Citations sur Les bottes rouges (33)
Regarder pousser les flaques d'eau dans la rue est une occupation importante, essentielle, quand on aime les flaques d'eau.
Elle avait le regard fixe des gens qui ont l'habitude d'avoir raison.
...il y avait une cérémonie officielle, ouverte au public, le soir même, au musée municipal. Avec récital de poésie. Et audition du chanteur allumé local : ce chanteur émotif qu'on retrouve dans toutes les villes dignes de ce nom et qui chiade du Baudelaire, du Rimbaud, du Verlaine et du Villon en cassant des cordes à sa guitare. Le nôtre s'appelait James Blouque.
Elle croyait détecter en moi un "journaliste de ses fesses". C'était désobligeant, car le journalisme se sent de toutes les fesses et pas d'une paire en particulier.
Si les femmes nous quittent, c'est qu'elles ont trouvé mieux que nous. On n'est jamais le meilleur, même pour la dernière des femmes. La réciproque se défend aussi. On ne s'impose jamais longtemps à un cœur qui s'ennuie. Il faut laisser filer.
Mourir d'amour est une chose magnifique, grandiose, cinématographique, quoique nuisible à la santé. La littérature, le privent pas de donner un avenir à ces théâtre, ces arts qui se nourrissent de singularités, ne se fins superbes, dont la raison montrerait pourtant facilement l'obscénité. L'homme du commun parle, pleure, vomit et survit. C'et une victoire éclatante de la lâcheté sur l'esthétisme. Il faut avoir le courage d'être modeste, d'être une personne plutôt qu'un personnage (...).
Le contexte : Un spectacle de théâtre municipal vient d'être annulé..
" C'est un malheur ! dit le maire.
- Un malheur ", reprirent les adjoints en hochant la tête, hochement entendu, auquel l'adjoint en charge de la culture ajouta un froncement de sourcils destiné à marquer qu'il était préoccupé.
Les adjoints en charge de la culture sont toujours préoccupés. La culture est préoccupante. Dès qu'on aborde l'essentiel et l'identitaire, le souci pointe son museau aristotélicien.
"Voilà comment le plaisir intellectuel longuement attendu fait faux bond à ses disciples fidèles au rendez-vous du savoir et de la connaissance ! dit d'une seule traite le président du conseil général en imprimant au verre qu'il tenait par le pied un mouvement giratoire si régulier qu'il trahissait une pratique assidue de la convivialité."
(J'ouvre une parenthèse ici, non pour me justifier, mais parce que je pense que l'emploi insistant d'un langage brut et malgracieux peut apparaître comme une facilité et choquer les esprits nobles qui se seraient égarés dans cet ouvrage. Personnellement, je ne me priverais guère en censurant ces pages de tout ce qu'elles contiennent de minauderies alvines et de références rectales. Et si, à ce qu'on raconte, il y a de la chance à marcher dans une laissée - l'homme étant un loup pour l'homme - , je ne sens pas le plaisir qu'il y aurait de tremper sa plume dans un pot de chambre. Seule la vérité des faits et des paroles me guide. Ce qui fut dit est écrit, scrupuleusement. Tant pis si cela va par le bas.)
J'ai toujours aimé éplucher les pommes de terre. C'est mon zen. Il y a un plaisir apaisant dans cet ensmble de gestes utiles qu'on définit trop vite comme une corvée. Il ne fait aucun doute pour moi que la pomme de terre est un légume métaphysique. Dieu se mettrait-il dans l'idée de vouloir exister, ce serait sous la forme indéniable d'une pomme de terre qu'il se manifesterait. Ce ne sont pas des choses à soutenir devant n'importe qui, j'en ai conscience.
Les journées de grosses pluies sont pour moi un régal. Je me protège volontiers du soleil, mais dès qu'il pleut, j'ouvre les fenêtres. Une espèce de
brume flotte entre le sec de la pièce dans laquelle je travaille et le mouillé de la rue où, tout d'un coup, personne ne trouve plus rien à faire.