Nocturne en bleu et or de Whistler
Aux stridences vermillon de Degas peut répondre le doux poudroiement bleu et or de ce tableau de James McNeill Whistler. Cette toile très verticale représente l’ancien pont en bois de Battersea, à Londres. On songe aussitôt à une estampe japonaise avec cette barque qui glisse au premier plan, la brume qui envahit les bords de la Tamise et la courbe qui rappelle celle du pont de Kyobashi, décrit par Hiroshige. Cette vue nocturne, agitée par les éclats dorés d’un feu d’artifice à l’arrière-plan, a quelque chose de musical, entre Debussy et Satie. Et ce n’est pas le titre choisi par l’auteur, Nocturne en bleu et or, comme pour une partition musicale, qui dira le contraire.
La Vierge de l’Annonciation d’Antonello da Messine
Caché au sein du Palazzo Abatellis de Palerme, cet inoubliable buste
de la Vierge intrigue par sa douceur, sa retenue et sa simplicité. Peint sur bois vers 1475, il s’agit d’un chef-d’oeuvre de cet artiste de la Première Renaissance, influencé par les Flamands Jan Van Eyck et Petrus Christus pour la précision des détails et par les peintres florentins pour la traduction en peinture de la perspective. Ici, Antonello da Messine opte pour un fond abstrait noir, cerne l’ovale du visage de la Vierge d’un drapé bleu aux plis cassés, impressionne par sa capacité à donner de la profondeur à son panneau en peignant cette main vue par en dessous, éclairée latéralement et redoublant l’oblique du lutrin. Une leçon de géométrie.
Le Retour du fils prodigue de Rembrandt
Comme Le Massacre des Innocents de Poussin (musée Condé de Chantilly), La Famille de saltimbanques de Picasso (National Gallery de Washington) ou La Joie de vivre de Matisse (Barnes Foundation, Philadelphie), il est des chefs-d’oeuvre qui ne circulent jamais. C’est le cas de cette grande toile de Rembrandt conservée à Saint-Pétersbourg. Il faut donc se rendre en Russie si l’on veut, comme moi, tomber en arrêt devant cette scène où un vieillard aveugle, qui attend son fils depuis des années, reconnaît cet enfant prodigue en palpant ses épaules. L’oeuvre n’est qu’un camaïeu de couleurs chaudes, jaunes, rouges, bruns surpris par des coups de lumière. Dans cette atmosphère fuligineuse, Rembrandt peint une scène éminemment humaine, rappelant les souffrances, le pardon et la grandeur d’âme.
On retrouve la Grèce dans tout mon travail, une Grèce nourrie des Étrusques, de Burne-Jones et de Pompéi.