Citations sur L'Amour (80)
"Le chien qui a senti le gigot gratte à la porte. Il crotte le sol avec ses pattes pleines de terre.
- Où c'est que t'as traîné encore ?
Le cocker ne répond pas. Le lieu où il est encore allé traîner restera secret."
Ils couchaient ensemble comme ça de temps en temps, quand ça les prenait. (...)
— Ça s’est terminé quand je suis entrée chez Michelin.
— T’aurais continué si t’y étais pas entrée ?
— On peut pas savoir.
— T’aurais continué ou pas ?
— On peut pas savoir.
Déjà qu’on n’en sait pas beaucoup sur ce qui se passe, comment veux-tu en savoir sur ce qui se passe pas.
Qu'est-ce qu’il emporterait sur une île déserte ? Sa femme, pour la lessive. Qu'est-ce qu'elle n'oubliera jamais d'emmener en vacances ? Son mari, pour le noyer.
(p.74)
Ce serait rigolo qu’un soir, juste un soir, ils échangent leurs personnalités. Il ferait les blagues et Frédéric se marrerait. Il aborderait les filles et Frédéric compterait les points. Et puis du même coup il pourrait conduire. À son quatrième examen d’auto-école, il a encore perdu ses moyens, alors qu’avec son père le dimanche sur l’ancienne route de Bressuire, ça roule tout seul. À l’école c’était la même histoire, la poésie qu’il récitait peinard à sa mère lui restait coincée dans le plexus une fois devant la classe.
L'amour prend patience, l'amour rend service, l'amour ne jalouse pas. Il ne s'emporte pas. Il n'entretient pas de rancune. Il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai. Il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout, l'amour ne passera jamais.
(p.75)
Jacques est capable de consacrer la moitié de ses nuits à se balader sur le site Galaxium, comme il peut se passer dix fois une vidéo pédagogique sur les étoiles mortes. Que des étoiles puissent mourir, qu’elles continuent à briller une fois mortes, ça ne cessera de le perturber que lorsqu’il se fichera de tout. Connaître la cause rationnelle du phénomène n’y change rien. C’est comme l’organisation millimétrée des abeilles de son neveu qui a pris trois ruches l’an dernier. Il y a des choses comme ça plus on en sait plus c’est mystérieux.
Quand Jeanne n’est pas plongée dans un Télé 7 Jeux, elle écoute des chansons en triant les cartes postales qu’elle collectionne. Si elle veut mettre Véronique Sanson dont les bêlements insupportent Jacques, elle branche le casque sur le radiocassette Toshiba, ou bientôt s’allongera sur le lit, discman posé sur le ventre.
À la sortie de l’école d’ingénieurs, Daniel pensait s’orienter vers l’aménagement du territoire, mais s’est ravisé par pragmatisme. Les gisements d’emploi sont dans l’informatique, récite-t-il un samedi à ceux qu’il appelle ses renps. Jeanne veut bien le croire, dans les bureaux de l’usine on compte maintenant un ordinateur par tête. Daniel encourage son père à en prendre un, il gagnera un temps fou pour sa comptabilité qui le rend chèvre. Jacques ne ferme pas la porte, mais il se passe quoi si ça tombe en panne ? Il se passe quoi si ça déraille le 1er janvier prochain comme certains le prédisent ?
Jacques énerve Jeanne à mettre des cornichons avec tout, à manger la peau du saucisson sec, à remettre un tee-shirt sale, à pas couvrir son crâne d’œuf à la plage, à laisser un rhume traîner plutôt que de prendre des antibiotiques, à dire un espèce de , à dire il mouille plutôt qu’il pleut, à dire car pour bus, à se moucher dans du Sopalin, à se tenir les mains sur les hanches que ça fait ressortir sa bedaine, à lancer les grillades de barbecue trop tôt, à laisser Bill entrer dans la salle d’eau, à piétiner dans la cuisine alors qu’il n’a rien à y faire puisque monsieur n’en fout pas une.
Au boulot, il n'est pas rare qu'une copine raconte qu'elle s'en est pris une. En attaquant le reblochon, Frédéric admet qu'il est parfois un peu brutal.
-Brutal comment ?
-Brutal normal.
-C'est pas normal de taper.
-C'est pas toi qui vis avec.
Jeanne regarde Jacques qui ne dit rien.
(p.59)