Citations sur Fées, weed & guillotines (40)
Chacun des membres du trio a marqué un temps d’arrêt. Le silence s’arroge quelques secondes, laissant aux sourcils le soin d’exprimer d’une danse fébrile leur étonnement. Puis, les langues finissent par se délier. Et les mots sont simples. La grandeur de la scène appelle à la sobriété.
Étienne : « Le château de Barbie ! »
Premier de la classe : « Disneyland ! »
Myosotelle : « Le Grand Krak Réginal de Zongalonia ! »
À chacun ses références culturelles...
Et Myosotelle d’enchaîner, parée d’une expression de mépris : « Elles manquent pas d’air, ces trois putes ! Reproduire à l’identique le château de la Reine... Dans ce monde pouilleux. Quel foutre affront ! »
(...)
Marc-Aurèle et Étienne, eux, se sont dissimulés l’un dans l’escalier qui s’élève vers les éminences du donjon, l’autre dans l’armoire (le subterfuge a paru un peu léger, mais Zhellébore a assuré que le nuiton s’y laisserait prendre ; n’ayant pas la capacité à sentir à distance les humains et ne se méfiant que modérément des armoires).
Abjecte saloperie, infâme nuisible, souillure immonde ! Je te le promets, un jour nous lui mettrons le compteur de ses prétentions à zéro, nous lui sculpterons les bas-reliefs du tympan de Notre-Dame à coup de genoux dans sa dentition de larve ambulante. Nous l’écorcherons vif devant les membres débiles de son clan, nous l’étriperons, nous en ferons de la charpie, de la bouillie, que ses petits camarades comprennent qu’il existe des choses sacrées, et que les fées en font partie. Notre vengeance sera aussi belle qu’était notre amitié ! Parole de fée !
- (...) On a retrouvé plus de dix mille euros en petites coupures. Et une vingtaine de saladiers remplis à ras bord de pierres précieuses. Plus un kilo de ganga environ, qui tient plus du foin que de la skunk.
Marc-Aurèle souffle d’étonnement, délaissant à son tour son assiette. « Merde, un dealer pré-juvénile... Ça sent l’affaire qui va te faire galérer des mois. »
- Attends, c’est pas tout. Dans une des pièces, on a découvert trois cages en métal. Et devine ce qu’il y avait dedans ?
- Les cadavres de ses parents, frères, oncles, tantes, cousins...
- Perdu ! Trois vieilles. Vivantes. Un peu pâlottes, vu que le môme semblait pas passionné par l’élevage de mamies. Mais rien de terrible.
- Merde. Le conflit entre génération prend un tour nouveau.
(...)
« Asseyez-vous, vous semblez essoufflée.
- Je vous semble ? Douze étages... Faut avoir un grain pour construire des édifices aussi hauts... Ça tient de la démence.
- Ne me dites pas que vous êtes montée à pied...
- Bien sûr que je suis montée à pied. Vous avez une meilleure solution ?
- L’ascenseur...
- Connaît pas. »
C’est original, se dit le détective pendant que sa cliente s’assoit. Elle vient de s’échapper d’une secte de quakers coupée du monde depuis l’appareillage du Mayflower ?
Trois lutins dans un couffin
Trois couffins chez Dam’ Marmite
Crêpe aux yeux et soupe aux nains
Le plus gras sent bon la frite.
Vous êtes siphonnée. Je ne peux pas faire ça.
- Vous avez intérêt parce que moi, avec ces menottes, je peux même pas distribuer des baffes.
- Euh... Entre la baffe et l'homicide, il y a peut être une légère marge de manœuvre qu'on pourrait prendre en considération ?
- Vous avez peur de quoi là ? Vous êtes pas à la hauteur?...
Les hommes ont un roi… Pourquoi pas. Les fées ont bien une reine… C’est tout aussi ridicule. Pourquoi un seul être serait-il plus à même de guider un peuple? Nous, nuitons, n’avons ni roi ni reine. C’est l’effort conjoint qui fait fait la force du Clan. C’est la mise en commun d’idées qui permet d’améliorer notre condition, d’optimiser les chasses, de réunir les plus prestigieux Trophées. Attendre d’une seule personne tout ce que la subtilité, l’intelligence, l’expérience collective apportent est parfaitement illusoire. Quel concept aberrant…
Dans l’appartement règnent un silence pesant, une vibration oppressante de l’air. Ni Marc-Aurèle ni Etienne ne sauraient mettre un mot sur le malaise qui les saisit. Peut-être que le lieu n’est pas feng shui, ou un autre délire ésotérique du cru. Jaspucine, elle, sans s’embarrasser de pertinence sémantique, leur livre la solution :
« Ça pue le nuiton, ici. »
Apparemment, le pseudo-môme pourrit littéralement l’atmosphère.
Mourir le premier avec beaucoup d’honneur ne s’est jamais prouvé bien efficace, surtout quand on représente l’intégralité de son armée.