Le Livre du grand secret

Quand on est mort, on y tient encore plus que quand on était vivant. On veut toujours du rabiot.

Si tu as des besoins sexuels à satisfaire, prends le bus pour une destination inconnue, va dans une autre ville, au hasard, et trouve une prostituée. Ne fréquente jamais les femmes qui vivent à proximité de ton domicile. Jamais.

Il était devenu une éponge gorgée de toute la culpabilité du monde. Un réparateur compétent mais ayant oublié sa boîte à outils. Il ne servait à rien.

Je suis comme un médecin qui aurait découvert un remède miracle mais serait devenu amnésique entre-temps...

Un coup de fil aurait pu empêcher l'avion de décoller ou aurait déclenché une fouille des lieux. On aurait fini par trouver la bombe, on aurait évacué les bâtiments ou l'appareil.Oui, il aurait pu sauver des centaines de vies humaines avec un simple téléphone. Il aurait pu devenir l'ange gardien des innocents, de tous ceux qui périssaient dans les attentats ou dans les accidents les plus imprévisibles.

Ces grains de sable auraient probablement suffi à enrayer la machine, à semer le doute, la zizanie dans les rangs des comploteurs. Parfois il n'en fallait pas davantage pour faire avorter un projet. Oui, ç'aurait pu être son rôle : semer le doute, affaiblir les structures, éveiller la méfiance... Hélas, pour mener ce travail à bien, il aurait fallu qu'il lise au moins dix feuillets du livre des secrets !

Une existence affreuse, à n'en pas douter ! Une fuite permanente, des années passées à trembler, à se méfier de tout le monde, à voir dans chaque livreur de pizza un assassin aux ordres de la CIA... Une vie de solitude et de peur, de culpabilité, de responsabilités écrasantes.

Le livre des secrets, je l'ai maquillé en album de photographies... En haut de la première page, à droite, tu verras une mention à l'encre noire, une date, une heure. Ce sont les coordonnées de base à partir de quoi tu pourras déterminer l'heure exacte à laquelle le livre révélera ce qu'il contient. Un anniversaire à fêter tous les dix ans. N'oublie jamais : le texte ne sera lisible que pendant trente minutes, pas une de plus.

Ils viennent au monde avec ce fardeau marqué au creux de la main, le futur d'un monde qu'ils ne connaissent pas mais qu'ils vont devoir prendre en charge, pour le meilleur et pour le pire. La ligne de vie tracée dans leur paume n'est pas la leur, mais celle de la planète qu'ils ont pour mission de guider. Tout y est : les étapes successives de l'humanité, les guerres, les inventions, les grandes découvertes, les tueries, les erreurs qui mèneront les hommes à leur perte. Tout est détaillé, à l'infini. C'est comme un gouffre sans fond, quand on se penche au-dessus on se sent aspiré. Il suffit de savoir lire, de savoir déchiffrer...

Un chasseur, dès qu'il cesse de tuer, il s'affaiblit. Son sang tourne en eau.