La dernière fois
La dernière fois que l’on s’éloigne d’un être aimé. Cette dernière fois. Toutes ces dernières fois. Toutes ces dernières fois comme autant de paysages éclipsés furtivement derrière la vitre d’un train. La dernière fois que notre cœur bat avec ivresse, avec gaieté, avec nonchalance. La dernière fois que notre peau ressent une présence dévouée. La dernière fois que les yeux vides regardent le téléphone puis l’horloge. La dernière fois que le front de l’homme seul salue la foule. La dernière fois que le front de l’homme seul embrasse l’océan. Calmement, avec certitude et résignation, il faut bien lutter contre les paroles que nous commettons, contre les actes que nous confessons et qui ne nous appartiennent pas et qui occupent illégitimement notre cœur. Il faut parfois beaucoup de temps pour puiser au fond de soi, tout au fond de ses expériences et de sa volonté nouvelle pour se confronter à ses pulsions capricieuses, spontanées et ravageuses qui font le chemin vers lequel nous nous dirigeons et que nous voulons éviter. Peut-on appeler raison ce qui déborde du cœur ? Non ! N’est ce pas, à l’inverse, ce qui déborde de la raison que l’on pourrait appeler foi ou folie ? Ce qui déborde du cœur s’appelle foi ou désespoir. C’est avec la foi ou l’énergie du désespoir que l’on peut, seul, enfin refuser la fatalité de nos actions. Ce qui est dur, c’est de chaque jour, chaque nuit, poursuive le chemin de sa volonté nouvelle et ce malgré la tentation de retourner à l’autre. Voir l’autre, ne pas le voir, ne pas l’appeler, ne pas répondre, penser à lui, essayer de ne pas penser à lui...ce qui est encore penser à lui... Se souvenir, ne plus se souvenir. Le drame lorsqu’on rencontre l’amour, ce sera toujours de le perdre un jour.
Lecture du poème "Désordre amoureux"de David R Belair