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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Dans tous les livres de Mia Couto il y a une tristesse poignante empreinte d'une grande poésie qui émeut profondément.
Le grand-père à son petit-fils auquel il refuse un verre d'eau :
— Ne t'inquiète pas, je bois comme les oiseaux, je picore dans les gouttes. »

Les vieux aiment raconter des histoires aux enfants qui viennent se réfugier près d'eux, « leur révéler des légendes ». Pour le faire ils « délient leurs paroles » comme l'écrit l'auteur. Mia Couto, lui, délie la langue portugaise pour la réinventer, donner une autre forme aux mots et aux phrases pour leur faire rendre les choses et les émotions plus vivantes en y mêlant un peu de fantastique (par exemple « on dîna sous le nuage du silence plutôt que dans un silence pesant). Il redonne aussi, en recréant la langue, une voix à tous les mozambicains pauvres, pris dans un monde qui leur est bien dur à vivre, qui gardent, malgré tout, une capacité d'émerveillement et savent sourire même tristement : 
« Cette nuit-là, la lune était pleine. Dans le noir, le clair de lune se répliquait en mille gouttelettes, allumant une crèche fantastique. Jamais je n'avais assisté à tant de lumière nocturne, l'étoilement du ciel juste sur notre toit. Mon père sourit :
— On a la lune électrique ! »

Et c'est encore une réussite que ce conte de « La pluie ébahie » où « la cérémonie des commandeurs de nuages » n'ayant pas porté ses fruits « le lendemain matin, la pluie demeurait accrochée à un cintre invisible, planant sans poids. »

Par le biais du conte et l'introduction du fantastique Mia Couto n'occulte pas les problèmes contemporains : la pollution, le racisme, la condition des femmes qui envahissent le quotidien du village de Senaller et de ses habitants et perturbent leur vie.
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La pluie reste-elle bouche bée devant le misérable et beau Mozambique au point d'en oublier de tomber ? Elle se contente d'un pluviotis agaçant, du jamais vu, qui accroche une goutte aux cils, de quoi pleurer un peu devant le fleuve qui n'est plus nourri et se dessèche. C'est à hauteur d'enfant que nous voyons le village s'exacerber du manque d'eau, par le regard d'un garçon que ses parents ont toujours traité d'ébahi : "Ils disaient que j'étais lent pour agir, attardé pour penser. Je n'avais pas vocation à faire quoique ce soit, peut-être n'avais-je pas vocation à être. Et bien la pluie était là, clamée et réclamée par tous et finalement aussi ébaubie que moi. Enfin j'avais une soeur tellement maladroite qu'elle ne savait même pas tomber."

Et si ce n'était pas un sort mais la fumée des usines des blancs qui empêche la pluie ? Soit, mais le père n'ira pas s'enquérir là-bas, parce ce qu'il n'a pas envie. La mère affolée insiste : – "Ce sont ces fumées qui gênent la pluie. L'eau devient lourde, elle ne peut plus se faire nuage..." et , défiant l'autorité paternelle, elle emmène son gamin par la main voir les chefs de l'usine pour leur faire entendre ses raisons. Les choses se compliquent quand la mère en sort les ongles nacrés de rouge – "un rouge triste comme un sang déjà bleui" – et le garçon se trouve légataire d'un lourd secret. Rien n'est simple au Mozambique entre les noirs et les blancs, ni entre noirs s'il est question de jalousie et d'honneur.
[...]
La contrée connaît le drame de la pénurie d'eau potable, à laquelle accède moins de 30% de la population. Les femmes qui traditionnellement s'en occupent marchent parfois plus de vingt kilomètres chaque jour vers les puits. Les maladies hydriques sont les principales causes de mortalité. Quand la pluie ne vient pas, c'est La guerre de l'eau. D'après l'Unicef, près de 2 000 enfants de moins de 5 ans meurent quotidiennement dans le monde de maladies diarrhéiques, et près de 1 800 morts sont liées à la qualité de l'eau, à un assainissement et une hygiène précaires.

Derrière les chiffres, derrière les pluies irrésolues de Mia Couto, discernons la tragédie humaine.

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Je ne connaissais pas cet auteur ; j'avoue que je sors "ébahie" de ce merveilleux petit conte plein de poésie et de tendresse.
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Un court roman dépaysant, intemporel et poétique mené par la plume posée et élégante de Mia COUTO.

Senaller, village du Mozambique, un jeune garçon vit dans la maison familiale. Depuis quelques temps, les terres deviennent arides, craquelées par la sécheresse ambiante et l'absence de pluie nourricière. Pourtant, un "pluviotis" demeure et humidifie les corps et les tissus. Serait- une mise à l'épreuve de Dieu ? Les conséquence d'une légende non respectée ? Ou alors cette usine nouvellement active à proximité et qui rejette nombre de vapeurs et fumées ?

A travers le point de vue innocent d'un enfant, entouré de personnages adultes attachants et différents ; une mère à fort caractère prenant les choses en main, un grand – père tendre, nostalgique se laissant mourir, un père absent se laissant vivre ou encore une tante vieille fille, tare et malédiction familiale, l'auteur emporte son lectorat au coeur d'un roman à la limite de la nouvelle et frôlant le conte moralisateur. Entre légendes locale des Ntowenis, malédictions et croyances divines, l'enfant se heurte aux avis d'adultes pour se construire lui-même apportant une certaine innocence au récit et une naïveté des croyances traitées. Au delà, les thèmes de l'écologie et du racisme sont manifestes entre le fleuve et les puits asséchés, les cultures ralenties à l'agonie et le pouvoir des blancs sur l'industrie. Par ailleurs, le vocabulaire général et spécifique de l'eau, tour à tour, scientifique et plein de poésie est développé avec une grande richesse de termes et de descriptions.

En bref, un baume à l'âme que ce livre plein de douceur et où le temps semble s'être arrêté dans une atmosphère humide asséchante et aérienne. Une parenthèse magico-mélancolique absolument divine à savourer et à ressentir. A lire !

Je remercie Babelio et Les éditions Chandeigne pour ce partenariat.
Lien : https://songesdunewalkyrie.w..
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Une pépite de littérature que La pluie ébahie de Mia Couto. C'est la première fois que je lis cet auteur et j'ai été séduite. Quelque part au Mozambique, dans un village si bien dénommé Senaller car depuis belle lurette, l'on ne s'y établit plus, - on ne fait que le quitter - une terrible sécheresse menace la survie des habitants. Décidée à savoir si la sécheresse est due aux rejets de l'usine voisine, la mère du narrateur rend visite au propriétaire blanc (et cela a son importance) à l'insu de son mari neurasthénique depuis qu'il est revenu des mines en Afrique du sud. L'enfant erre, dans un village apparemment sans avenir, entre le secret de sa mère, la tristesse des membres de sa famille, et s'évade grâce aux légendes que lui raconte son gand-père. Ce très court roman est détrempé de saudade. Grâce à une poésie mélancolique, délicate et poignante, Mia Couto évoque les fils ténus qui tiennent une famille, une communauté, en passant par le racisme et les mystères des coeurs humains. le temps passe, la pluie finira t-elle par tomber ?
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magnifique, Mia Couto jongle avec le verbe et nous emmène dans un songe merveilleux!
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