Il est des moments difficiles où les femmes se manifestent une surprenante solidarité, comme par exemple lorsqu’il s’agit de s’habiller.
Tu vois. Si ce n’étaient que les salamandres contre les hommes, il y aurait peut-être quelque chose à faire ; mais les hommes contre les hommes, mon vieux, rien ne peut les arrêter.
— Tu crois qu’il y aura la guerre ? s’inquiéta Mme Povondra. Tu sais, à cause de notre Frantik, pour qu’il ne soit pas obligé de partir.
— La guerre ? fit Povondra père. Il faut une guerre mondiale pour que les États puissent se partager l’Océan. Mais nous, nous resterons neutres. Il faut bien qu’il y ait des neutres pour livrer des armes et tout le reste aux autres. C’est comme ça, décida M. Povondra
Comment n’aurai-je pas pitié du genre humain, je te le demande bien ? Mais il m’a surtout fait pitié quand je l’ai vu courir lui-même tête baissée à sa perte. Ça donne envie de crier, de voir ça. Crier et lever les bras comme quand on voit un train s’engager sur une mauvaise voie. Maintenant, il est trop tard pour l’arrêter.
Si vous cherchez la petite île de Tana Masa sur la carte, vous la trouverez en plein sur l’équateur, un peu à l’ouest de Sumatra ; mais si vous montez sur le pont du Kandong Bandoeng pour demander au capitaine J. Van Toch ce que c’est que cette Tana Masa devant laquelle il vient de jeter l’ancre, il lâchera une bordée de jurons, puis il vous dira que c’est le plus sale coin de l’archipel de la Sonde, encore plus minable que Taba Bala et tout aussi perdu que Pini ou Banjak ; qu’il n’y vit, sauf votre respect, qu’un seul homme – sans compter, bien sûr, ces pouilleux de Bataks – et que c’est un agent commercial, un soûlard, un bâtard de Cubain et de Portugais, plus voleur, mécréant et cochon que tous les Cubains et tous les Blancs pris ensemble ; et que s’il y a au monde quelque chose de foutu, c’est bien cette foutue vie sur cette foutue Tana Masa, c’est moi qui vous le dis, Monsieur ! Alors vous lui demanderez sans doute pourquoi il vient d’y jeter ses foutues ancres comme s’il voulait y passer trois jours ; il répondra à cette question par un grognement irrité, puis il vous fera comprendre, toujours en grommelant, que le Kandong Bandoeng ne serait pas venu dans les parages simplement pour du foutu coprah ou de l’huile de palme, ça tombe sous le sens, Monsieur, et d’ailleurs ça ne vous regarde pas, j’ai mes foutus ordres, Monsieur, et vous êtes prié de vous mêler de ce qui vous regarde. Puis il lâchera des jurons copieux et variés, comme il sied à un capitaine de bateau encore vert malgré son âge.
Mais si, au lieu de poser des questions indiscrètes, vous laissez le capitaine Van Toch grogner et jurer à cœur joie, vous en apprendrez plus long. Vous voyez bien qu’il a besoin de se soulager. Laissez-le donc parler, son amertume se frayera son chemin.