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Un roman jubilatoire...
Je remercie Babelio et les Editions Aux Forges de Vulcain pour cette magnifique découverte. Comment se fait-il, d'ailleurs, qu'il ait fallu attendre aussi longtemps pour que ce roman fantastique, publié en 1836 et tenu en haute estime par Edgar Poe, soit traduit en France ?
Le narrateur, Sheppard Lee, " modeste fermier ruiné pour cause de flemmingite aiguë " (Jeinus), se découvre un pouvoir singulier : il peut se réincarner, s'il le souhaite intensément, dans le corps de personnes qui viennent de mourir.
Il se livre donc à une frénésie de réincarnations dans sa quête du bonheur parfait et devient donc successivement un riche campagnard, un jeune dandy coureur de dot, un usurier au coeur de pierre, un esclave noir... Mais, hélas, il endure moult tribulations et avanies qui le font vite déchanter : Bird fait une satire au vitriol de la société américaine du début du XIXème siècle dont il dénonce les travers avec beaucoup d'humour et de férocité.
Mais cette satire sociale aux multiples rebondissements, ce roman d'aventures aux accents picaresques, est aussi un conte philosophique au plein sens du terme. Quand il se réincarne, Sheppard Lee oublie pratiquement ses anciennes existences et acquiert le caractère, les sentiments, les motivations de son nouvel hôte : il y a non seulement transfert, mais aussi altération de personnalité, JE devient un autre, pour parodier la belle formule qu'emploie Arthur Rimbaud dans la fameuse lettre du Voyant, "JE est un autre".
"Sheppard Lee" nous invite à réfléchir sur ce que nous sommes, ce que sont les autres et ce que nous aurions pu être, sur l'identité, le déterminisme et le bonheur, et il nous transmet une belle leçon de sagesse.
Ajoutons que ce roman est magnifiquement écrit (et traduit par Antoine Traisnel, qui s'est en plus acquitté d'une postface particulièrement intéressante).
Récit fantastique, roman d'aventures, satire sociale, conte philosophique, "Sheppard Lee" est un roman total et jubilatoire, assurément le premier grand roman de la littérature américaine.
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Dans ce roman fantastique du XIXème siècle, un jeune homme, Sheppard Lee, pauvre, nonchalant et insatisfait de sa condition, découvre tout à coup le pouvoir de migrer de corps en corps, d'un homme riche à un pauvre hère, d'un avaricieux à un esclave, entre autres.
Mais il trouve des désavantages à toutes ces situations, quelles qu'elles soient.
Ce livre est vraiment le fruit de son époque : les femmes y sont malmenées, déconsidérées, la plupart traitées en mégères et aucune ne sert à la réincarnation de Sheppard. La morale édifiante est très présente à la fin.
Bon, me direz-vous, ce n'est en l'occurrence fort peu moral de tant critiquer un auteur qui ne peut plus se défendre.
Pour redresser ses torts, je dirai aussi qu'il peut être tout de même comparé à Edgar Allan Poe.

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C'est suite à l'excellente critique de thimiroi que j'ai voulu découvrir «Sheppard Lee» de Robert Montgomery Bird, roman de science-fiction américain, paru en 1836, et qui fut salué par Edgar Allan Poe à l'époque.

C'est un récit fantastique où Sheppard Lee, fermier du New Jersey ruiné car peu courageux face au travail, raconte au lecteur une aventure extraordinaire qui lui est arrivée.
En effet, suite à un accident malheureux qui lui coûte la vie, il se découvre la capacité d'intégrer son âme dans un cadavre, du moment que le décès de ce dernier soit récent. Cela l'arrange bien car il se considère comme le plus malheureux des hommes et est convaincu que la vie d'un autre est forcément meilleure.
Grâce à ce don, il va pouvoir se mettre alors successivement dans la peau d'un marchand bourgeois, d'un dandy fauché, d'un usurier, d'un quaker philanthrope ou encore d'un esclave noir... et se rendre compte que la vie des autres n'est pas forcément facile non plus.

Au-delà de l'histoire qui nous plonge avec plaisir dans les diverses mésaventures de notre antihéros, les différentes personnalités qu'il va incarner nous offrent une photographie épatante de l'Amérique du début du 19ème siècle.
C'est l'occasion pour l'auteur de critiquer et philosopher sur divers aspects de la société américaine : le rapport à l'argent, le mariage, la politique... mais également sur les sciences de l'époque (je pense à la médecine et à certaines maladies évoquées) ou encore l'économie... et tout cela servi avec un humour léger mais délicieux.

