C’est terrible d’être adoré par un imbécile : cela vous rabaisse dans votre propre estime. Cette espèce d’invertébré me pollue avec ses coups d’encensoir. Il croit me plaire en m’imitant alors que j’ai horreur des perroquets. Il est à la recherche d’hommes remarquables : pauvre type ! Je le hais de s’être mépris à ce point.
Ce sont des bandes dessinées qui m’ont donné envie de voyager. Pour moi, tous les paysages de l’Inde et de l’Orient resteront empreints de la marque et des personnages de Tintin ; c’est avec lui que j’ai appris à lire le monde, c’est lui que je retrouve partout. Que veux-tu ! J’appartiens à la civilisation du café-crème et des albums de Casterman !
L’Indien ne fait pas l’amour avec sa femme, il procrée, perpétue l’ordre cosmique. Le plaisir, il le connaîtra en principe avec des courtisanes ou, s’il a de la chance, des étrangères synonymes de débauche. Autrefois, avoir une Européenne comme favorite constituait pour les maharajahs un signe de réussite au même titre que posséder une Rolls Royce. Les Indiens s’imaginent tous l’Occident comme le paradis de l’amour libre.
L’Inde est peut-être un paradis pour les homosexuels mais un purgatoire pour les autres. Vivre ici, c’est revenir au xviiie siècle européen, quand les interdits sur le désir obligeaient les individus à déployer des trésors d’ingéniosité pour arriver à leurs fins. L’islam verrouille ses femmes, l’Inde les montre et les soustrait en même temps. C’est une fausse liberté que la leur ; elles ne portent pas un voile comme les musulmanes mais, pire encore, un invisible filet, tendu autour d’elles et qui les rend intouchables.
La pauvreté, la dèche imprègnent jusqu’à l’air qu’on respire, pervertissent l’oxygène, submergent les quartiers les plus riches. Même les grands palaces, les villas luxueuses sont des esquifs que lèche l’ordure à leurs portes. C’est pourquoi où il y a beauté en Inde, il y a compassion pour la simple raison que la beauté meurt jeune et doit mourir sous la fange. Ici, tout endroit décent est un espace gagné sur la saleté, conquis et préservé de haute lutte par des murs ou des barbelés.
L’ignorance consiste à considérer l’éphémère et l’impur comme éternel et pure béatitude.
On aime quelques femmes dont le charme et la beauté se confondent avec la féminité.
L’erreur de la plupart des auteurs est de croire le progrès fait seulement d’études et de patientes lectures, alors qu’il est fonction de ruptures et de scandales. Pour être fécondés, nous avons besoin d’être dérangés.
Être libertin dans une société chaste ou chaste dans une société libertine engendre des contrastes féconds.
Le pays des épices culinaires et spirituelles devrait garder mon esprit en état d’éveil permanent.