Bronnec Thomas – "
En pays conquis" – Gallimard / Folio policier, 2017 (ISBN 978-2-07-282947-5)
Ce roman est raté, pour une raison évidente, connue de tout adepte des études littéraires : il est impossible d'écrire de la bonne littérature en voulant démontrer et asséner des thèses idéologiques, politiques, religieuses etc.
L'auteur caractérise ses personnages par des traits qu'il croit être ceux de tel ou tel milieu de la politique, ce qui ne reflète que ses propres a priori. Dans le présent roman, ceci engendre de surcroît une certaine confusion dans le récit, car l'auteur croit utile de rajouter (plaquer) une Profonde Intrigue Psychologique, et nous fait le coup de la brave dame qui enquête sur "son père qu'elle n'a pas connu" – un thème déjà ressassé jusqu'à plus soif dans la littérature de gare.
Il commet par ailleurs une énorme faute de construction de son récit, en donnant la parole et le "point de vue narratif" à tour de rôle aux deux partis qu'il croyait être déterminants (englobés sous les termes "la droite" et "la gauche", qui déjà à cette époque, en 2016, ne voulaient plus dire grand chose), mais sans conférer la même fonction narrative à celle qui représenterait, selon lui, le "Rassemblement National" (sous les traits de laquelle on reconnaît
Marine le Pen), ce qui accentue encore le caractère manichéen de ce roman.
Le cas est ici d'autant plus flagrant que l'auteur a voulu, en 2016 (cf la postface p. 283), écrire un roman anticipant le résultat des élections présidentielles de 2017. Son récit devient ainsi un témoignage des préjugés et erreurs d'appréciation régnant dans ces milieux de cultureux, erreurs les condamnant à ne rien comprendre à la montée de ce qu'elles et ils nomment "le populisme" ou "l'extrême-droite", deux termes aussi sots l'un que l'autre.
Le meilleur exemple de ridicule frappant ce type de roman à thèse politique, tourne ici carrément à l'humour involontaire : Bronnec présuppose en effet ici (p. 215 et seq) un mode de financement du Rassemblement National qui fut très exactement celui de la campagne de Macron, ce candidat sans parti et sans fortune personnelle qui se trouva en mesure d'être celui qui dépensa – et de loin – le plus d'argent pour sa campagne (cf comptes déposés) sans que personne ne juge utile d'enquêter sur cette manne miraculeuse.
On retrouve là une des caractéristiques quasiment génétiques des "gens de gôche", à savoir la manie d'attribuer leurs propres turpitudes à leurs adversaires politiques.
Évidemment, le lecteur ne coupera pas non plus à l'un des thèmes devenu incontournable dans la littérature bien pensante, à savoir le drame du pôvre homosexuel qui devait se cacher. Là encore, on baigne dans les lieux communs.
Du même auteur, j'avais lu "
Les initiés" (voir recension), un roman qui voulait déjà démontrer une thèse politique en exposant les turpitudes de la gauche caviar et de ses séides peuplant les couloirs de "Bercy" (le nid de crabes dont est issu Macron). J'avais déjà formulé la même remarque : il s'agit de ce que le parti communiste appelait la littérature d'agit-prop...
C'est bien dommage, car je suis à peu près certain qu'en renonçant à ses oeillères politiques pour se consacrer à un travail vraiment littéraire, cet auteur dispose de moyens qui lui permettraient d'écrire de vrais romans.