A noter une postface du traducteur Antoine Tresnel que j'ai trouvé fort instructive sur le contenu de ce chef-d'oeuvre.
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Robert Montgomery Bird est un auteur américain contemporain d'Herman Melville et d'Edgar Allan Poe. Ce livre a été publié aux Etats Unis en 1836 et les éditions Aux Forges de Vulcain ont eu la grande idée de le traduire en français en 2017. Grande idée car ce livre, considéré outre Atlantique comme un classique de la littérature américaine, est une véritable pépite.

Sheppard Lee est un jeune fermier endetté jusqu'au cou en raison de sa nonchalance et de sa paresse chronique. Jugeant sa destinée trop dure, il n'aspire qu'à fuir ses problèmes et sa condition. C'est alors qu'il découvre par accident sa capacité à prendre possession de corps de personnes fraichement passées de vie à trépas. Commence alors une succession de métamorphoses. Toujours persuadé que l'herbe sera plus verte dans un nouveau corps, Sheppard Lee devient tour à tour marchand bourgeois, riche planteur, dandy fauché, prêteur sur gage cupide, quaker philanthrope, esclave noir. En rentrant dans la peau de ces différentes personnalités, il se retrouve également affublé de leurs caractères, leurs goûts, leurs opinions. A chaque nouvelle transformation, c'est une nouvelle vision de la société américaine qui nous est offerte.

Dans ce récit rocambolesque, teinté d'une bonne dose d'humour, notre anti héros picaresque alterne les surprises et les déconvenues et on traverse avec lui l'Amérique du 19ème.
Une satyre des Etats Unis, une vigoureuse étude de moeurs, à mourir de rire et terriblement moderne.

