On dirait un
John le Carré qui se serait pris d'empathie pour ses personnages.
Little America de
Henry Bromell, c'est une sorte d'autofiction, de vraie-fausse autobiographie : l'auteur se met lui-même en scène, écrivain/historien, à la recherche du passé de son père, espion de la CIA au Moyen-Orient dans les années 50 (le véritable père de Bromell fut effectivement un agent de la CIA au Moyen-Orient).
❤️ L'une des réussites du bouquin est l'entrelacement finement tissé entre les questions présentes du fils au père retraité à Boston et les tentatives de reconstitution du passé des fifties dans un petit pays arabe imaginaire, entre Irak et Syrie.
Phrase après phrase, tout cela s'entremêle de façon subtile sans que le lecteur s'y perde. Remarquable.
L'autre intérêt bien sûr, c'est de se voir expliquer la naissance des profonds courants qui façonneront le monde jusqu'à aujourd'hui : le socialisme du parti Baas, le panarabisme des frères musulmans, l'ascension égyptienne de Nasser, et la paranoïa des américains apeurés de voir s'étendre au Moyen-Orient l'effet domino déjà en oeuvre en Asie du Sud-Est, craignant que les communistes parviennent à conquérir le Monde.
Et puis il y a ce ton ironique et désabusé, so british, même si l'on a affaire à une famille 100% US (qui, certes, avait pris le relais des anglais dévastés par la seconde guerre).
De l'espionnage et de l'Histoire, de la famille et de la nostalgie, de la belle écriture, un assassinat et même peut-être une histoire d'amour comme ténu fil rouge : savoureux cocktail.
Henry Bromell est récemment décédé en 2013 : il commençait tout juste à être reconnu, avec ce roman et sa contribution au scénario de la série Homeland.
Pour celles et ceux qui aiment les espions.
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