J'ai été glacée en lisant les premières pages de
Cadavre exquis.
Une Grande Guerre Bactériologique (GGB) a eu lieu et il n'a plus été possible de manger des animaux car ils avaient contracté un virus mortel. Des scientifiques ont créé une nouvelle race à partir de génomes humains, qui servira de bétail. Carlos Tejo, bras droit des abattoirs Krieg, lors de son travail, doit visiter les élevages, les tanneries, les boucheries...
Les descriptions sont vraiment horrifiantes, parfois à la limite du soutenable. J'ai parfois dû m'obliger à poursuivre ma lecture tant il y avait de cruauté et d'inhumanité dans les pratiques. Et voilà qu'un élément nouveau survient lorsqu'un éleveur fait cadeau à Tejo d'une femelle...
Ce premier roman de l'auteure argentine
Agustina Bazterrica m'a obligée à sortir de ma zone de confort. C'est un roman fortement déstabilisant qui montre d'une part, que les hommes de pouvoir peuvent parvenir quasiment à tout, nous manipuler avec de fausses études, de fausses informations et l'appui de scientifiques soudoyés et arriver à faire taire les foyers de protestation. D'autre part, ce roman de science-fiction n'est autre qu'une caricature géante de ce que l'homme, depuis des décennies fait subir aux autres animaux. Je ne suis pas végane, seulement flexitarienne et en lisant ce livre, je revoyais les étals de viande dans les supermarchés, les expériences récentes avec les vaches à hublot ou les terribles conditions d'abattage dévoilées par l'association l'214.
Les descriptions faites par l'auteure sont effroyables et, à mon avis, prennent trop de place dans le roman et sont exagérément gores, un peu moins aurait suffi à rendre compte.
Par bonheur, le personnage de Tejo, homme malheureux, décrit ainsi " Un type dont le bébé est mort et qui se traîne dans la vie avec un grand trou dans la poitrine. Un type marié à une femme détruite. Son boulot consiste à abattre des humains pour subvenir aux besoins de son père dément qui est enfermé dans une maison de retraite et qui ne le reconnaît même plus " apporte une note "humaine", non dénuée de poésie. J'ai été très sensible aux évocations de son enfance avec son père, au zoo; cet amour filial est abordé à plusieurs reprises. de même, lorsque Tejo s'éprend peu à peu de cette femelle Première génération et va petit à petit, à l'insu de tous, en prenant des risques énormes, la traiter comme un être humain.
Le suspense va aller crescendo dans les derniers chapitres jusqu'au dernier paragraphe et à la dernière phrase qui m'a laissée pantelante ! Impossible de sortir indemne de ce bouquin qui m'a parfois fait penser à l'excellent
Défaite des maîtres et possesseurs de
Vincent Message (Prix Orange 2016).
Le gros reproche, et pas des moindres, que je lui fais, ce sont ces trop nombreuses scènes trash qui risquent d'indisposer pas mal de lecteurs et leur faire stopper leur lecture avant la fin, ce qui serait dommage. Ma conclusion sera donc : "âmes sensibles, s'abstenir"...
NB : Une mention particulière pour la couverture : son originalité, la photo et les teintes choisies résument bien ce roman de SF.
Livre lu dans le cadre des Explorateurs de la rentrée littéraire 2019 de Lecteurs.com.
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