Traduit par Antoine Traisnel
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Sheppard Lee, le narrateur et personnage principal de ce roman, est un jeune fermier du New Jersey au XIXe siècle. Son père, homme sagace et industrieux, a su tirer parti de son maigre patrimoine et, si le fils avait été pour moitié aussi travailleur, ce dernier aurait pu vivre dans une relative aisance. Cependant, Sheppard est un homme dolent et mal dégrossi, le genre à n'être jamais satisfait de son sort, tout en ne sachant pas vraiment où il a mal. En cherchant à se distraire et à travailler le moins possible, il gaspille peu à peu son patrimoine et achève de le mettre à mal en tentant de « se refaire » par des moyens tous plus stupides les uns que les autres… Néanmoins, en allant de mal en pis, sa situation va le conduire à la découverte d'un don singulier : Sheppard serait capable de migrer dans n'importe quel cadavre et de faire siens, outre le corps, les souvenirs (avec toutefois un temps d'adaptation) et la personnalité de son hôte. Ainsi, le fermier fainéant et benêt va bondir de vie en vie, mesurant les existences de ses compatriotes à l'aune de la sienne.
Sheppard Lee, écrit par lui-même, est présenté comme les mémoires de son prétendu auteur. Mais un homme qui change de corps comme de chemise et embrasse alors une toute autre personnalité est-il jamais lui-même ? L'identité, par ailleurs totalement assujettie au corps et conditionnant la destinée, semble être la question majeure de ce récit. Pour autant, elle n'en permet pas moins à son auteur une critique sociale acerbe.
Sheppard sera bourgeois puis dandy désargenté, usurier, philanthrope, esclave et riche propriétaire terrien en proie à l'hypocondrie… Au fil de ces rencontres, le lecteur prend la mesure des différences de classes et des drames de chacun de ces personnages, mais Sheppard, lui, ne semble rien apprendre. Pour ce personnage, il s'agit plus d'une fuite en avant que d'une tentative d'amélioration de son existence. Plus il migre d'un corps à l'autre, plus il s'efface dans la personnalité qu'il emprunte. Enfin, jusqu'à un certain point… Celui où il se trouve, une fois de plus, l'être le plus malheureux du monde.
Ce procédé illustre parfaitement une doctrine qui, en substance, nous conte que l'âme est une force de vie sans personnalité, mais que l'esprit, lui, est totalement soumis au vaisseau charnel. Si on peut déplorer ce choix qui entrave le personnage et donc les possibilités de l'histoire, l'auteur a indubitablement su en tirer le meilleur parti.
Par bien des aspects, ce roman est très intéressant et j'ai beaucoup apprécié sa dimension sociétale. Néanmoins, il me faut admettre que ce ne fut pas pour autant une lecture agréable. La narration, qui conte au lieu de montrer — ce qui demeure cependant assez logique dans le contexte —, alourdit le récit, d'autant que Sheppard prend grand plaisir à se répéter. Pour exemple de ses incessants rabâchages, je citerai l'une de ses premières transformations. Afin d'éveiller les souvenirs liés à son nouveau corps, il demande à un ami de lui conter son histoire et, en la retranscrivant (laborieux récit de seconde main… Ou devrais-je dire de seconde voix ?), il se sent obligé de préciser de très nombreuses fois qu'il s'agit de la vie du corps qu'il occupe à ce moment-là. On aurait du mal à ne pas le savoir… Cela m'a souvent agacée en cours de lecture, mais je me dois de reconnaître qu'après avoir tourné la dernière page j'ai pu envisager différemment ces pénibles répétitions. Enfin, cela n'enlève rien au fait que l'on se sent souvent embourbé dans une histoire qui, en majeure partie, n'avance pas, bien qu'elle puisse s'emballer à tout moment et nous offrir alors des passages qui ne dépareraient pas dans un bon roman d'aventures, créant ainsi un certain déséquilibre.
Le récit ne manque pas d'humour, mais s'il est aisé d'apprécier le comique de situation, le sarcasme et l'humour très noir mis en scène, je n'ai sans doute pas toutes les références culturelles, et surtout historiques, relatives aux U.S.A. qui m'auraient permis de l'estimer à sa juste valeur et cela au-delà du seul point de vue humoristique.
Pendant une bonne partie du roman, je me suis demandé quel intérêt il y avait à faire migrer un homme de corps en corps, puisqu'il s'effaçait au profit du précédent occupant de ses corps d'emprunt (notons d'ailleurs qu'il n'est jamais femme). Cela est d'autant plus rageant que Sheppard ne semble pas du tout évoluer ni retenir quoi que ce soit à la fois des situations vécues ou des aptitudes de ses vaisseaux. Toutefois, la fin nous démontre que l'auteur n'a pas fait ces choix sans raison et morale il y a, même si je la trouve très américaine — et un rien chrétienne — par essence. Pas que je sois dubitative sur le fond, mais cela manque un peu de subtilité.
Au final, je dirais qu'entre ce livre et moi la rencontre a failli être totalement ratée. le personnage antipathique et certains chapitres par trop longuets n'ont pas eu raison de ma patience car il y a une vraie réflexion dans cette histoire, même si elle n'est pas suffisamment développée à mon goût. La pointe de fantastique (et je ne me réfère pas ici uniquement à la métempsychose) apporte une touche de fraîcheur et d'insolite qui rend le tout plus ludique. En tout cas, cela m'a plus amusée que les jeux de mots sur les noms des personnages…
Sheppard Lee est donc un ouvrage intéressant, très caustique, oscillant entre le roman d'aventures et le roman de moeurs. Très critique envers l'humanité, voire fataliste par instant, il use des stéréotypes avec intelligence pour peindre les travers d'une époque qui, pour éloignée qu'elle soit, n'en possède pas moins de tristes ressemblances avec la nôtre. En cela, ce roman demeure très actuel.
Lien : http://livropathe.blogspot.f..
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La métempsychose ça vous parle? La transmigration peut-être? Non?
Pour faire simple c'est la croyance selon laquelle une âme, après le décès d'une personne, peut migrer vers un autre corps. Soit. Si les Hindous, les Platoniciens, les Kabbalistes et d'autres y ont cru ou y croit toujours, pourquoi pas après tout?

Robbert Montgomery Bird utilise donc cette croyance pour la transformer en un procédé d'écriture redoutablement efficace.
En effet, le personnage principal de son roman, Sheppard Lee, décède prématurément, et se découvre la capacité pour le moins inédite de pouvoir changer de corps, à condition d'en trouver un autre ayant fraîchement passé l'arme à gauche.

