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EAN : 9781022601475
Editions Métailié (22/01/2015)
3.32/5   42 notes
Résumé :
Lorsque le chasseur Arcanjo Baleiro arrive à Kulumani pour tuer les lions mangeurs d’hommes qui ravagent la région, il se trouve pris dans des relations complexes et énigmatiques, où se mêlent faits, légendes et mythes. Une jeune femme du village, Mariamar, a sa théorie sur l’origine et la nature des attaques des bêtes. Sa sœur, Silência, en a été la dernière victime. L’aventure est racontée par ces deux voix, le chasseur et la jeune fille, au fil des pages on décou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
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L'Afrique de Mia Couto est loin d'être une invitation au voyage. Il laisse plutôt entrevoir une réalité sombre et désolée, une terre brûlante ravagée par les conflits et les guerres dont les femmes sont des victimes expiatoires. Lorsqu'elles ne subissent pas la violence des hommes, elles sont la proie des lions qui règnent autour d'un village abandonné du Mozambique, Kulumani, «endroit fermé, cerné par la géographie et atrophié par la peur».
Avec l'arrivée d'un chasseur professionnel, on se dit qu'il mettra fin à cette terrible série d'une vingtaine de femmes dévorées par les fauves. Mais avec un récit plein de mystères et de mysticisme, Mia Couto emmène le lecteur dans un univers particulier, un monde aux frontières brouillées où les esprits accaparent l'âme des vivants, où les personnages captent les ondes secrètes d'un autre langage, celui des malédictions et des croyances ancestrales. Pour le lecteur ordinaire c'est un récit baigné d'une réalité invisible, voire impénétrable à laquelle il n'est pas toujours évident d'accéder. A moins que Mia Couto s'amuse à égarer le lecteur ...
D'autant plus que l'auteur alterne la voix du chasseur, lui-même poursuivi par ses propres démons et celle de Mariamar soeur de la dernière victime, on la découvre spectatrice de sa propre vie, une vie dramatique et énigmatique qui menace de la plonger dans la folie. Conjuguées mais distinctes, les voix de ces personnages aux vies intimes intenses se percutent pour faire surgir une vision sauvage et chaotique. On devine le véritable paysage que chacun porte en lui, mais ces récits tout en intériorités projettent les deux personnages dans plusieurs directions, si bien qu'au cours de la lecture on se demande si les lions sont bien réels. Entre les animaux existants mais quasi-absents tout le récit, les fétiches fabriqués par les sorciers et les hommes-lions issus de hiérarchies puissamment ressenties qui condamnent la dignité des femmes, injustement bafouée, on est parfois confronté à une multitude de pistes d'interprétation savamment entretenue par l'auteur...

Reste que ce qui séduit dans La confession de la lionne, c'est de retrouver la plume souveraine et ensorcelante de l'auteur, il y a toujours le charme d'une phrase accomplie qui opère, une poésie sombre et mystique qui jaillit à la surface de la prose, conférant au texte une beauté évidente. Une beauté asphyxiante aussi car il faut résister à la chape de plomb qui pèse au fil du texte.
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Perdu au fin fond du Mozambique, le village de Kulumani vit dans l'angoisse depuis que les lions mangeurs d'hommes sèment la mort la nuit venue. Mariamar et ses parents viennent d'enterrer Silência, leur dernière victime. Dernière car le gouverneur de la région, soucieux d'établir son pouvoir, a décidé de faire venir un chasseur de lions de Maputo, Arcanjo Baleiro. Mais le mulâtre n'est pas le bienvenu à Kulumani, la mère de Miriamar, surtout, craint que le chasseur emmène sa fille, comme il le lui a promis il y a seize ans de cela. Entre terreur et superstitions, des drames vont se nouer, dans un village habitué à la violence.

