclore. Elle avait quelque chose d'indéchiffrable dans les yeux. Simplement elle était encore entre deux. (p205)

A 13 ans elles pensent mener la danse mais le monde des adultes n'est pas tendre, à vouloir grandir trop vite on peut franchir les limites, être confrontées à une réalité qu'elles n'imaginaient pas.

Roman d'apprentissage et de constrastes où deux mondes s'affrontent, celui du quotidien et celui dont on rêve mais qui ont peu de chance de se rejoindre, car il n'y a que les contes qui finissent bien, la vie est bien plus cruelle pour Anna et Francesca.

Dans ce roman les hommes ne sont pas à l'honneur et mis à mal, les familles ne se préoccupent guère (ou trop et mal) de leurs enfants, ils ont d'autres problèmes : la fatigue, les factures qui s'accumulent, la vie qui ne fait pas de cadeau, la violence. La promiscuité de ces barres d'immeubles ne rapproche pas les êtres, chacun s'enferme, se tait mais parfois les silences sont plus criants que les mots.

Roman d'une année charnière dans la vie de deux adolescentes, au moment où le monde, comme l'acier, se transforme, bascule comme basculent leurs deux vies. Rien ne sera plus pareil ensuite.

J'ai retrouvé le ton vif, efficace de Silvia Avallone, qui nous immerge dans les vies : féminines, celles des cités ouvrières, dans l'éveil aux sens, dans l'adolescence et ses tourments.

Les deux mondes ne communiquent pas. Il ne suffit pas de faire un trou dans le grillage et d'y glisser la tête pour vivre une autre vie. (p236)

Ça poisse, c'est rugueux, c'est noir parfois mais il y a Anna et Francesca, qui illuminent le quotidien par leurs beautés, leurs rires, leurs jeux car il ne s'agit pour elles que de jeux, dangereux parfois mais elles sont jeunes, jolies et n'ont peur de rien. Silvia Avallone distille peu à peu tous les ingrédients du drame, car à trop vouloir jouer avec le feu on se brûle, à trop vouloir croire que l'on maîtrise on tombe.

Roman d'apprentissage, roman noir, roman sociétal d'une Italie ouvrière que l'auteure observe, analyse, aime et semble bien connaître. On s'installe au milieu de cette cité, on regarde, on entend même ce qui n'est pas dit, on voit ce qui se cache sous la crasse quand on gratte un peu, on voit ces vies et ces âmes abîmées, détruites mais il y a toujours dans les romans de Silvia Avallone l'amour, l'amitié, la beauté, c'est brut, c'est fort, c'est costaud : c'est un acier bien trempé grâce à sa plume et il y a toujours de l'espoir.

Je te jure, j'ai cherché « acier » et ça ne veut rien dire. C'est un alliage, avait-elle dit en fronçant les sourcils. Ouais, mais j'ai cherché dans le dico et ça veut rien dire. C'est pas un mot qui cache un autre mot. Ça veut dire cette chose-là. Basta. (p307)
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J'ai vraiment du mal à exprimer mon ressenti par rapport à ce roman.qui m'a à la fois subjuguée et déstabilisée dès les premières scènes.
La convoitise du père qui observe à la jumelle les formes de sa fille adolescente, l'exhibition des 2 amies sous les fenêtres des voisins concupiscents, la brutalité sournoise et permanente dans les relations des uns avec les autres, la violence dans la description de l'aciérie et du travail des ouvriers, autant de scènes décrites de façon crue et souvent hypersexualisée.
Comment une aussi jeune écrivaine a t'elle pu traduire aussi puissamment toute cette ambiance sordide, étouffante, suffocante d'une petite ville pauvre d' italie adossée à son unique activité , la sidérurgie, sous l'ère berlusconienne ?!
Je suis épatée par l'écriture luxuriante de Sylvia Avallone mais je n'ai pas été à l'aise dans la lecture
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Roman que j'ai découvert totalement par hasard, au fil de mes pérégrinations sur le Net, D'acier raconte avec beaucoup de réalisme l'histoire de deux adolescentes, Anna et Francesca, anges de beauté et de lumière au centre de leur quartier défavorisé de Piombino, en Toscane. Elles y côtoient le chômage, la drogue, le banditisme, l'obligation d'être une jolie jeune fille désirable dès le plus jeune âge pour être populaire (et en jouer, voire devenir fille-mère)... avec comme seul désir, fuir au plus vite cette vie sordide et sans espoir. Autre raison à ce désir de fuir, leurs familles : pour Francesca, un père violent et une mère démissionnaire; pour Anna, un père souvent absent aux sources de revenus louches, un frère qui travaille aux acieries, passant le reste de ses journées à se défoncer, et une mère qui fait ce qu'elle peut pour tenir la maison malgré les dettes.
Avec elles, le lecteur assiste à la description de ce monde en ruines, parfois indigné par ce qu'il découvre, parfois au contraire amusé, mais dans tous les cas jamais indifférent face à ces personnages qui ont tous leur part dans la vie de leur quartier.

