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EAN : 9782841901586
124 pages
Parangon (15/02/2007)
4/5   1 notes
Résumé :
Le dialogue de Foucault avec la psychanalyse n’est ni épisodique ni ponctuel, mais parcourt la totalité de son œuvre. Bien que la référence à la psychanalyse ne soit manifeste que dans quelques-uns de ses écrits, il existe en permanence une référence implicite, latente et virtuelle dans sa production. Si sa lecture de la psychanalyse est toujours fragmentaire, elle est cependant insérée dans le champ de toutes les problématiques qui ont orienté sa recherche théoriqu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Foucault c'est un peu comme Lacan et bien d'autres originaux : faut lire des types qui les ont lus avant nous pour envisager peut-être de les lire plus tard à notre tour, quand on aura bien digéré toute cette bourbe de plumes et de pailles agglomérées. En plus de ça, faut faire dans le thématique. Une lecture globale de l'oeuvre de Foucault, ce serait encyclopédique. Alors on s'attaque aux petits morceaux. Ici, le rapport de Foucault à la psychanalyse.


L'oeuvre théorique de Foucault consistait essentiellement en une déconstruction de la philosophie du sujet telle qu'elle s'est constituée en Occident depuis Hegel, Descartes et compagnie (ouais, tous les autres types chiants d'avant que vous n'avez pas envie de lire non plus). Selon Foucault, il n'y aurait pas de sujet ontologiquement fondé et ad vitam aeternam, constant. A la place, il voit des techniques de subjectivation qui sont comme des jeux de vérité tissés par un langage lui-même en prise au pouvoir et à ses formes disciplinaires. Non, le pouvoir n'est pas central et représenté par l'Etat : il se diffuse à travers un réseau de micropouvoirs, dans la capillarité des discours qui nous incitent à plonger au coeur de nous-mêmes pour parler, pour chercher, pour traquer au fond de nous ce qui fonde la culpabilité chrétienne. C'est le dispositif de l'aveu, au fondement des techniques thérapeutiques modernes. Au souci de soi qui fonde l'éthique grecque antique succède le savoir sur soi qui fonde la pensée chrétienne.


Foucault avait retracé l'histoire de la folie à l'âge classique. Il montrait qu'à cette époque, la folie conservait encore sa dimension tragique. Elle conservait encore le pouvoir de dire une certaine forme de vérité, une modalité effective du discours. Mais avec l'entrée dans la tradition critique, la folie devient déraison et est exclue de l'espace social. La psychiatrie se présente alors comme une pédagogie qui veut transformer la déraison en raison. La folie devient une maladie mentale que l'on peut traiter. Ses méthodes de traitement, parce qu'elles se présentent comme un savoir, prennent le pouvoir. Elles deviennent traitement moral.


Foucault a eu un parcours théorique mouvementé. Dans un premier temps, son archéologie du savoir a privilégié la pensée du dehors. Il espérait retrouver la dimension tragique de la folie dans la littérature et la linguistique. La psychanalyse, avec son concept d'inconscient, pouvait s'inclure dans son projet. Mais dans un second temps de son parcours marqué par la généalogie du pouvoir, son intérêt pour la littérature et le langage en tant qu'extériorité et pensée du dehors, comme puissances capables de réaliser la déconstruction de la philosophie du sujet s'émoussement. La problématique du pouvoir et sa généalogie l'amènent à considérer la psychanalyse comme cible de sa critique. Il remet en cause les concepts lacaniens, notamment le stade du miroir qui fonderait le sujet une fois pour toutes, négligeant les effets ultérieurs imposés par les micropouvoirs. Il ramène également la Chose lacanienne, censée fonder le sujet dans son être et dans son rapport au langage par l'expérience d'un manque fondamental, à la culpabilité chrétienne. D'une manière générale, il critique l'intrication croissante de la psychanalyse à la philosophie du sujet comme si, à poursuivre dans cette direction, elle perdait de sa subversion.


En conclusion à son ouvrage assez accessible, Jojo Birman laisse flotter une pensée qui permet de réconcilier la psychanalyse à la subversivité qu'elle ne doit jamais perdre sous peine de se voir dénaturée.


« Si la psychanalyse garde encore le moindre intérêt à poursuivre son interlocution avec le projet philosophique entrouvert par Foucault […], il lui faut questionner carrément l'impératif platonico-socratique de se connaître soi-même, pour pouvoir s'inscrire dans la tradition éthique du souci de soi. Pour cela, cependant, il lui faut repenser l'axiome qui dit que la subjectivité implique l'expérience du renoncement, concevant le langage autrement, comme quelque chose d'inscrit dans le domaine aimanté des relations de force, et qui serait nécessairement marqué par les intensités. Par là, nous pouvons continuer à souligner encore le décentrement du sujet et l'extériorité de la subjectivité d'une autre façon, sans transcendantalismes, en insérant également cette fois le regard dans une structure de pouvoir capable de dépasser l'invariante du stade du miroir […]. le langage en tant qu'Autre serait aussi remis en question dans cette lecture, étant donné que, comme matrice de jeux de vérité, il serait toujours traversé par les intensités présentes dans la microphysique du pouvoir.
Avec tout cela, il serait peut-être possible d'élaborer une autre modalité de clinique, dont le fondement comprendrait le souci de soi, où les figures du fou […] seraient reprises dans leurs forces de savoir, comme des modalités positives d'affirmation de soi. Ainsi, l'inscription de la psychanalyse dans la tradition tragique serait peut-être possible, si elle rompait ses liaisons dangereuses avec la tradition critique et reconnaissait que l'inconsistance ontologique de la subjectivité -énoncée par Freud avec le concept d'inconscient- était le signe le plus visible de l'expérience tragique qui marque la subjectivité. »

