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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Scandale au lycée, le professeur de musique est accusé d'avoir eu une relation sexuelle avec l'une de ses élèves, Victoria.
À partir de là, on assiste aux réactions des proches : parents, soeur, amies, professeurs, étudiants en art dramatique ou musique, et ce sans qu'à aucun moment les deux protagonistes n'interviennent directement dans le récit. Rivalité, jalousie, manipulation... Sentiments ou émotions sont habilement décrits.

L'adolescence est le sujet central de ce roman. "Les ados ont une telle conscience d'eux-mêmes, chacun d'eux est son propre public, le spectateur intransigeant de ses transformations, de son corps, de ses limites. L'adolescent a déjà tous les attributs d'un adulte, sans en assumer les responsabilités."

Parallèlement à ce fait divers, on assiste également à la mise en scène de cette relation par le groupe d'étudiants en théâtre, puisqu'ils décident d'en faire le clou de leur spectacle de fin d'année. J'ai adoré toute cette partie où le jeu théâtral est mis à l'honneur, où les exercices de comédiens révèlent les personnalités de chacun.

Le récit est donc construit par étapes sans suite logique. On saisit des instants, des fragments de cette relation, soit à travers les témoignages des personnages, soit à travers les scènes jouées par les étudiants. Et au final, on a beaucoup de mal à cerner les personnalités de deux héros. Où se situe la réalité ?

Ainsi, Eleanor Catton construit l'identité de ces deux personnages à travers le regard des autres. Quel est le rôle de chacun dans cette histoire ? C'est bien un roman troublant sur la perception qu'ont les autres de nous. C'est aussi un roman sur la période troublée de l'adolescence, répétition de l'âge adulte ?
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Envie d'un roman radicalement différent, sensible et violent à la fois, tranchant et subtil ? Toutes ces qualités sont réunies dans la superbe et très réussie Répétition de la jeune Eleanor Catton.

M. Saladin, proesseur de jazz band au lycée, est accusé par les parents d'une élève terminale, Victoria, de viol. Sa révocation et surtout la "faute" de Victoria ébranle le lycée et les consciences des élèves de fond en comble. le retentissement est tel que l'évènement inspire la pièce de fin d'année montée par les étudiants de l'Institut voisin, une prestigieuse école d'acteurs. Les relations se nouent, fragiles et matures à la fois, les langues se dénouent, et la sensualité affleure au coin de chaque paragraphe.


"M. Saladin a laissé derrière lui un méfiance singulière, tout ensemble ingénue, fasciné et aguichante, qui a ravagé mes élèves comme un virus. La jeune fille violée est suivie partout où elle va de chuchotements et de coups de coude et d'une jalousie aveugle et endolorie. Lorsque les lumières s'éteignent, les parents pleurent et se demandent l'un à l'autre ce qu'il lui a fait, mais c'est une toute autre question qui tracasse les filles : qu'est-ce qu'elle a fait, elle ? Qu'est-ce qu'elle sait maintenant qui la rend tellement dangereuse, comme la lente fuite ambrée d'un gaz nocif ?"

Une vois éminemment séduisante, différente, subversive et insidieuse, époustouflante à bien des égards. La justesse sensationnelle de cette écriture qui se savoure littéralement tient en grande partie à l'originalité d'une construction scandée par les confidences que les jeunes filles font à leur professeur de saxophone, figure ambiguë et tutélaire à la fois, et qui n'hésite pas à tisser patiemment la toile de la manipulation."Mes élèves, je les veux duvetées et pubescentes, arborant l'acné d'une sombre défiance, bouillonnant intérieurement de rage et d'ardeur et d'incertitude et de désolation", passage de témoin dangereuse entre enfance et âge adulte, ni tout à fait dans le monde des parents, ni tout à fait dans celui de ses élèves.