Derrière cette fresque sociale est aussi mise en jeu l'histoire d'une amitié, celle de deux adolescentes qui se connaissent depuis le berceau et qui vivent avec violence, telles des soeurs siamoises aux relations plus qu'ambigues, leur entrée progressive dans le monde des adultes : premiers émois amoureux, premiers drames, premières disputes... les séparant pour mieux leur permettre de se retrouver.
La force de leur amitié est justement pour elles le rempart à la situation sociale désastreuse de leur quartier, et c'est quand cette force s'amenuise que le pire apparaît pour ces deux inséparables, tiraillées entre ce que leur dicte le monde dans lequel elles évoluent et leurs véritables sentiments.

D'acier a été pour moi un véritable coup de coeur : une histoire poignante, d'un réalisme brutal qui donne une image désabusée d'une partie de la population italienne de la fin des années 1990, laissée de côté après la déliquescence de ses usines de métallurgie. le style de Silvia Avallone est parfaitement adapté à son sujet, à la fois délicat, comme ces deux jeunes filles qui éclosent dans la douleur de cet univers, et sombre, mettant en scène des personnages touchants, qui essaient de s'échapper de leur quotidien misérable par tous les moyens possibles. Même au plus fort de la tragédie, l'espoir demeure malgré tout, bien qu'infime, ce qui donne une touche finale de lumière à ce récit.

Une découverte que je ne regrette pas le moins du monde.
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Deux jeunes filles, très jeunes, dans leur quatorzième année, à Piombino, en face de l'île d'Elbe, en Toscane. Une ville industrielle. Des barres de béton. La misère. La violence. le sexe. La drogue.

Ce livre est un premier roman écrit par une très jeune femme et c'est ça qui épate. La maîtrise de la narration, la noirceur, quelques phrases remarquables, une atmosphère lourde, et puis ce malaise ambiant et qui ne fait que croître au fur et à mesure du roman. La fin tragique des personnages est particulièrement bien écrite, elle est amenée avec une tension, une montée dramatique d'une grande maîtrise.

Globalement, je dois dire que ce roman social est à la hauteur de son ambition, il nous décrit un monde de misère, dans lequel l'aciérie tient une place prépondérante. Des pères démissionnaires, truands ou violents, des jeunes qui partagent leur vie entre travail pénible, plage, drogue, et sexe. Des femmes malheureuses en couple et qui se sentent piégées dans leur vie. Au milieu de tout ça, ces deux jeunes filles rêvent de liberté, de reconnaissance, mais elles sont engluées dans leur monde, et seule la dernière note finale laisse entrevoir un mince filet d'espoir.

J'avoue que j'ai eu un léger coup de mou à la lecture de certains passages. Les deux jeunes filles, amies pour la vie, vont se fâcher, s'éloigner l'une de l'autre et cela donne lieu par moments à des pages agaçantes, crispantes, avec des propos d'adolescentes qui m'ont, je dois dire, exaspérée. Mais qui sont le reflet d'une certaine réalité… Cependant, quelques semaines après, j'ai déjà oublié mon agacement et n'ai retenu du roman que la belle peinture sombre de la société ouvrière italienne.

