C’est dur à affronter, le chagrin des autres. Face à lui, on est démuni, on est lâche. Souvent. Presque toujours.
À force de vivre, on finit par considérer l’extraordinaire comme normal, on oublie que la vie est un miracle et qu’il suffit d’un rien pour qu’elle cesse. Il faudrait naître avec le plan de son existence, ce serait plus simple, on profiterait mieux. Au lieu de quoi, vivre revient à un coup de bluff permanent où seuls les chanceux s’en sortent.
Ce qui est insupportable, c'est le mot "toujours". On ne connait pas sa vraie signification, pas avant d'être frappé par un drame.
Face aux loups, l'agneau,
Face au violeur, la vierge,
Face au bourreau, la victime,
Face à l'assassin, l'innocent,
Face au chaos, nous tous.
Les gens âgés sur le point de mourir lancent des regards pareils à celui que Guillaume a aujourd'hui. Un regard qui raconte toute l'histoire ramassée en une seconde. La vie et la mort en même temps, la certitude que tout est vain, que tout disparaîtra, ou a déjà disparu, et que nos vies ne sont qu'une illusion, qu'il n'existe aucune échappatoire et que les créatures humaines se leurrent en croyant qu'elles laissent une trace d'elles sur terre.
On dit qu'un ventre affamé n'a pas d'oreille. Je crois plutôt qu'un ventre plein n'a pas de cœur.
C'est court, la perpétuité.
La mienne, si Dieu ou un autre me prêtait vie, durerait un demi-siècle.
Notre monde ne manifestait plus aucune pudeur ni commisération. Rien à foutre, de la compassion. Du respect.
À force de vivre, on finit par considérer l'extraordinaire comme normal, on oublie que la vie est un miracle et qu'il suffit d'un rien pour qu'elle cesse. Il faudrait naître avec le plan de son existence, ce serait plus simple, on profiterait mieux. Au lieu de quoi, vivre revient à un coup de bluff permanent où seuls les chanceux s'en sortent. Je n'ai pas été chanceuse. C'est tout.
Il flotte dans l’air une odeur de pipi…et ce n’est pas le sien. Soudain méfiante, elle entasse son butin dans son coin, puis s’installe, accroupie, face au noir.