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Si la psychanalyse garde encore le moindre intérêt à poursuivre son interlocution avec le projet philosophique entrouvert par Foucault […], il lui faut questionner carrément l’impératif platonico-socratique de se connaître soi-même, pour pouvoir s’inscrire dans la tradition éthique du souci de soi. Pour cela, cependant, il lui faut repenser l’axiome qui dit que la subjectivité implique l’expérience du renoncement, concevant le langage autrement, comme quelque chose d’inscrit dans le domaine aimanté des relations de force, et qui serait nécessairement marqué par les intensités. Par là, nous pouvons continuer à souligner encore le décentrement du sujet et l’extériorité de la subjectivité d’une autre façon, sans transcendantalismes, en insérant également cette fois le regard dans une structure de pouvoir capable de dépasser l’invariante du stade du miroir […]. Le langage en tant qu’Autre serait aussi remis en question dans cette lecture, étant donné que, comme matrice de jeux de vérité, il serait toujours traversé par les intensités présentes dans la microphysique du pouvoir.
Avec tout cela, il serait peut-être possible d’élaborer une autre modalité de clinique, dont le fondement comprendrait le souci de soi, où les figures du fou […] seraient reprises dans leurs forces de savoir, comme des modalités positives d’affirmation de soi. Ainsi, l’inscription de la psychanalyse dans la tradition tragique serait peut-être possible, si elle rompait ses liaisons dangereuses avec la tradition critique et reconnaissait que l’inconsistance ontologique de la subjectivité -énoncée par Freud avec le concept d’inconscient- était le signe le plus visible de l’expérience tragique qui marque la subjectivité.
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Dans la tradition de l’Antiquité, il existait une éthique fondée sur le souci de soi et l’esthétique de l’existence, tandis qu’à partir du christianisme, une morale centrée sur la culpabilité comme valeur sera stratégiquement construite en Occident. […]
C’est par cette voie que la psychanalyse s’est inscrite dans le dispositif de l’aveu, ayant alors dans la culpabilité l’un des plus importants de ses opérateurs éthiques. En outre, c’est encore par les chemins de la culpabilité que la sexualité s’est incrustée dans le corps du sujet, comme marque éloquente de son sacrifice moral et érotique. Dire interminablement à un autre ce qui lui passe par la tête serait pour le sujet le plus grand signe de la culpabilité provenant de ses maux sexuels […].
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Selon Foucault, par cette hypothèse répressive [de la sexualité et aussi dans un espace politique et historique plus ample], on cherchait à faire croire que le pouvoir de la modernité était en fait souverain, centré sur l’appareil d’Etat. Pour lui néanmoins, le pouvoir moderne était disciplinaire, s’exerçait comme microphysique de manière capillaire, atteignant de la sorte les interstices des corps.
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C’est la constitution d’une culture fondée sur la raison qui a conduit la folie vers son extériorité, pour être inscrite au-delà de ses frontières et définitivement énoncée comme l’Autre de la raison, insérée sur le territoire de la déraison.
En conséquence de quoi la folie fut activement exclue de la scène sociale et éjectée vers les hôpitaux généraux, institutions constituées au début du 17e siècle et où fut jetée toute la marginalité de l’Ancien Régime. […]
Néanmoins, au commencement de ce processus, c’est-à-dire à la Renaissance, la folie n’était pas bannie de la scène sociale. Elle s’inscrivait dans le monde, faisait partie de ses paysages réels, imaginaires ou symboliques. L’expérience de la folie appartenait aux rituels communautaires et établissait un vigoureux dialogue avec le monde. […]
[Mais] inscrite sur le territoire scatologique de la déraison, la folie allait perdre non seulement son pouvoir de dire la vérité, mais encore celui de dire tout court, puisque ce pouvoir-là était désormais dominé par la raison. […]
[Malgré la constitution de la psychiatrie comme savoir spécifique sur la folie], l’expérience tragique de la folie continua sans doute à avoir une présence cruciale dans l’imaginaire occidental, mais uniquement à la périphérie et sur les bords de la folie, ou, en d’autres termes, lorsque les registres du tragique et de la déraison prirent de la valeur comme manières de dire. […]
L’effacement de la folie comme positivité existentielle et production d’énonciation, par les voies technologiques et instrumentales du savoir psychopharmacologique et des neurosciences, a fini par soutirer la folie, entièrement, inévitablement, au registre du langage, en la maintenant sous un silence absolu. […]
[Selon Foucault], en tant qu’énoncé d’un savoir sur la folie, la psychanalyse vient fatalement se placer dans cette tradition critique, n’ayant ainsi aucun rapport avec la tradition tragique.
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La lecture du décentrement du sujet promue par Freud et l’énoncé du concept d’inconscient se dédouble inévitablement dans la perte de toute consistance ontologique du sujet. Avec cette perte, on ne peut plus rigoureusement parler de l’existence de celui-ci, mais uniquement de formes de subjectivation. Celles-ci sont réglées par des jeux de vérité, inscrites dans des techniques de soi et les divers champs de la microphysique du pouvoir. […] Bref, c’est la microphysique du pouvoir qui établit les lignes de force dans les interstices desquelles s’ordonnent les jeux de vérité réglés par le savoir.
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