Alto Braco...
Inutile de préciser qu'en Aveyron, ce titre a fait grand bruit dès sa sortie. "Tiens, un roman qui parle de l'Aubrac, écrit par une parisienne et, surtout, qui passe à la radio ..." Voilà de quoi attiser les esprits aveyronnais, un poil "chauvin" qui se sont rués sur
Alto Braco.
Etant aveyronnais, je dois avouer que j'ai été également plutôt curieux par la réception positive critique et publique de ce titre du coup, il fallait bien le lire. Je n'ai pas été déçu. Je ne suis pas du tout issu de l'Aubrac mais il faut avouer que Vanesse Bamberger brosse un tableau à la fois rude et poétique de cette terre le tout à travers un portrait familial des plus réussie.
Alto Braco est tout simplement le récit d'un retour aux origines, c'est un roman personnel, presque de l'autoficition dans laquelle Bamberger dresse un éloge parfois doux, parfois amer de ces racines aveyronnaises ou plutôt aubracoises !
Vanessa Bamberger délivre une écriture délicate, à la fois simple et doucement poétique, une sorte de petite brise qui anime l'Aubrac sans trop de fioritures.
Ce que j'ai beaucoup aimé dans ce roman, c'est sa légèreté. Que ce soit au niveau du style, ou au niveau du découpage des chapitres plutôt courts, ce roman nous transmet un retour aux origines avec suffisamment de délicatesse pour être enivrant et suffisamment de force pour être pragmatique mais sans aucun effet de remplissage.
Ainsi l'Aubrac est décrit comme une terre particulière, un paysage presque exotique, doté d'un certain "tempérament" naturelle. On ressent bien l'attachement qu'à ressentie l'auteure pour cette environnement indomptable et bien affirmé.
De plus, Bamberger évite judicieusement tous les clichés de la " parisienne qui découvre un autre monde " , elle confronte cette rencontre avec réalisme , avec également un certain humour mais un humour qui est avant tout défini par le caractère des deux grands-mère de Brune, le personnage principal.
Car, si il y a bien une force qui transcende celle du paysage, celle du lieu des origines, c'est la force suscitée par ces deux grands-mères Douce et Annie dite Granita.
Pour rappel, le roman est centré sur le personnage de Brune qui, avec sa grande-tante Annie, vont accompagner le cercueil de sa grand-mère Douce pour la ramener en Aubrac. C'est une intrigue toute simple qui est magnifiée par ce rapport avec la famille à travers les portraits de Douce et Annie, deux soeurs qui ont dû quitter l'Aubrac pour ouvrir un café sur Paris comme beaucoup d'aveyronnais d'ailleurs. Chacune des deux grands-mères possèdent son caractère, excentrique, douce et joviale pour l'une, autoritaire, cassante et moqueuse pour l'autre. Elles incarnent deux reflets qui vont parfaire le personnage de Brune. Ce sont deux personnalités qui se fondent jusque dans l'écriture même du roman, tantôt délicate dans ses instances descriptives tantôt intenses dans ses scènes dramatiques ou dans son réalisme. A travers ces portraits, ce n'est ni plus ni moins qu'un hommage à ces femmes fortes qui ont su s'imposer dans des périodes difficiles. C'est peut-être un peu naïf comme remarque mais il y a vraiment un respect inébranlable pour elles.
Si il y a bien une autre qualité que nous pouvons donner à ce livre, c'est que c'est tout simplement une agréable mine d'informations sur l'élevage et ses différentes facettes. D'ailleurs, Vanesse Bamberger remercie
Daniel Crozes, l'un des auteurs aveyronnais les plus prolifiques, qui a beaucoup écrit sur l'Aveyron et notamment sur l'Aubrac.
Il y a un souci du détail et de l'attachement entre l'éleveur et le bétail qui est juste passionnant avec une réflexion lucide et tout en nuance dans le domaine de l'éthique et de l'alimentation. C'est remarquable.
On retrouve cette qualité de recherche dans les descriptions du paysage de l'Aubrac. Ce roman n'est pas seulement un retour à la source personnel et intimiste, c'est aussi une vision fort bien documentée de cette même source.
Je glisserais un petit bémol sur un certain rebondissement dramatique qui casse un peu le ton du récit, le transformant en l'espace de quelques secondes en intrigue un peu pathétique ou convenue
la révélation autour du père mais honnêtement, ça ne gâche rien.
Attachant dans sa vision de l'Aubrac, sublimé par ses relations familiales avec le portrait ces remarquables grands-mères,
Vanessa Bamberger délivre un retour au source intimiste tout simplement enivrant. L'auteure ne se perd pas dans un faux romantisme mais dépeint son roman avec une belle lucidité assortie avec une pointe de délicatesse poétique.
Une petite bouffée d'air frais ne fait jamais de mal.