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Citations sur Une amitié (115)

Elle était comme ça, il lui fallait tout transformer en compétition, trouver
l’adversaire à humilier et anéantir. Pas étonnant qu’elle ne soit sympathique
à personne. Ça ne s’appliquait pas à moi, je n’étais pas dans la course.
Pourtant cet après-midi-là, en parlant de Valeria, elle me convainquit. Que
je pouvais vivre moi aussi, comme elle, comme tout le monde. Essayer.
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Quelle est la première règle pour devenir écrivain ? Lire. La deuxième ?
Observer. Avec minutie, précision, les vibrisses tendues jusqu’au spasme,
pointées comme un radar vers ce qui est derrière, dedans, vers le détail qui
trahit.
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Quand nous descendîmes au rez-de-chaussée, sa sœur avait disparu, son
frère aussi, il n’y avait plus que leur mère, Mme Ginevra dell’Osservanza,
sur le canapé, feuilletant une revue. La lumière lasse du crépuscule arrivait
droit de la fenêtre et frappait son visage, découvrant ses rides sous le fond
de teint, sa fragilité, ses cinquante-deux ans.
Cette vision m’attendrit ; elle dut avoir le même effet sur Beatrice car elle
s’approcha et s’assit près d’elle, en se serrant comme pour se faire
pardonner. Sa mère caressa sa chevelure dévastée : « On va tout arranger. »
D’une voix douce, comme si elle était devenue quelqu’un d’autre.
Je ne m’étonnai pas, j’avais l’habitude. Je savais qu’il y avait en une
mère deux extrêmes et qu’elle passait sans sommation de l’une à l’autre. Tu
avais beau la détester, revenait toujours le besoin physique d’être prise dans
ses bras, acceptée. Toi, dérisoire, elle gigantesque, une différence
impossible à combler qui – comme pour Beatrice et comme pour moi –
compromet parfois toute ton existence.
Elles restèrent un long temps collées ainsi, leurs deux corps encastrés,
comme si je n’étais pas là. Les regarder me faisait mal mais je les regardais
quand même, avec la sensation d’un manque si douloureux que je me sentis
devenir tout à coup orpheline. Je le savais, parce que la mienne était partie.
Sans m’emmener, je veux dire. J’imaginais sa vie à Biella. Son
soulagement, sa liberté retrouvée. Ce que je ne comprenais pas, c’était
pourquoi elle m’avait mise au monde.
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Je cherchai dans l’armoire le roman que je n’avais jamais rendu à la
bibliothèque avant de partir. Le pyjama à petits cœurs subtilisé dans la
valise de ma mère avant son départ. J’entassai tout cela, que je serrai contre
moi, expérimentant le pouvoir énorme qu’ont les choses de restituer les
odeurs et les voix dont elles se sont imprégnées. De rendre présents les
souvenirs.
Je n’avais plus rien, plus rien.
J’emportai le walkman, le roman et le pyjama sous mes draps, comme un
naufragé les dernières choses de toute une vie. Je n’avais même pas de
photographie de nous trois, une preuve que nous avions été heureux. Tout
ce que je possédais, c’était mon journal fermé par un cadenas, où je
m’exerçais à fixer une impression, un sentiment, afin qu’à travers les mots
quelque chose me reste.
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J’ai toujours trouvé tristes les stations balnéaires touristiques, sans autre
justification que la proximité de la mer. Marina di S. était exactement cela :
un assemblage de maisons autour d’une rangée de boutiques, avec un petit
port modeste comme un supermarché, des lieux qui n’ont pas d’histoire ; un
endroit anonyme qui, à certaines périodes, se donne des airs et sent le
beignet, le nougat, la pizza à la découpe. Pourtant, cet après-midi-là, cet
endroit me parut magnifique.
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J’étais « l’étrangère ». On m’appelait comme ça au lycée, dans mon dos
mais assez fort pour que j’entende. Comme si je venais d’Argentine ou du
Kenya, alors que je venais seulement d’une autre région. J’entrais en classe
et on me dévisageait, commentait mes chaussures, mon cartable, mes
cheveux. Dès que je prononçais un e ou un z différemment, on ricanait.
Beatrice aussi. Elle n’avait jamais pris ma défense, n’était jamais venue me
voir à la récréation. Et que voulait-elle de moi, maintenant ? Que je fasse le
guet pour elle ?
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Je perçus le sourire de Beatrice : elle me devinait. Aux yeux de tous,
voler était bien la dernière chose dont une fille comme moi aurait été jugée
capable, mais pas aux siens. J’ai dit qu’elle était à l’époque une fille
normale, et c’est vrai, pourtant elle avait un don : elle savait lire. Pas à la
surface ni même à l’intérieur, mais dans le cœur. Le cœur des mots, des
gestes, des vêtements. Elle savait, elle qui allait faire fortune avec les
apparences, que la vérité des êtres, comme des livres, se tient dans ce qui
n’est pas dit ; ce qui reste secret.
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La vie a-t-elle vraiment besoin d'être racontée pour exister ?
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« Le destin, c’est revivre le même trauma, répéter les mêmes erreurs », m’expliquerait le docteur De Angelis dix ans plus tard, « à moins qu’on ne se rebelle. » p.414
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« C’est quand on trahi qui on aime qu’on devient qui on est. » p.403
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