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Citations sur Le dictionnaire Eustache (10)

Dans les années 60, révolté à l'idée que le plus sadien des livres de Georges Bataille, Le Bleu du ciel, soit introuvable, non réédité, censuré, Eustache prit la décision d'en sortir une toute petite édition pirate, sans doute ronéotypée, qu'il vendait à la sauvette entre les séances de la Cinémathèque.
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Au milieu d'une conversation entre Jean-Noël Picq et Alexandre, dans un café, l'amateur d'Offenbach raconte ainsi : "Ah, tu sais, j'ai rencontré Biaggi, tu vois, et il était tout en vert. Veste verte, chemise verte, pantalon vert. Il fumait même des Gauloises vertes. Alors, je lui dis : "ça va ?" Et il me dit : "Comment, 'ça va' ? Tu ne vois pas comment je suis ? Je suis en vert et contre tout." Ben, j'ai trouvé ça pas mal, j'aimerais bien pouvoir le dire, mais tu vois je suis en noir, alors : en noir et contre tout, je ne sais pas si ça va tellement."
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Eustache choisit de décrire des corps qui, plutôt que d'agir, déclament, déclament pour dire leur inertie, leur impossibilité de choisir, parlent pour épuiser une époque qu'ils méprisent ("merdique", parce qu'elle est fière de se dire sans amour) et s'emparent du postulat de la liberté de parole initié par le mouvement 68 pour tout dire, à commencer par ce qui fait chier 68. Cet écart, signifiant au mieux le dandysme eustachien, il faut le regarder non comme un discours réactionnaire bourgeois mais comme une arrogance. Celle du dernier des prolétaires, qui disait crânement en 1968 à Philippe Garrel : "Quand on n'a pas de quoi bouffer, on ne pense pas au marxisme, on pense à bouffer."
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En 1978, Eustache évoquait d'ailleurs ainsi l'évolution de la fréquentation cinématographique : "Je me souviens d'avoir vu Le Journal d'un curé de campagne dans une salle pleine, et une réflexion d'un spectateur m'avait frappé : "ça nous change des films habituels, mais qu'est-ce que c'est bien !" C'est-à-dire, une fois ou deux par an, on pouvait voir un film de Bresson ou Tati, en sachant que cela n'allait pas être Robin des Bois (avec Errol Flynn), mais sans le regretter. Maintenant, ce phénomène a disparu. Le dernier film de Bresson a fait moins de 100 000 entrées. Un condamné à mort s'est échappé avait eu un certain succès public."
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Eustache est pourtant l'un des rares cinéastes de toute l'histoire du cinéma (avec Vigo) venu du prolétariat, mais aux lendemains de Mai 68 il occupe une place qui échappe à tout discours de classe, dandy pauvre évoluant dans un monde faussement aristocratique (le théâtre permanent des cafés littéraires de Saint-Germain-des-Près et les clubs nocturnes de Montparnasse), rêvant d'autres années folles, celles du Montparnasse des années 20, parlant une langue raffinée jusqu'à la pose (le vouvoiement, quand le tutoiement "cool" est de rigueur, le dédain apporté aux mots d'une époque, comme "flipper").
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La Maman et la Putain est un de ces films qui ne reprennent les slogans politiques que pour s'en moquer. Il tourne le mouvement féministe en dérision, traite Sartre d'ivrogne, bâille en écoutant la grande musique progressiste, s'ennuie du spectacle de la liberté pop que la presse underground, comme celle de gauche, entend vendre. Les élans unitaires n'y ont aucune place -- même chose pour les fromages de chèvre ou les communautés hippies. Il n'y a même pas ici l'esquisse d'un exil dans des terres lointaines et vierges, un monde (intérieur, extérieur) dessiné en dehors de toute société, un temps flottant comme on peut en rencontrer dans les plus tenaces et hiératiques films de Garrel de la même période.
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Eustache ne montra guère le grand lecteur qu'il était. Dans La Maman et la Putain, il cita sans le nommer son ami Jean-Jacques Schuhl. Celui-ci lui avait offert les œuvres complètes de Jacques Rigaud qui venaient de paraître chez Gallimard. Jean-Noël Picq dit qu'il "ne parlait pas de ses lectures, jamais. Il fallait que ça passe vraiment par la sève de la subjectivité, par l'obsession personnelle. Jamais on ne peut l'avoir pris en flagrant délit de lourdeur intellectuelle. Il préférait même parfois jouer la débilité." Eustache rejetait l'approche critique, l'analyse littéraire à la manière de Sainte-Beuve ou des structuralistes. Sartre ne fut pas épargné puisque Alexandre et Charles déclarent dans La Maman et la Putain que celui-ci tient des propos d'ivrogne dans les bars.
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La Maman et la Putain, 111e minute, appartement de Marie, au lendemain d'une nuit d'amour entre Véronika et Alexandre. Le jeune homme, tendant entre ses deux mains une couverture et un drap superposés, se laisse tomber de tout son long sur le matelas.
Véronika : "Quelle drôle de façon de faire un lit !"
Alexandre : "J'ai vu faire ça dans un film. Les films ça sert à ça, à apprendre à vivre, à apprendre à faire un lit."
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La Closerie des Lilas est un ancien relais de poste qui, en 1847, se transforme en guinguette aux tonnelles fleuries (de lilas principalement). Elle contribue à faire la réputation du quartier Montparnasse car elle accueille tout ce que la capitale compte de créateurs, d'artistes, d'intellectuels. Zola y entraîne son ami Cézanne et y retrouve Théophile Gautier accompagné des frères Goncourt. Fin du XIXe, l'endroit devient mythique : sur la terrasse, on croise par exemple Paul Fort en train de jouer aux échecs avec Lénine; les poètes s'y pressent (Apollinaire en tête) et les mardis de La Closerie deviennent le "rendez-vous international de la pensée". En 1922, une dispute éclate entre Tristan Tzara et André Breton et marque la fin du mouvement dadaïste à Paris : le lieu devient alors la scène de séparations et de rencontres inédites. Modigliani, Aragon, Sartre, Eluard, Beckett, Dali, Sagan, Gréco, Gainsbourg et tant d'autres s'y retrouvent, s'y succèdent. Aujourd'hui, à titre d'hommage, "leur" table est ainsi estampillée d'une plaque à leur nom.
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L'école n'a rien appris à Jean Eustache, et il le lui rend bien : il n'a jamais passé son bac, est toujours resté très discret sur cette période de sa vie, et n'a pas filmé l'intérieur d'une classe, même dans le film autobiographique sur son adolescence, Mes petites amoureuses, où l'apprentissage est littéralement déplacé. Daniel, le jeune héros du film, apprend à regarder dans la rue, à voir sur la promenade, à parler au café, à embrasser au cinéma, apprend la vie dans la vie elle-même. Même l'alphabet, il le récite, mal, à un homme (joué par Maurice Pialat, autre cinéaste autodidacte) hors de toute institution scolaire. Eustache a très tôt choisi de vivre ailleurs.
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