Un roman magique sur l'adolescence et son sublime éphémère, qu'on semble ne plus comprendre après l'avoir quitté pour toujours ; un roman où les adultes ne comprennent rien de rien et se font balader par de jeunes âmes innocentes et torves. Un roman exerçant un magnétisme étrange, malsain et presque vénéneux, évoquant D'Acier mais en mille fois plus élaboré, moins brut.

On a peine à croire que tout cela soit sorti de la plume d'une jeune femme d'à peine 25 ans ! Une vraie découverte, mieux, une révélation !

"N'oubliez pas que celui qui est assez malin pour vous rendre la liberté le sera aussi pour vous asservir".
Lien : http://le-mange-livres.blogs..
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Coup d'essai, coup de maître.

Je me suis laissée happer dès les premières pages par ce roman envoûtant et protéiforme, tour à tour roman d'apprentissage, fable perverse sur l'éveil de la sexualité et réflexion sur la représentation théâtrale. Eleanor Catton signe une oeuvre forte et dérangeante, dans la veine d'une Laura Kasischke, elle-même brillante conteuse et peintre de la noirceur adolescente. Derrière une écriture délicate et sensuelle se cache en effet un univers machiavélique, dont personne, pas même le lecteur, ne sortira indemne.

L'auteur entretient volontairement une certaine ambiguité : Victoria était-elle consentante ? A-t-elle été violée ? L'incertitude alimente le malaise, et suscite bien des jalousies. Perturbées, les jeunes filles se confient volontiers à leur professeur de saxophone, qui les voit défiler chaque semaine dans son studio. On s'attache rapidement à Isolde, la soeur de Victoria, à peine sortie de l'enfance, fraîche fleur sur le point d'éclore. On se prend de pitié pour Bridget, adolescente mal dans sa peau et complexée, constamment dénigrée par sa mère et invisible aux yeux de tous. On admire la force de caractère de Julia, jeune femme indépendante qui vit pleinement ses désirs et son homosexualité. le choix du saxophone comme dénominateur commun n'est évidemment pas anodin. A-t-on jamais vu instrument plus sensuel et plus masculin ? J'ai tout de suite été séduite par cet élément incongru, qui en dit long sur l'originalité du roman.

J'ai retrouvé avec plaisir l'univers des écoles de musique et des cours de théâtre, que j'ai beaucoup fréquentés durant ma folle jeunesse. La prof de saxophone est ici un personnage savoureux, qui semble vouloir constamment tirer les ficelles. On peut y voir le double de l'auteur, manipulant ses personnages comme des marionnettes au gré de ses propres désirs. Dans sa bouche fleurissent de superbes répliques, des propos parfois énormes, qu'elle assène nonchalamment à ses élèves ou à leurs parents. le trait est souvent à la limite de la caricature, mais procure au lecteur un plaisir pervers.

Il m'arrive rarement de prendre des notes au cours de mes lectures, mais je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager ces quelques lignes, qui vous aideront peut-être à cerner le personnage :

"Quelquefois, pour s'amuser, la prof de saxophone essaie de s'imaginer ce que donnerait une autre distribution. Elle s'imagine la fille qui joue Bridget dans le rôle convoité d'Isolde, opère la conversion en esprit, lissant les pauvres cheveux qui ne ressemblent à rien en un rideau uni qui tombe, soyeux, à partir de la raie au milieu, appliquant du rose aux joues et imprimant à ces traits qui s'y prêtent si peu l'expression à la fois insouciante et blessée qui est devenue la marque d'Isolde." (page 152)

Et si la vie n'était qu'une représentation, un simulacre d'existence ?
Quelle idée fascinante ! La Répétition nous propose ainsi une intéressante réflexion sur le théâtre. A travers le personnage de Stanley, jeune apprenti-comédien récemment admis à l'institut d'art dramatique local, nous découvrons les dessous de la représentation théâtrale. Stanley fait l'expérience du Théâtre de la Cruauté. Mais qu'est-ce donc ??? N'étant pas omnisciente, je reconnais volontiers avoir usé des services de mon ami Google pour écrire la suite de mon billet !