Modeste fermier qui voit ses affaires péricliter et sa rente diminuer à vue d'oeil pour cause de fainéantise aiguë, Sheppard Lee, ou plus justement son âme, entrevoit donc ici la possibilité d'améliorer considérablement sa situation en revêtant le corps d'un gentilhomme qu'il avait auparavant envié.

Au cours de ses différentes réincarnations il sera tour à tour dandy, prêteur sur gage, bourgeois, esclave, ce qui permet à Robert Montgomery Bird de dresser un formidable portrait de la société Américaine du milieu du 19ème siècle où des thèmes comme l'abolitionnisme, la fracture et les privilèges de classes seront très justement dépeints, de même que le thème de l'identité car chacun de ses personnages, tous très différents, nous plongeront dans la tête de ce que pense l'américain moyen, le bourgeois, l'esclave, ect...

Ce qui marque le plus dans ce roman, c'est que la narration s'adapte à la transformation de Sheppard Lee, qui conserve son moi profond tout en accédant à un nouveau corps, ce qui signifie qu'il devra à chaque fois tout réapprendre, ce qui le mettra dans des situations toutes plus rocambolesques les unes que les autres.

Doté d'une dimension picaresque très prégnante, ce récit possède une dimension sociale puissante, qui tout du long conservera son souffle, celui de l'Amérique des pionniers.

#RobertMontgomeryBird #SheppardLee
Merci aux Forges de Vulcain d'éditer pour la première fois en Français ce grand roman!
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Un roman d'aventure américain génial, original, truculant et avant-gardiste.

Une pincée de science fiction, de conte et de quête de soi font que ce roman vous enchante de bout en bout.

Un portrait des Etats-Unis au XIXm pas si éloigné, en soi, de celui de notre époque...

C'est l'histoire...

De Shepard Lee qui a reçu de son père quelque terres mais qui par excès de nonchalance et après quelques mésaventures va les laisser péricliter.

Un jour à la recherche d'un hypothétique trésor, il va se découvrir le pouvoir de voyager de corps en corps. S'il ne pourra jamais modifier le caractère où les actes de ses propriétaires originels, il va néanmoins beaucoup apprendre de ses différentes vies. Il effectuera 6 transferts et sera tour à tour : usurier, dandy esclave, etc...
C'est un roman qui m'a captivé, bluffé, j'ai adoré et vous le recommande vraiment.

Waouh......... et dire qu'il était tombé dans l'oubli dans son pays et même pas traduit en France, merci Aux Forges de Vulcain.
Lien : https://justelire.wordpress...
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Quoi de mieux pour changer de vie que de s'approprier celle des autres ? C'est l'aventure qui va involontairement arrivé à notre infortuné Sheepard Lee.
Il a la possibilité d'habiter des corps désertés par la vie, et de vivre leurs existences : en basculant dans ces nouveaux habitats, sheepard Lee s'accapare les habitudes et les traits de caractère de ses hôtes ; mais l'herbe n'est pas forcément plus verte ailleurs !
En quittant sa prime enveloppe charnelle, il pense trouver de meilleures conditions d'existence : il sera tour à tour, un prospère homme d'affaires, un gentilhomme désargenté, un usurier, un philanthrope, un esclave et un propriétaire terrien. Chacun d'eux possède un attrait pour sheepard lee mais finalement il les quittera tous sans regret.

Comme relevé dans la 4ème couverture, Sheepard Lee amène une réflexion sur le société américaine de son époque, société gangrènée par l'argent, le pouvoir, une société déshumanisée qui laisse peu d'espoir sur la nature humaine.
Quelques rares sursauts d'énergie, nous réveille de temps en temps mais le rythme de ce roman reste très lent. J'aurai pu me rattraper en ayant de l'empathie pour les différents personnages mais ils sont tous tellement misérables qu'il m'a été impossible de m'attacher à eux ; même Sheepard Lee ne trouve grâce à mes yeux : c'est un paresseux geignard qui ne tire aucune leçon de ses diverses mésaventures.