Il faut appeler un chat un chat mais pour le plus grand des félins, les choses sont un peu moins terre à terre, surtout si le lion rôde autour d'un village africain. Ici les croyances populaires se mêlent aux considérations plus prosaïques. La magie et les sortilèges ont plus de poids que les faits réels. Et, quand le chasseur de fauves dégaine son fusil, sa cible se fait mouvante, changeante. Qui faut-il abattre ? Un lion ? Un esprit ? Un homme ? le danger ne vient pas toujours de la jungle environnante, les femmes du village en savent quelque chose.
Inspiré par une expérience vécue, Mia COUTO donne la parole à deux protagonistes de l'affaire : Arcanjo le chasseur et Miriamar, soeur de la dernière victime. Leur passé et le présent tissent une trame qui déroute, embrouille, égare mais qui crée aussi une ambiance ambiguë, entre songe et réalité, surnaturel et traditions, mythes et légendes du Mozambique.
Une lecture mystérieuse, dépaysante, parfois difficile à suivre mais qui interroge sur la cruauté des hommes et la souffrance des femmes. A tenter.
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Cette histoire est contée par deux narrateurs : Mariamar, jeune femme du village attaqué par les lions et le chasseur Arcanjo Baleiro. Ce sont leurs vies, leurs états d'âme, les croyances, les légendes de ce peuple que Mariamar et Arcanjo nous livrent. Tout de suite, j'étais dans l'ambiance, très loin de mon milieu familier, me voilà en Afrique, au Mozambique, un lieu étranger, des moeurs différentes. À Kulamani, les femmes ne sont bonnes qu'à travailler, à faire des enfants, à subir leur mari et si l'une d'elles est victime d'un viol collectif, aucun homme ne sera puni, il n'y a qu'à regarder les journaux télévisés pour voir que c'est toujours d'actualité ! Mis à part cela, Mariamar reste une énigme ; elle se raconte mêlant à sa vie des légendes, des mythes, du surnaturel ; ma lecture achevée, je ne suis pas sûre de l'avoir bien comprise. Heureusement il y a Arcanjo Baleiro, un chasseur qui ne veut pas tuer, lui je l'ai bien cerné !
La confession de la lionne fut pour moi une lecture dépaysante et déroutante, à vous de vous lancer dans l'aventure de cette chasse aux lions, à la découverte d'autochtones ancrés dans leurs traditions ancestrales. L'écriture de Mia Couto est très belle. Un grand merci aux éditions Métailié et à Babelio pour l'organisation de cette Masse critique.
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Scientifique et défenseur de l'environnement, Mia Couto est aussi l'écrivain prodige de sa terre natale, le Mozambique. La confession de la lionne dit-il, est inspirée de faits réels qui se sont produits en 2008 lors des attaques inexpliquées des fauves contre les hommes.
Par une écriture à la fois flamboyante et féroce, rude et poétique, j'ai été transportée sur cette terre aride dont l'immensité cache le ciel, où les chemins n'existent que par ce qu'ils nous trouvent, où la seule ligne d'évasion est le fleuve, Lideia. le paysage aride n'épargne pas les hommes et les femmes de cette terre gangrénée par la guerre qui a semé le terreau de la peur, de la jalousie et des médisances.
Kulumani est l'un de ces villages dont la présence menaçante des lions dévoreurs d'hommes révèle au grand jour les pulsions les plus violentes. le recours aux rites et traditions permet de tirer force pour vaincre le mal mais son revers est aussi une certaine forme de soumission.
Mariamar est l' une de ces femmes du village où les hommes ont oublié que "Dieu a déjà été femme". Comme tant d'autres femmes, Mariamar est contrainte à l'obéissance mais elle connaît le pouvoir des mots grâce à son oncle maternel appelé grand-père, son protecteur.
Mariamar écrit sa version des faits en écho au journal tenu par le chasseur Arcanjo Baleiro dont elle s'était éprise il y a 16 ans. Celui-ci est revenu chasser les lions à la demande de l'administrateur qui espère ainsi asseoir son pouvoir politique. Mais Arcanjo ne tue pas, il chasse. Il sera aussi le dépositaire d'un pan entier de silence enfin brisé par la confession d'une lionne.
J'ai beaucoup aimé la complexité des personnages, la réalité difficilement saisissable marquée par la forte imprégnation des croyances, la beauté des légendes et la place prépondérante faite aux ancêtres et aux défunts.
J'ai ressenti l'admiration et l'amour de l'auteur pour sa terre, une terre de poussière foulée par une population humaine et animale qui ne font qu'un.

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" L'histoire était simple mais énigmatique, comme tout ce qui se passe à Kulumani."

Dans ce roman choral, Mariamar et Arcanjo Baleiro ("le chasseur") évoquent la panique qui s'est emparée du village de Kulumani après que des humains aient été attaqués par des lions.
A travers ces récits animistes, qui donnent parfois (souvent même) l'impression d'être décousus, les personnages évoquent les côtés les plus sombres des êtres humains et du pays qu'ils habitent.

