Le recueil de nouvelles "
Affronter l'orage" (c'est également le titre de la première nouvelle) met en scène des personnages désabusés et esseulés, souvent en proie à des difficultés matérielles conséquentes. L'alcool y est un recours, bien trop, et met à nu les espoirs et le laisser-aller de ces personnages, qui comme nous tous, ont des rêves, et s'y accrochent comme à une planche de secours au milieu des éléments déchaînés.
Car oui, il s'agit bel et bien d'
affronter l'orage de la vie : tous les personnages sont confrontés à un moment crucial, à un choix, ou aux conséquences d'une absence de choix, parfois pour se sauver, parfois pour descendre plus bas encore, mais en finir. Pour certains l'amour est présent et reste une ressource, pour d'autres il serait une entrave, si tant est qu'ils soient même capables d'aimer. Les femmes en particulier y ont connu la violence à plus d'une reprise, elles s'accrochent peut-être plus durement à la vie, mais là encore, le regard de l'auteur sur leur univers est dur, voire impitoyable, car elles sont rarement de bonnes mères, et délaissent leur progéniture, dans plusieurs nouvelles.
Bref, des hommes et des femmes s'approchent, se recherchent, s'espèrent, et cela aboutit ou non à un semblant de relation. C'est ici qu'intervient l'écriture : on est à la fois dans l'Amérique profonde, c'est totalement américain, mais aussi universel, et même intemporel. L'écriture de
Larry Brown réussit le tour de force de nous faire glisser dans la peau de personnages peu recommandables, tout en nous donnant un aperçu de ce qui fait échouer ou déraper les relations - la peur de l'intimité, l'égoïsme presque forcé par les conditions de vie, où il faut avant tout survivre, lutter pour conserver son travail... On est à la fois dans la peau du personnage, et on ressent de l'empathie pour lui et pour l'autre, les autres, qui se débattent autour de lui.
Je n'ai pas ressenti de tristesse en pénétrant dans cet univers, la lumière y est crue mais marque bien les contrastes, j'avais envie d'y retourner, je pensais aux personnages du livre. Il me semble que c'est un ouvrage qui agit aussi à retardement - on croit avoir refermé le livre, mais il agit encore, et projette sa lumière dans notre propre décor.