Paru à la fin de l'année 2016, cet ouvrage est peut-être passé un peu inaperçu dans la masse des beaux livres de Noël et c'est fort dommage : non seulement il est parfaitement illustré, mais il est très plaisant. Surtout il renseigne de façon précise sur des questions terre à terre, que l'on n'ose jamais poser, mais qui sont toutes assez intrigantes. Comment se chauffait-on dans les hôtels particuliers ou les appartements au temps du Roi-Soleil ? Que voyait-on exactement de nuit, lorsqu'on n'avait à sa disposition que la flamme vacillante des bougies ? Disposait-on de l'eau à satiété ou fallait-il se rationner dans le siècle pré-industriel des Lumières ? N'était-il pas dangereux de consommer des sorbets ou de boire « à la glace » ? Stéphane Castelluccio répond de manière très détaillée, grâce à de nombreuses sources d'archives patiemment dépouillées, dans une écriture fluide, enrichie d'exemples variés et d'anecdotes piquantes. Voilà un texte savant sans pédanterie, qui permet de faire la différence entre les chandelles, les bougies ou les cierges. L'éclairage, le chauffage et l'approvisionnement en eau de Versailles sont particulièrement analysés, notamment lors des grandes fêtes royales. Mais on découvre aussi le petit monde des vendeurs de bois ou de porteurs d'eau de Paris, les prix pratiqués par les différentes corporations et même, jusqu'à l'intimité des consommateurs dans les salles de bain ou dans les « lieux à l'anglaise ». On regarde alors avec un oeil neuf les reproductions des tableaux de François Boucher, de Jean-François de Troy ou de Chardin, qui sont aussi des documents sur la vie domestique de la fin du XVIIe siècle et du XVIIIe siècle.
Par
Christine Gouzi, critique parue dans L'Objet d'Art 532, mars 2017