Derrière les images poétiques auxquelles Mia Couto nous a habitué et un détachement apparent du problème des lions, le roman décrit des réalités difficiles du Mozambique : isolement, médisance, travail des enfants, viols, inceste, silences lourds et pesants.
On comprend vite que la chasse au lion n'est qu'un prétexte et que les apparences et dialogues convenus masquent des instincts humains que les convenances de la civilisation tente de dissimuler. Plutôt que d'affronter cette part d'ombre, les individus se contentent d'évoluer dans les pièges dans lesquels ils se sont mis eux-mêmes ou dans lesquels le groupe les enferme : la hiérarchie et la loi du village, les contrats, la condition sociale ou le genre. Et la meilleure stratégie pour éviter ses parts d'ombres, dans la littérature comme dans la vie : c'est d'accuser l'Autre. Et lorsqu'il s'agit d'un animal sauvage et à la réputation féroce, la démonstration n'est pas à faire. Que ce soit les personnages ruraux (comme le chasseur) ou les intellectuels (comme l'écrivain), tous se parlent sans se comprendre et sans chercher à atteindre ce but car l'objectif est tout autre : être rassemblé autour d'une cause et d'un ennemi commun.

Dans ce roman aussi j'ai relevé de nombreux passages pour leur beauté ou leur vérité incisive. Certes, je ne peux pas dire que c'est le meilleur de l'auteur tant je me suis ennuyée par moments, lassée des égarements mais la fin m'a conquise et fortement émue. Et que dire de la maestria avec laquelle il nous expose les manipulations de notre réalité (avec les photos, les journaux et la narration même) : c'est de la littérature, tout simplement, celle qui joue avec les mots et les lecteurs. Et la lecture des romans de Mia Couto (ou de romanciers d'autres continents, de manière plus générale) constituent une façon de se confronter à une autre façon de voir et comprendre le monde et ses réalités. Alors oui, les procédés stylistiques qui consistent à brouiller ou déplacer sans cesse les frontières rationnelles de nos perceptions, mais aussi la narration qui oscille entre faits, Histoire, sagesse ancienne et contes nous éloigne beaucoup de notre zone de confort occidental. Mais est-ce un mal de s'y confronter de temps en temps ?
C'est vrai que ce n'est pas le type de texte accessible/appréciable par tous les types de lecteurs, mais ce n'est pas propre à l'oeuvre de Mia Couto, ni à ce type de littérature. Pour ma part je retiens la belle récompense qu'a été la fin du roman.
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critiques presse (2)
Telerama
01 juillet 2015
Chez cet auteur nourri par la magie de l'enfance, briseuse de frontières et ancrée dans le présent, le silence est d'or, jusque dans l'écriture, chantante et soudain recueillie.
Lire la critique sur le site : Telerama
LaPresse
24 avril 2015
À dévorer jusqu'au point final.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Tous les matins la gazelle se réveille en sachant qu'elle doit courir plus vite que le lion où elle sera tuée. Tous les matins le lion se réveille en sachant qu'il doit courir plus vite que la gazelle où il mourra de faim. Peu importe que tu sois un lion ou une gazelle : quand le Soleil point, il vaut mieux que tu commence à courir.

Proverbe africain
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Je n'ai jamais aimé les aéroports. Tellement bondés, tellement vides. Je préfère les gares où il reste du temps pour les larmes et agiter les mouchoirs. Les trains démarrent lentement, en soupirant, en regrettant de partir. L'avion a des hâtes qui ne sont pas humaines.
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Personne plus que moi n'aimait les mots. Pourtant, en même temps, j'avais peur de l'écrit, j'avais peur d'être autre et d'être ensuite trop à l'étroit en moi-même. De la même manière que grand-père sculptait des bois en cachette, je gardais une mission secrète. Le mot dessiné sur le papier était mon masque, mon amulette, ma potion.
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La plume pèse ; l'oiseau pèse aussi. Le plus léger est celui qui sait voler. Tel était le proverbe de dona Martina, ma défunte mère. Moi, les deux légèretés me pèsent et mes rêves ne se muent jamais en vols nocturnes.
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Elle retraça ce qui était arrivé : par mégarde l’employée avait traversé le mvera, le campement des rites d’initiation pour jeunes hommes. L’endroit est sacré et il est expressément interdit à une femme de pénétrer dans ce territoire. Tandi a désobéi et a été punie : tous les hommes ont abusé d’elle. Tous ont usé d’elle. La fille a été conduite au centre de santé local, mais l’infirmier a refusé de la soigner. Il avait peur des représailles. Les autorités du district ont reçu une plainte, ils n’ont rien fait. Qui à Kulumani a le courage de se dresser contre la tradition ?
Mon mari s’est tu. Même quand je l’ai menacé, il n’a rien fait….
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Vidéo de Mia Couto
Dimanche 2 octobre 2022 Clôture du FIG 2022 et annonces du FIG 2023 avec François-Xavier FAUVELLE, président 2022, Merieme CHADID, grand témoin 2022, Mia COUTO, président du Salon du Livre 2022, Bruno TOUSSAINT, maire de Saint-Dié-des-Vosges et Thibaut SARDIER, président de l'ADFIG
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