Mais ce soir là, je n'ai plus la force de résister. Je bascule dans un gouffre noir. Je fais une chute vertigineuse vers le fond, à l'intérieur de moi-même, là où gisent les choses oubliées. A l'endroit exact de mes peurs. C'est un naufrage.
S'il me quitte, je ne sais plus qui je suis, ni où je vais, ni ce que je dois faire.
Plus d'air pour respirer, plus d'avenir à bâtir, plus de présent à aimer, il ne me reste qu'un passé. Dix-huit années qui s'écrasent contre un mur.
Nous avons chacun notre puits où meurt un enfant tendre. Nous l’entendons pleurer la nuit sans jamais bien comprendre.
Je voue à Barbie un mépris total, et les princesses m'emmerdent.
Car bien sûr, l'enfer est là, où voulez-vous qu'il soit ? A l'intérieur de ces boîtes. A l'intérieur de moi.
Je suis devenue écrivain comme on devient explorateur, ou archéologue. Je suis devenue écrivain pour plonger dans les abysses, à la recherche de ce qui n'a pas de nom. Je suis devenue écrivain pour nommer les fantômes.
C'est fou ce qu'on est aveugle lorsqu'on a peur.
Le 25 octobre 2010, je quitte mon amie D. aux alentours de dix-neuf heures, pour rentrer chez moi au volant d’une Mazda 6 de couleur bleue, cabossée à l’arrière et rayée sur les deux ailes. À ce moment de ma vie, je suis comme cette voiture : cabossée. Quant à mes ailes, où sont-elles ?
(…)
Le soir tombe sur la banlieue parisienne. Je veux rentrer chez moi pour dîner avec mes enfants, faire acte de présence auprès d’eux, bien que n’ayant guère d’appétit et pas plus de consistance qu’un courant d’air.
Je bifurque dans une rue, déboîte dans une deuxième. Je ne sais plus si je grille le feu, ou si je passe à l’orange en donnant un coup d’accélérateur.
Un enfant est là, sur son vélo, au milieu du passage.
Publier ce récit me donne l'impression d'aller à la piscine en compagnie de gens qui m'ont toujours vue avec un pull et un pantalon....Vais-je me jeter à l'eau, où rester timidement cachée dans les vestiaires ?
Je connaissais Anne laure Bondoux pour ses romans jeunesses que j'ai toujours trouvés plein d'imagination. J' ai été étonnée qu'elle fasse un livre sur sa propre vie, les non dits liés à sa famille. Au premier abord je trouvais cela impudique. Je l'ai lu, et j'ai aimé la façon dont Anne laure Bondoux nous livre son désarroi, ses angoisses en mettant en évidence les liens complexes qui se tissent dans chaque famille et combien ils ont d'impact sur notre devenir. Son histoire c'est un peu celle de tout le monde, elle démêle la sienne, elle avance et petit à petit se trouve. on comprend alors comme une évidence que ce livre elle devait l'écrire. C'est un livre profondément humain et plein d'espoir. On ne peut que lui souhaiter d'écrire encore pour notre plus grand plaisir.