Après
la Volonté du Dragon et
la Route de la Conquête,
Lionel Davoust nous propose une nouvelle plongée dans son univers d'Evanégyre via Port d'Âmes, roman qui se veut indépendant des autres comme les précédents, et se déroulant plusieurs siècles après ceux-ci.
Si le livre est clairement abouti, on y retrouve cependant les qualités et défauts de l'auteur notés par le passé.
Là où le bas blesse franchement, c'est le personnage de Rhuys ap Kaledán, plein de candeur et de naïveté à un point tel qu'on a envie de le secouer voire baffer par moments. Or, difficile de se passionner pour une histoire dont le personnage principal nous agace. Surtout que l'on a affaire à une histoire au final somme toute assez classique, surtout en fantasy.
De plus, elle souffre de longueurs, notamment via des péripéties qui se répètent inutilement ou n'amènent guère de variations en milieu de roman, où encore d'autres qu'on voit venir de loin mais pas notre cher personnage tête-à-claque.
Si le style est indubitablement travaillé, sans être complexe ni simpliste, sachant nous captiver à l'occasion, force est d'admettre également qu'il participe parfois à cet effet de longueur, ou laisse indifférent.
En revanche, d'autres éléments savent faire pencher la balance dans l'autre sens.
En effet, la cité franche, avec sa culture et son fonctionnement bien particulier, s'avère le cadre parfait pour ce genre d'histoire, et donne un vrai cachet au roman. On ne se lasse jamais de l'explorer avec le personnage, d'en découvrir toujours plus, y compris et surtout dans les plus terribles secrets dont elle regorge en son sein.
Jeu de l'auteur avec ses lecteurs les plus fidèles, les clins d'oeil et références à l'Histoire d'Evanégyre foisonnent pour prendre une importance inattendue à un moment. En tout cas, l'univers et son Histoire continuent à se densifier tout en restant abordable et passionnante, notamment avec la mythification d'éléments lus dans les précédents ouvrages.
Si Rhuys agace pendant une bonne partie du roman, il saura faire montre d'une belle évolution (quoi que tardive) grâce aux souvenirs de la Vendeuse et à ses prises de conscience successives suite à ses découvertes de dessous de la Cité et des manigances de ceux qui l'entourent.
D'ailleurs, sa relation avec la Vendeuse, teintée de poésie, de mystères, de beauté et de douleurs, évitant le côté fleur bleue, est très bien retranscrite. On se plaît à suivre leurs rencontres, où chacun se dévoile un peu plus, et évoquent parmi les plus beaux moments du livre.
Enfin, la dernière partie du livre s'avère de grande qualité, entre la confrontation finale entre Rhuys et Gheze où on retrouve un peu le
Lionel Davoust nouvelliste, et la conclusion douce-amère touchante qui montre que l'auteur a tout compris et su saisir l'essence-même des beautés douloureuses qu'il évoquait.
Malgré des qualités évidentes, j'en ressors un peu déçu et pourtant impatient de découvrir son nouveau projet toujours dans le même univers, s'annonçant comme une trilogie de post-apo fantasy se déroulant pendant les Ages Sombres. le rendez-vous est pris.