Je lis depuis de très nombreuses années les textes de Christian Bobin, dont j'aime infiniment la petite musique si spéciale, si épurée...si poétique
Cette fois encore je suis bouleversée, admirative... de tout ce que l'auteur signifie, exprime en des mots d'une limpidité extraordinaire... et pourtant là, je sors de ce livre avec un sentiment très fort d'oppression, de peine, car après vingt ans... la disparition de la femme aimée reste lancinante, omnisciente , fulgurante... alors notre auteur, bien sûr, aime la vie, les petites lumières magiques du quotidien, la poésie extrême des instants, de Dame Nature....mais le coeur reste transpercé de "couteaux"..impitoyables...
"Comprends-moi: je veux juste te dire que respirer, simplement respirer sans toi, faire un pas en direction de la fenêtre que la neige dévore, c'est recevoir des milliards de coups de couteau. " (p. 68)
je reprends ce court texte...et je tombe sur la dédicace :
"Pour Ghislaine ce livre hanté"... et cet adjectif "Hanté"... me paraît convenir on ne peut mieux...à ce qui m'a traversé comme émotions contradictoires en lisant à petits pas, ce texte "pulvérisant" d'amour mais aussi de peine inconsolable... même si il y a les mots, l'écriture, l'amour, la beauté de l'existence et de l'extraordinaire littérature, qui soutiennent, aident à ne pas désespérer complètement...
"Comprends-moi: je veux juste te dire que respirer, simplement respirer sans toi,faire un pas en direction de la fenêtre que la neige dévore, c'est recevoir des
milliards de coups de couteau. " (p. 68)
"Ce soir il neige sur ta tombe. Les poètes russes avec leurs gueules cassées et leurs bonnets d'astrakan viennent me voir. Ils sont morts bien avant ta naissance. Ils me parlent de toi. La vie est atteinte, son secret est levé dès qu'un livre accueille le déchirant et le pur. J'écoute le chant de quelques fous des années trente- Des Russes qui dans la nuit se penchent avec moi sur ta tombe." (p. 68)
Mais comme chaque fois la lumière et l'espérance résident également au fond du plus sombre: l'absence de l'Etre aimé: "« Je t'écris pour t'emmener plus loin que ta mort. ».
Je ne peux que réitérer mon bouleversement intense à la lecture de ce dernier texte... je l'ai débuté cette nuit... ne l'ai pas lâché...même si il est bref... comme tous les écrits de Christian Bobin, il est nécessaire de les lire lentement ,de s'imprégner de chaque mot...et je me permets d'achever cette très imparfaite chronique par cet extrait qui formule tant du Remède qu'est l'Ecriture:
"L'écriture quand je ne lui donne pas la main, je lui réserve toutes mes pensées, comme ce paysan qui au fond de son lit pense à ses bêtes, aux soins qu'il faudra leur donner au matin. Qui m'a appris à écrire ? Sans doute la voûte bleutée des hortensias, le temps que mettait Dieu à venir et bien sûr ta nonchalance- cette brutale décision de ne jamais désespérer. (p. 15)
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"Très beau petit livre de Bobin adressé à celle qu'il aimait. Beaucoup de pureté, de douceur, de lumière. "
Ceci était ma première critique, mais après relecture du livre, je voudrais la compléter.
J'ai toujours aimé Bobin, je l'aimerai toujours, aussi ai-je aimé ce petit livre sensible, poétique, qui éclaire sur la vie et la mort.
Cependant, si je veux être honnête, et même si ça me fait mal de penser ainsi car j'aime vraiment infiniment cet auteur, je suis restée un peu sur ma faim...
J'ai comme l'impression que parfois Bobin se répète, qu'il n'ose plus aller plus loin que ce à quoi il nous a habitués, que le succès a bloqué son inspiration. Pour avoir lu tous ses livres, je "n'entends plus son cœur battre" comme il le laissait battre avant, dans ses livres "d'avant le succès". Impression qu'il se complaît un peu toujours dans les mêmes figures de styles, qu'il n'ose plus innover, se livrer, comme il le faisait avant de connaître cette vague de grand succès. Je ressens une forme de "blocage".
J'espère le voir se "réveiller", nous surprendre, dans ses prochains livres.
Ce qui n'empêche que j'ai quand même beaucoup aimé "Noireclaire".
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Livre impossible à commenter tant il ne correspond à aucune catégorie. Pas un roman, pas tout à fait un poème mais un savoureux mélange des deux.
Christian Bobin se dévoile à nouveau dans ce court texte et avec beaucoup de pudeur sur la femme de sa vie décédée. A lire "La plus que vive " dans lequel il l'évoquait déjà et que j'avais personnellement trouvé encore plus fort.
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Un format inhabituel, un texte aéré, des phrases lapidaires, des formules, des réflexions, des sentences, une ode à la femme aimée trop tôt disparue, une poésie intense liée au souffle d'un oiseau, à la couleur des cieux.
Un riche recueil qui souvent m'a ravie, m'a parfois laissée perplexe mais qui toujours m'a donné envie de savourer chaque instant de mon existence, chaque sourire de la vie en ses petites choses.
Lire un écrit de Christian Bobin, c'est se nourrir l'âme. Au détour d'un sentier, au chant d'un oiseau, certains de ses mots vous reviendront et enrichiront l'instant de leurs résonances.
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merveilleux de pudeur, poésie, sensibilité : le prix Nobel ? oui !!!!
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