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Citations sur L'enfant d'octobre (17)

On ne remplace pas si facilement celui qui est parti, on n'en finit jamais avec ses morts.
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On peut vivre longtemps avec le chagrin. Il suffit de se forcer.
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Je ne sentais plus mes jambes, je me suis mise à pleurer, c'étaient des larmes énormes, vous ne pouvez pas savoir, une digue qui cède, je voyais les gendarmes derrière les larmes, penauds, ils étaient flous. Combien de temps j'ai pleuré, je ne sais pas le dire, combien de temps ça a duré, cette débâcle, cette désolation, je ne sais pas. J'ai crié aussi, comme le font certains animaux, les nerfs ont lâché, il a fallu appeler le docteur, il m'a donné des tranquillisants, ça m'a assommée mais le désespoir n'est pas parti. Si le malheur ressemble à quelque chose, c'est à cet écrasement, et aussi cette perte de contrôle, l'impression de valdinguer, et de pouvoir rien faire pour que ça s'arrête. Je dénie aux gens qui ne sont pas capables d'approcher ce malheur-là le droit de me juger.
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Une mère qui perd son enfant c'est la cruauté inégalable. Une calamité sans équivalent. Une mère cassée en deux devant le cercueil de son fils, c'est un spectacle intolérable. Cette mère-là, elle a pour elle la compassion de l'humanité entière, la solidarité du monde, elle porte avec elle le chagrin universel. En ce 20 octobre, Christine Villemin est la femme la plus plainte de France, nul ne suscite davantage d'apitoiement, elle est écrasée par une sympathie sans retenue. On la regarde, et on est soi-même emporté par l'émotion, submergé par la tristesse. On voudrait partager son deuil mais c'est illusion : là où elle se trouve, elle est hors d'atteinte. On voudrait soulager sa peine mais c'est impossible : elle ne se délestera pas de sitôt de sa douleur. La catastrophe qu'elle a à connaître, chacun redoute de la subir un jour. On ne voudrait pas être à sa place, alors on la soutient dans les larmes, comme pour se faire pardonner d'avoir été épargné. Christine Villemin, en ce 20 octobre, est une martyre inattaquable. Ça ne durera pas.
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Cependant, dans le cas de Grégory Villemin, la médiatisation atteint des proportions hors norme. C'est que tous les ingrédients d'une tragédie sont réunis : une province rance, moisie, un automne désolé, un petit monde gangrené par les rivalités, un corbeau insolent, une famille détraquée, un père sanguin, une jeune mère éplorée, un crime aux allures de rituel, des investigations bâclées, des policiers rapidement dépassés, des suspects successifs, des aveux et des rétractations, des coups de théâtre et des baudruches qui se dégonflent, des renversements de situations ou d'alliances, un juge ballotté, des innocents au regard coupable, des accusés relâchés, des trahisons imprévues et des fidélités inexpugnables, et, à la fin, une énigme irrésolue.
La presse, s'engouffrant dans les carences de l'enquête et l'épaisseur du mystère, tour à tour fabrique ou suit l'opinion : les Français se passionnent, réclament un coupable, une sentence exemplaire mais, sans le reconnaître, ne sont pas mécontents que le suspense dure.
Les journalistes et les photographes n'y vont pas de main morte. Ils se déplacent en meute, scrutent les visages, épient les faits et gestes, montent en épingle la moindre information sans prendre le temps de la démentir par la suite lors- qu'elle se révèle inexacte, jettent sur la place publique ce qui relève du secret de l'instruction, déballent les anciennes histoires, violent les intimités, recueillent les confessions pour les étaler à la une, échafaudent les hypothèses les plus farfelues, ne se privent pas de désigner des coupables dès que les investigations traînent, changent de camp lorsque le vent tourne, n'hésitent pas à maltraiter la vérité puisqu'il semble qu'on ne l'a connaîtra jamais.
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Les Villemin n'échappent pas à la fatalité de la région, où on arrange des fiançailles, où on organise des alliances, où on se marie entre soi, où on se reproduit sans compter. Toute cette promiscuité provoque parfois des accouplements incestueux, invente des cousinages, et on finit par se perdre dans les dédales, les méandres.
Christine, ça ne la choque pas particulièrement, l'étrangeté des liens, la bizarrerie des autochtones. Elle a grandi dans le coin, elle ne connaît pas autre chose, elle n'a même pas eu besoin de s'habituer. C'est là, depuis le début, depuis avant qu'elle vienne au monde. Ça sera là encore après elle, à coup sûr. Dans le pays, les seuls à qui on ne se mélange pas, c'est les étrangers. On ne les aime pas beaucoup, les étrangers.
On ne s'aime pas beaucoup entre soi non plus, il faut bien en convenir. Les calomnies, les insinuations, les secrets d'alcôves, les antipathies qui macèrent, c'est monnaie courante. Il n'est pas rare de se disputer, de se brouiller, pour un rien, de se jalouser. Mais enfin, au moins, on est entre soi. On lave son linge sale en famille.
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Si le malheur ressemble à quelque chose, c'est à cet écrasement, et aussi à cette perte de contrôle, l'impression de valdinguer, et de pouvoir rien faire pour que ça s'arrête. Je dénie aux gens qui ne sont pas capables d'approcher ce malheur-là le droit de me juger.
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Dès le commencement, la presse, la télévision, la radio se sont intéressées à l'affaire. La mort tragique d'un enfant, cela frappe l'opinion qui communie aussitôt, par réflexe, avec la famille supliciée et, dans le même temps, entend en savoir davantage. Nous sommes ainsi faits : nous ralentissons sur le bord des routes lorsque vient de se produire un accident. Notre désir, en cet instant, est moins de secourir les victimes - il se trouvera toujours des gens formés à cela pour le faire - mais de voir la tête qu'elles ont, ces victimes, et espérer qu'un peu de sang ait coulé sur la chaussée, entre les bris de glace ou le long de la tôle froissée. Les médias se contentent, c'est bien connu, de satisfaire notre morbide curiosité, notre goût pour les histoires qui finissent mal, notre inclination pour le drame.
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On n'a pas le droit d'infliger une telle humiliation à quelqu'un si on n'est pas absolument sûr que c'est un criminel.
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C'est quoi avoir dix-huit ans, dans ces Vosges suppliciées, au creux d'une vallée saignée, à la fin des années Giscard, tandis que ferment les usines et qu'agonise un régime à la dérive? Oui, c'est quoi, au juste, quand la montagne est une frontière, le travail à la chaîne un horizon, et que l'hiver revient dès le mois de septembre? C'est rien. Rien que l'ennui, la résignation, une sorte de langueur qui suinte, une neurasthénie. Ce sont des heures asservies, l'attente d'un mieux informulable et qui ne se produira pas, l'espérance qui recule le temps qui passe et compte double, un peu de sueur qui perle au front et quelques illusions à perdre.
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