Pour apprécier pleinement cette lecture, il faut appréhender Sheepard lee comme une critique acerbe de la société plutôt que comme un simple récit rocambolesque avec un fond de fantastique


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Ce roman est absolument étonnant et déroutant, dans son contenu autant que dans sa structure narrative.
L'histoire est simplement présentée par l'éditeur : Sheppard Lee change de corps et de destins, il fera siennes de nouvelles habitudes, pensées et manières de s'exprimer et le roman épousera ces transformations ...
Tout un programme alléchant et le lecteur se prépare à une lecture à plusieurs niveaux, un peu comme un mille-feuilles que l'on se réjouit de déguster.
Promesse tenue ! le texte est beau, l'écriture soignée, le personnage central attachant dans sa curiosité à découvrir le(s) monde(s). Et changer de peau lui convient très bien puisque, à chaque fois, il y trouve son compte, en s'appuyant sur sa créativité et sa capacité à rebondir.
Ce roman méritait en effet d'être redécouvert. On peut penser que - peut-être- Paul Auster y a fait référence en rédigeant durant 3 longues années son incroyable 4 3 2 1 ...
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Philadelphie, début du 19ème siècle
Sheppard Lee est un gentleman farmer vivant confortablement des revenus de ses terres, dont il ne s'occupe pas personnellement car il est trop paresseux pour cela. Ne s'employant à rien, il essaie vainement de trouver quelque occupation pour ne pas s'ennuyer à longueur de temps.
Son régisseur finit par le dépouiller de ses biens et, dans une tentative désespérée pour recouvrer la richesse, Sheppard Lee perd la vie. L'occasion pour lui de constater qu'il est certes mort mais capable de se projeter dans le corps d'un quidam défunt pour l'animer à nouveau ! Cette découverte et les péripéties qui s'ensuivront le conduiront à jouer successivement divers rôles dans la société américaine. Il y occupera le corps de personnages aussi différents qu'un dandy ou un esclave noir, pour ne citer qu'eux, toujours en quête d'un bonheur qui semble s'acharner à le fuir…

La présentation de l'éditeur (que je n'ai pas reprise ci-dessus) m'avait incitée à tenter ma chance lors de la dernière opération Masse Critique de Babelio et bien m'en a pris !
J'ai plongé dans le récit autobiographique des tumultueuses aventures de Sheppard Lee et je n'ai pas tardé à avoir le sourire aux lèvres (lorsqu'il raconte, au tout début, les circonstances tragico-comiques dans lesquelles ses jeunes frères et soeurs ont trouvé la mort, nous offrant un avant-goût de cet humour noir dont le roman est friand). Pas de temps mort dans ces pages pourtant copieuses, ponctuées de ces titres « où l'on vous donne un aperçu de ce qui va arriver », car notre narrateur évite au maximum les digressions, soucieux de maintenir l'intérêt de son lecteur et pour ce qui me concerne, il y est parvenu sans difficulté.
La léthargie naturelle de Sheppard Lee s'efface à chaque fois qu'il « occupe » un nouveau corps, puisque c'est le tempérament du défunt qui vient remplacer le sien, au point qu'il en épouse toutes les appétences et ne conserve plus qu'en toile de fond la conscience de celui qu'il est réellement, de quoi affirmer implicitement la primauté du corps sur l'esprit.
Croyant gagner au change avec son premier nouveau corps, car l'homme est riche au possible, Sheppard Lee ne va pas tarder à déchanter (il se découvre affligé de la goutte et d'une insupportable épouse) et ses déboires ne s'arrêteront pas là. Il se retrouve régulièrement dans des situations qui vont d'inconfortables à périlleuses et tombe ainsi de Charybde en Scylla, à croire qu'il lui est impossible de se trouver un corps source de bonheur. Point de ton larmoyant pour autant car le registre reste en mode caustique. L'auteur épingle au passage la politique, les journaux, les spéculateurs boursiers, entre autres, usant de mordantes petites incises quand il ne développe pas davantage. S'il épouse parfois les travers de son époque (des clichés sur l'esclave noir, l'usurier au nom juif), il n'en demeure pas moins pourvu d'une plume fort acérée pour dépeindre l'impitoyable société américaine d'alors.
« Sheppard Lee » est un réjouissant roman satirique mené tambour battant. Paru en 1836 et donc écrit dans cette langue du 19ème siècle qu'il m'a été plaisant de goûter à nouveau, c'est la première fois qu'il est traduit en français. L'érudite postface de son remarquable traducteur, Antoine Traisnel, en offre une analyse très intéressante, permettant d'appréhender au mieux les lectures qui peuvent être faites de l'oeuvre.
Lien : https://surmesbrizees.wordpr..
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