Intermède culturel :
Le Théâtre de la Cruauté est une théorie développée par Antonin Artaud (1896-1946), selon laquelle le théâtre consiste à projeter notre monde intérieur dans l'espace scénique, replaçant ainsi l'homme au centre de la création. le comédien privé de repères se retrouve alors plongé dans un monde sauvage et violent, accédant de cette façon à une dimension sacrée, métaphysique, pouvant conduire le spectateur jusqu'à la transe.
Fin de l'intermède culturel.

Difficile dans ce contexte d'identifier la limite entre le jeu et la réalité. Eleanor Catton établit une analogie avec les rôles que nous sommes amenés à interpréter tout au long de notre vie, parfois à l'insu de notre plein gré. Les jeunes héros du roman en font l'amère expérience : devenir adulte, cela signifie endosser un nouveau rôle, l'incarner sans commettre d'erreur, et en subir les désagréments. Cette initiation se fait bien souvent dans la douleur...

Tout cela est passionnant, d'autant plus que La Répétition est un roman admirablement construit, d'une grande originalité formelle. Je n'en dévoilerai pas plus ici, ne souhaitant pas gâcher le plaisir de la découverte ! J'ai personnellement été un peu déroutée par les toutes dernières pages, que je ne suis pas sûre d'avoir bien interprétées : la frontière entre réel et imaginaire se brouille, on ne sait plus très bien ce qui est du domaine du fantasme, de la représentation. Cela est évidemment voulu par la romancière, qui souhaitait que le lecteur continue à se poser des questions après avoir refermé le livre. Objectif atteint (et de quelle manière) !

Il semblerait que La Répétition se soit taillé un beau petit succès critique, en France comme à l'étranger. Je ne suis donc pas la seule à avoir apprécié le style et l'univers de Miss Catton. J'attends maintenant avec curiosité son prochain ouvrage.

Une oeuvre fascinante, d'une richesse et d'une maturité étonnantes. Un coup de coeur !
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“Un scandale éclate dans un lycée de jeunes filles : M. Saladin, le professeur de musique, est renvoyé pour avoir entretenu des relations coupables avec l'une de ses élèves, Victoria. Les camarades de classe de l'adolescente et sa jeune soeur se confient tour à tour à leur professeur de saxophone. Toutes sont en émoi, comme brusquement propulsées dans un monde de désir, de choix, de fantasmes dont elles pressentent obscurément qu'ils forgent la vie tout entière”… (début de la quatrième de couverture)

Premier roman de Eleanor Catton, une jeune néo-zélandaise de vingt-trois ans, La répétition est un roman très original, tant par sa construction et son style, que par ses thématiques. On peine peut-être un peu à s'y repérer au début de la lecture, mais assez vite on s'aperçoit que l'on suit deux intrigues qui s'entrelacent jusqu'à se rejoindre.

La première histoire se déroule dans le lycée de jeunes filles où le scandale a éclaté. Au coeur de cette première intrigue se trouve la prof de saxophone qui va recueillir les confidences des lycéennes : Isolde (soeur de Victoria), Julia (adolescente provocante et marginale) et Bridget (jeune fille un peu terne, dans l'ombre de sa mère). Quant à la deuxième histoire, elle se déroule à l'Institut, une école de théâtre où l'on entre par concours juste après le lycée. le personnage principal en est Stanley, un étudiant qui vient d'intégrer l'Institut et doit participer à la création d'un spectacle de fin d'année. Enfin, de ce qui relie les deux histoires je ne dirai rien, car cela apparaît assez tardivement dans le roman.

Contrairement aux lycées, l'institut théâtral est mixte, ce qui donne lieu à beaucoup de réflexions sur la différence des sexes. Mais ce qui semble intéresser particulièrement Eleanor Catton, c'est à la fois l'art dramatique, ses théories, les réflexions qu'il suscite sur les frontières entre le réel et l'imaginaire, et puis l'adolescence, cette période trouble qu'elle envisage comme une répétition de la vie à venir. Les identités à cet âge sont encore un peu floues et Eleanor Catton semble laisser entendre, qu'après quelques essayages, on se choisit une identité comme on endosse un rôle au théâtre.

