Citations sur Les filles au lion (237)
Je devrais consacrer toute mon énergie à "changer les choses" comme tu dis, et il ne m'en resterait plus pour peindre, ce qui est quand-même le but principal.
Et il n'y a pas que cela. J'ai vu ce que le succès fait aux gens, Isaac, comment il les éloigne de leurs pulsions créatrices, comment il les paralyse. Ils ne peuvent plus faire autre chose que d'horribles répliques de ce qu'ils ont déjà fait, car tout le monde a un avis sur ce qu'ils sont et ce qu'ils devraient être.
Je veux que mes tableaux acquièrent une telle valeur et deviennent si importants que personne ne puisse les retirer du marché et les cacher parce que - oh, mon Dieu ! - ils ont été peints par une femme.
Sais-tu combien d'artistes vend mon père ? Vingt-six, la dernière fois que j'ai compté. Sais-tu combien il y a de femmes parmi eux ? Aucune. Pas une seule. Les femmes en sont incapables, figure-toi. Elles n'ont pas de vision. Pourtant, si je ne m'abuse, elles ont des yeux, des mains, un cœur et une âme. J'aurais perdu avant même qu'on me laisse une chance.
Mes amis qui s'y connaissent mieux que moi parlent de chimère, de caméléon, de plaisir esthétique et de joie métaphysique. Personnellement, je dirais plutôt que Femmes dans un champ de blé n'est pas un tableau facile à cataloguer, et c'est une bonne chose. Si j'admire votre entêtement figuratif à une époque où règnent les formes abstraites, cela ne veut pas dire que je vous range parmi les forces réactionnaires et régressives, loin de là. Vous faites quelque chose de nouveau.
Il m'a expliqué que vous veniez du pays des Maures et des ciels étoilés infinis, des palais arabes et des forts catholiques, où le sang imprègne la terre et où le soleil assomme la sierra.
Sa confiance en elle grandissait et elle voyait en Isaac son aboutissement. Teresa ne pourrait jamais comprendre ça : Isaac était un rouage essentiel à son développement en tant qu'artiste.
Harold avait la voiture, les affaires, les contacts, les villes et les espaces qu'il arpentait, nombreux et variés. Sarah, malgré son évidente fortune, n'avait que cette unique chambre et sa beauté, masque rigide qui la figeait dans une pourriture existentielle.
Teresa voyait nettement les lignes de fracture de la maîtresse de maison : le téléphone qu'on laissait sonner, les bouteilles de champagne vides à trois heures de l'après-midi, les livres abandonnés sans avoir jamais été ouverts, les racines sombres qui envahissaient ses cheveux blonds. Elle cessa de les considérer comme de vulgaires problèmes de femme riche et, à son grand étonnement, en dépit de son propre état misérable, elle en vint à éprouver de la pitié.
Teresa la voyait se pencher pour respirer les jacarandas bourgeonnants, le chèvrefeuille, les roses d'un printemps précoce, agrippant les tiges si fermement que Teresa craignait qu'Olive ne les brise.