D'acier, c'est le côté obscur de l'Italie et c'est pour moi la découverte d'une auteure qui a écrit bien d'autres romans depuis, que je découvrirais avec plaisir.
Lien : https://krolfranca.wordpress..
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Elle est dans quel état ces derniers mois Silvia Avallone ? Euphorique ou dépassée par les événements ? Elle est passée de l'anonymat à la célébrité, à 25 ans, après la parution de son premier roman en Italie, plébiscité par le public (plus de 350 000 exemplaires), encensé par la plupart des critiques, descendu avec hargne par les autres, en voie d'être adapté au cinéma, traduit dans douze pays. Et avec cette référence évidente et lourde à porter : l'Emile Zola de Germinal. D'acier est sorti en France en mars, a obtenu le Prix des lecteurs de l'Express. En attendant d'autres récompenses, sans doute. Ce livre n'est pas une gifle, c'est un crochet dans l'abdomen. A couper le souffle. de multiples personnages s'y côtoient dans une même ville : Piombino, en Toscane, en bord de mer. le paradis ? L'enfer plutôt. C'est une ville industrielle dominée par une aciérie et son haut fourneau, avec les immeubles de sa cité de béton, poétiquement appelée Stalingrado. Avallone raconte le quotidien des ouvriers et de leurs familles, au début du XXIe siècle. Les femmes flétries à 30 ans, les hommes violents et alcooliques, certains déjà pères à 18. Et les magouilles pour gagner un peu de fric, la cocaïne pour tenir à l'usine le jour et passer la nuit dans des boîtes de nuit glauques. Tout un univers, couleur de rouille, dans lequel évoluent deux gamines, pas encore quatorze ans, belles comme des icônes, que leur seule amitié fait tenir. La romancière ne fait pas dans la dentelle : langage de charretier, style scandé, crudité à tous les étages. du réalisme social au goût marécageux qui n'épargne personne, avec une énergie inimaginable. Comme pour Zola en son temps, on pourrait la taxer de vulgarité, trouver qu'elle en fait trop, qu'elle en rajoute dans le sordide. C'est un point de vue qui se défend, mais qui ne résiste pas à la puissance d'évocation de ce roman, à la construction linéaire et implacable, qui ne lâche jamais prise. Un bouquin en fusion qui brûle au troisième degré. Métal hurlant !
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Vous avez aimé L'Amie prodigieuse ? Moi non. J'ai péniblement fini le premier volume, l'histoire de ces deux jeunes italiennes ne suscitant chez moi aucun intérêt ni même une once d'empathie. Je n'ai toujours pas compris pourquoi ce roman avait eu autant de succès. Et c'est au détour d'un café littéraire skype-confiné que j'ai découvert d'autres lectrices imperméables au charme de cette amie prodigieuse. L'une d'elle a eu la bonne idée de nous recommander ce roman D'acier, moult fois plus abouti et passionnant.
On retrouve un duo d'amies, dans un quartier ouvrier italien, à ce moment de la vie où l'enfance glisse non sans difficulté vers l'adolescence, puis l'age adulte. Ce moment charnière où tout ce qui paraissait évident depuis la naissance prend une autre forme, d'autres teintes. Où le chemin n'est plus tout droit et unique, mais comme si le brouillard soudain levé révélait des embranchements, des choix à faire. Où tous les espoirs sont permis mais on ne voit pas forcément encore qu'il n'y a pas beaucoup d'espoir de faire mieux que les parents. Face à ces bouleversements, l'amitié de toujours est bousculée, mise à l'épreuve. En toile de fond, l'Italie ouvrière et d'autres personnages, les parents, les frères, les copains, qui se trimbalent leurs vies pas très glorieuses, selon les embranchements qu'ils ont pris plus jeunes.
Ils sont résignés, révoltés, amers, combatifs, fiers, drogués, vulgaires, malhonnêtes, envieux, déjà vieux. Ils sont coincés dans une sorte de no man's land, entre l'usine d'acier, noire, fumante, grondante et l'Ile d'Elbe au fond, tout là-bas qui leur fait de l'oeil, comme un paradis inaccessible avec ses plages et ses villas de rêve.

C'est bien fait. Très bien fait. Un peu la version italienne de Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu.

Alors, faut-il le lire ? Oui. Surtout si vous n'avez pas aimé l'Amie prodigieuse.
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