J'ai beaucoup apprécié cette lecture. C'est un roman très habilement construit et très riche, que l'on n'épuise certainement pas à la première lecture. Je suis d'ores et déjà très curieuse de ce qu'Eleanor Catton va écrire par la suite…
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Silvia Avallone et Eleanor Catton. Respectivement italienne et néo-zélandaise. Moins de 25 ans l'une et l'autre, quand elles écrivent leur premier roman, D'acier et La répétition, tous les deux parus cette année en France. Et un talent fou qui incite à parier sur elles, sans grand risque de se tromper. La comparaison s'arrêtera là : leurs livres sont aux antipodes, D'acier rappelle Zola, La répétition est sous influence shakespearienne. Eleanor Catton a d'abord rédigé un monologue de théâtre, qu'elle a ensuite transformé en roman. Mais l'idée générale est restée : écrire sur le voyeurisme, la perte de l'innocence, l'insincérité, la subjectivité des regards. Quoi de mieux que l'adolescence pour aborder ces sujets : cette partie de l'existence est comme une répétition de la vie d'adulte à venir, avec ses errements, sa recherche d'identité, sa lucidité cruelle. Tout part donc d'une relation entre une élève, mineure, et son prof de musique. Viol ou rapport consenti ? On ne le saura jamais et ce n'est pas ce qui intéresse l'auteure. Non, c'est le buzz autour de l'affaire, et comment les jeunes filles en fleurs (vénéneuses) de son lycée se l'approprient, avec toutes les questions sur leur sexualité qui s'en trouvent bouleversées. Si le point de départ de la répétition est relativement simple, l'architecture du roman est elle éminemment complexe. D'un côté, une prof de saxophone (sexe aphone), sorte de psy manipulatrice, à laquelle une poignée de lycéennes viennent confier les derniers potins et exprimer leurs états d'âme. de l'autre, des étudiants en théâtre qui décident d'adapter à leur sauce l'événement décrit plus haut. Deux intrigues qui finiront d'ailleurs par se rejoindre. Eleanor Catton est une virtuose des masques. Tout se confond dans son livre : réalité, fiction, fantasmes. le lecteur, ballotté, n'a pas le choix des armes. Il lui faut accepter d'être dans le brouillard, souvent ; de se perdre dans les entrelacs du récit, parfois ; de se farcir des passages longuets, ça arrive. Moyennant quoi, ce jeu de rôles est des plus fascinants, d'autant que la romancière affirme qu'il lui est arrivé de procéder par écriture automatique. C'est possible, mais l'ensemble est sacrément maîtrisé, tour à tour raffiné et trivial, dans une prose politiquement incorrecte qui tient autant que de la provocation gratuite (les blagues pédophiles) que de la satire sociale la plus cruelle qui soit. Prenez son style, par exemple. Elle est capable de passer d'un langage djeuns à une langue précieuse, limite ampoulée. La répétition est une mascarade ébouriffante, un jeu théâtral irrévérencieux, dont Eleanor Catton tire les ficelles avec la dextérité d'un vieux briscard. Cela promet pour le futur.
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Quand je l'ai pris entre mes mains on m'a dit "ce livre soit on l'aime, soit on le déteste". Je l'ai lu en un peu moins de deux semaines et je ressors un bilan contrasté. La mise en page est un peu troublante, quel est donc le fin mt de ce rapport entre un prof et son élève ? Cette lecture met avant tout en lumière les chaos du quotidien des adolescents, les hésitations et les doutes..;alors que de leurs côtés les enseignants semblent chacun cassé par la vie, par une relation ou par le temps qui passe...Ces profs regardent avec amertume les jeunes qui répètent les heures qu'ils avaient commis autrefois....une lecture intéressante...
Lien : http://lesquotidiennesdeval...
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Roman trouble et troublant, très théâtral.
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